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26 novembre 2010 5 26 /11 /novembre /2010 16:04

clairobscur

Qu’un Valls ou un Hollande mettent en cause un document élaboré par Hamon, et la presse de titrer sur les divisions du PS. Mais qu’un Rocard et un Jospin taillent en pièces un travail sur un sujet ô combien passionnel, la gestation par autrui (GPA), autrement dit « les mères porteuses » ne provoque aucun écho. La bioéthique ça ne buzze pas. Et pourtant le scénario a tout pour plaire : de vieux éléphants gardiens des valeurs face à des personnalités du monde bioéthique ayant produit un rapport qui a inspiré celui du PS sur ce thème. En caricaturant : dogmatisme vs pragmatisme.

 

En France, actuellement, la situation est claire : l'article 16-7 du Code civil dispose que  « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est nulle ». Sauf que, les gestations par autrui qui ont donné lieu à un acte de naissance aux Etats-Unis sont parfois reconnus par l’état-civil conformément d'ailleurs au même code civil.

contrejour

Le rapport de Terra Nova, controversé jusque dans ses rangs, inscrit sa démarche dans un « droit à la parentalité ». Il prend en compte toutes les techniques d’assistance médicale à la procréation (AMP) ainsi que l’accès à la parenté des couples homosexuels, les dons de gamètes anonymes ou pas… Il montre aussi que la frontière entre filiation charnelle et filiation adoptive est caduque avec l’AMP.

 

Mais la piste la plus sujette à controverse était celle qui proposait la reconnaissance – limitée et encadrée – de la gestation par autrui (GPA). Autrement dit des « mères porteuses ». Mères porteuses qui acceptent donc de recevoir, s’agissant de couples hétérosexuels, l’embryon fruit de la fécondation in vitro des gamètes des futurs parents.

 

epanouie

Les auteurs du rapport avait pleine conscience du caractère audacieux de la proposition : « Les réticences collectives autour de la GPA sont intenses. Elles dénoncent une technique de confort pour 'career women' qui n’ont plus de temps à consacrer à la grossesse, ou pour stars qui veulent garder le ventre plat. Une commercialisation du corps humain, un nouvel asservissement des pauvres qui louent leur ventre pour l’enfantement des enfants des riches. Une aliénation du corps de la femme, dont l’utérus est instrumentalisé et ravalé au rang de couveuse. La négation de la grossesse et du lien fondamental créé entre la femme et l’enfant à naître qu’elle porte. Enfin, au plan moral, la violation de l’ordre naturel et la manipulation de la vie. Les dérives constatées aux Etats-Unis montrent que ces réticences sont légitimes. »

 

Mais la proposition était très cadrée : insuffisance utérine de la mère d’intention, interdiction bien sûr de la commercialisation, sécurisation de la mère porteuse. « Ces femmes peuvent être heureuses de leur grossesse : elles aident des couples en détresse, souvent des amis ou des parents, dont elles sont le dernier espoir, là où la médecine a échoué, et elles en tirent une forte valorisation personnelle. »

 

Un réquisitoire implacable

 

Le contre-rapport est un réquisitoire implacable. Il inscrit sa lutte contre les « mères porteuses » dans un combat multi-séculaire,  « pour la cause des femmes et la défense des acquis progressistes.

 La disparition du servage et l’abolition de la domesticité au XVIIIème siècle, l’abolition définitive de l’esclavage au XIXème siècle, la fin de l’infériorité juridique de la femme au XXème siècle sont autant d’étapes essentielles dans la marche vers le progrès de la société française. L’inaliénabilité de la personne humaine doit être consacrée au XXIème siècle. »

 

enceinte26

« Partout où elle a été légalisée dans le monde, la pratique des mères porteuses se traduit concrètement par une nouvelle exploitation, radicale, au sens où il s’agit de la prise de contrôle sur la vie d’une femme pendant neuf mois, et généralement d’un rapport inégalitaire et d’aliénation, entre commanditaires aisés et mères porteuses défavorisées souvent recrutées par des sociétés aux pratiques marchandes plus ou moins attentatoires à la dignité humaine.

Sa légalisation ouvrirait la voie à d’autres remises en cause : en donnant pouvoir à autrui sur la grossesse d’une femme, elle pourrait menacer le droit à l’avortement ; en reconnaissant le droit par contrat d’aliéner son corps à autrui, elle faciliterait l’émergence d’un cadre légal que ne manqueraient pas d’utiliser les promoteurs de la prostitution. »

 

La conclusion est donc nette : « Les mères porteuses, loin d’être un progrès, sont une cause régressive et un mauvais combat pour la gauche, la plus récente et peut-être la plus choquante des extensions du domaine contemporain de l’aliénation.»

 

Ici, comme souvent, affirmation vaut argumentation !

 

Un débat de société

 

Ce débat est finalement plus important que celui qui opposerait les réalistes (Valls, Hollande) au gauchisant Hamon : chacun sait que si la gauche revenait au pouvoir, il faudrait hiérarchiser les mesures à prendre pour une égalité réelle, en fonction des urgences et des moyens.

 

A priori, la thèse du refus adossée à des principes qui se veulent intangibles est beaucoup plus solide que celle, reprise par les rapporteurs du PS – Najat Vallaud-Belkacem et Bertrand Monthubert – qui, estimant que « la gestation pour autrui peut constituer un véritable don »,  préconisent une pratique très encadrée.

 

Mais les contempteurs de cette légalisation des mères porteuses (légalisation porteuse, elle, selon ces adversaires, de valeurs réactionnaires et ultralibérales) mettent aussi en cause une proposition de loi, déposée par des sénateurs socialistes, dont Michèle André et Robert Badinter (qu’on ne soupçonnerait pas de défendre de telles valeurs), tendant à légaliser et encadrer la gestation pour autrui.

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commentaires

B
<br /> Plus en odeur de sainteté le Rocard ?<br /> <br /> <br />
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