Le 12 décembre 2014, le Conseil d’Etat a rejeté les requêtes de députés UMP et d’associations contre la circulaire dite Taubira demandant à ce que puissent être accordés des certificats de nationalité française aux enfants nés à l’étranger par GPA. Des déclarations des plus outrées de Copé et consorts avaient, en janvier 2013, salué ce texte qui ne faisait que rappeler l’Article 18 du code civil : « Est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français ».
Le 25 janvier 2013, sous la signature d’ailleurs d’un Directeur du Ministère et non de la Garde des Sceaux, paraissait une circulaire « sur les conditions de délivrance des certificats de nationalité française (CNF) aux enfants nés à l’étranger de Français, lorsqu’il apparaît, avec suffisamment de vraisemblance, qu’il a été fait recours à une convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui. » Objet simple : rappeler la loi et éviter donc que ceux qui sont chargés de l’appliquer, en l’occurrence les greffiers-chefs, ne l’interprètent de façons diverses.
« Vous veillerez, dans l’hypothèse où de telles demandes seraient formées, et sous réserve que les autres conditions soient remplies, à ce qu’il soit fait droit à celles-ci dès lors que le lien de filiation avec un Français résulte d’un acte d’état civil étranger probant au regard de l’article 47 du code civil selon lequel “tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant, après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité”
(…) le seul soupçon du recours à une telle convention conclue à l’étranger ne peut suffire à opposer un refus aux demandes de CNF dès lors que les actes de l’état civil local attestant du lien de filiation avec un Français, légalisés ou apostillés sauf dispositions conventionnelles contraires, sont probants au sens de l’article 47 précité. »
Scandale immédiat – nous sommes en plein débat sur la loi pour le mariage pour tous !
«Avec cette circulaire passée en catimini, on régularise, donc on encourage la GPA»Daniel Fasquelle
«La seule portée de ce texte, c'est de faciliter la GPA» Hervé Mariton
«Dans ces débats, il y a un avant et un après-circulaire, qui est de la provocation ou de l'inconscience» Philippe Gosselin
«On dit : "en France, le corps n’est pas une marchandise donc les mères porteuses sont interdites mais si vous allez à l'étranger, on ferme les yeux, c’est légal, on va vous légaliser l’enfant qui est né d’une mère porteuse"» Valérie Pécresse.
«Les masques sont en train de tomber. Vous avez refusé d'ouvrir un grand débat national sur votre projet qui bouleverse le cadre juridique du mariage, de la filiation et de l'adoption. Vous avez méprisé les 800.000 Français qui vous invitaient à la sagesse, les autorités civiles, religieuses et morales auditionnées dans des conditions lamentables. Vous privez le peuple d'un référendum sur cette question fondamentale.» J.-F. Copé
«Derrière le mariage pour tous, il y a le droit à l'enfant pour tous et par tous les moyens. (…) La PMA et la GPA sont des lignes rouges vers lesquelles le gouvernement s'avance en catimini.» François Fillon
«Votre loi n'est pas un point d'arrivée mais un point de départ, et les bébés- éprouvette et les ventres des mères porteuses en sont les destinations. Vous ouvrez la voie à la marchandisation du corps féminin.» Laurent Wauquiez
Avec une certaine lâcheté, on verra même un parlementaire PS juger inopportune la parution de cette circulaire.
Dans la foulée, les députés UMP Guillaume Larrivé (ci-contre), Daniel Fasquelle, Marie-Jo Zimmermann et Jean-Frédéric Poisson déposent un recours au Conseil d'Etat pour demander "d'annuler pour excès de pouvoir" la circulaire de la garde des Sceaux Christiane Taubira sur les enfants nés de mère porteuse à l'étranger car "la circulaire attaquée (...) méconnaît les dispositions législatives prohibant le recours à la gestation pour autrui" ; elle "ne se borne pas à interpréter les textes en vigueur mais fixe des règles nouvelles".
Nos UMPistes seront suivis par l’association familiale catholique de l’Auxerrois, l’association Juristes pour l’enfance, la fédération des familles de l’Ain, l’association Avenir de la culture (émanation de Travail, Famille, Propriété) et très bizarrement le syndicat national Force ouvrière des magistrats !
Il aura donc fallu près de deux ans pour que le Conseil d’Etat renvoie les cyniques députés - qui ne pouvaient ignorer que leur recours était bidon - et les associations de cagots au seul respect de la loi et surtout des droits de l’enfant qui ne peut être pénalisé pour les fautes putatives de ses géniteurs. Entretemps, un jugement du CEDH aura clairement rappelé cette évidence.
Le Conseil d'Etat réaffirme le droit de l'enfant à sa nationalité
« Le Conseil d’État juge, cependant, que la seule circonstance qu'un enfant soit né à l’étranger dans le cadre d'un tel contrat [GPA], même s'il est nul et non avenu au regard du droit français, ne peut conduire à priver cet enfant de la nationalité française. Cet enfant y a droit, dès lors que sa filiation avec un Français est légalement établie à l’étranger, en vertu de l’article 18 du code civil et sous le contrôle de l’autorité judiciaire. Le refus de reconnaître la nationalité française porterait sinon une atteinte disproportionnée au respect de la vie privée de l’enfant, garantie par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH). »
« Il en déduit que, contrairement à ce que soutenaient les requérants, la circulaire attaquée n’est pas illégale en ce qu’elle expose que le seul soupçon de recours à une convention de gestation ou de procréation pour autrui ne peut suffire à opposer un refus à une demande de certificat de nationalité dès lors que les actes d’état civil local qui attestent du lien de filiation avec un Français peuvent être regardés, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, comme probants au sens de l’article 47 du code civil. »
Cette décision va être contestée, comme celle du CEDH, par les Agacinski et de la Rochère.
Déjà, dans Le Figaro, une Adeline le Gouvello de la Porte, avocate, prétend une fois de plus que cette décision « va créer une avancée vers la légalisation de la GPA ». Hélas non ! car de ce point de vue les gramsciens de l’anti mariage pour tous ont gagné la bataille de l’hégémonie culturelle et bloquent avec leurs outrances calculées tout vrai débat sur la GPA ou l’euthanasie.
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