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16 septembre 2014 2 16 /09 /septembre /2014 21:10
Lettre ouverte aux ‘frondeurs’

A noter, un courriel de Mme M.-N Lienemann, sénatrice, en réponse à cette lettre, en annexe.

 

Chers camarades (pour autant que vous considériez un vieux rocardien, comme tel),

 

Je ne vous ferai pas le coup du vieil adhérent de 1973 qui, question attente et déceptions, aura vécu 1973 justement, 1974 ensuite puis 1978, mais qui, avec combien d’autres, a continué à y croire. Cependant, permettez-moi de vous rappeler, à ceux d’entre vous à qui ça évoque quelque chose, qu’aux législatives de 1981, comme on disait, on aurait présenté une chèvre avec une rose en travers du museau, elle était élue !

Autrement dit, la vague rose était portée par l’élection présidentielle et non par les magnifiques talents des futurs parlementaires.

J’entends bien. Vous avez été élus sur des idées, un programme, dont vous vous sentez redevables devant vos électeurs.

Mais, vous le savez bien, soit vous avez été élus sur de vieilles terres socialistes, quasi inexpugnables (et là, sans tenir compte de ce qui adviendra des autres députés socialistes, vous pouvez jouer les frondeurs jusqu’au bout) ; soit vous avez été les élus de la majorité présidentielle, de la vaguelette rose de 2012, et quoi que vous chantiez, vous serez balayés comme les autres en cas d’élections anticipées.

 

Je ne suis pas tout-à-fait persuadé que François Hollande ait su donner, comme on dit, un cap. Je regrette que, sur des sujets de société comme le vote des étrangers non communautaires (moyennant bien sûr des conditions de présence sur le territoire) aux élections municipales, il en soit resté à des promesses. Si vous me poussez, je dirais presque que je regrette qu’il n’ait pas eu l’audace, d’entrée, de mener la réforme fiscale que préconisait Piketty. On pourrait multiplier les exemples de déceptions (droit de mourir dans la dignité, dépénalisation du cannabis, PMA et adoption pour les couples lesbiens, voire GPA, etc.).

Donc, vous le voyez, même si mes sujets de mécontentements ne sont pas obligatoirement les vôtres, je ne suis pas un parfait godillot.

 

Sauf que, dans ma modeste expression publique, je cible la droite et surtout l’extrême-droite. Et si je dis tout le mal que je pense de Mélenchon, c’est justement parce que lui oublie quel est l’adversaire dans une version, à peine modernisée, de bonnet et blanc bonnet.

Sauf que mes états d’âme n’entraîneront aucune crise.

 

Imaginez, ce n’est pas dur et c’est ce à quoi vous pousse justement Mélenchon, que dans le vote du budget, vous mettiez le gouvernement en minorité absolue ! Dissolution presque obligatoire. Combien de députés de gauche dans la future assemblée ? Un tsunami de droite et d’extrême-droite garanti. Et une gauche, toutes nuances et divergences confondues noyées pour des lustres !

 

Laissons du temps au temps ! Bien qu’il y en ait peu. Soit la politique lancée – et surtout la conjoncture économique  internationale – permet d’inverser enfin la courbe du chômage, et l’échéance 2017 ne sera pas une catastrophe. Soit…. Mais on n’est pas obligé de forcer les étapes.

 

Reste un dernier petit point : dans ma conception de la vie syndicale et politique, si, après libres débats, votes non truqués, on est minoritaire, on se plie à la décision majoritaire. Conception, je le confesse totalement archaïque !

 

Vox clamentis in deserto ! et qui n’aura, sans doute pas d’écho.

 

Socialistement vôtre,

 

J.F. Launay

Les 'frondeurs' à la fête de l'Huma

Courriel de M.-N. LIENEMANN Mercredi 17/09/2014

Cher camarade, plusieurs remarques rapides. Les temps changent et hélas notre parti vote de moins en moins. Quand a-t-on voté l’alignement a la politique de l'offre? Le renoncement à la modification du tscg* (programme PS et F hollande), l'allongement cotisations pour les retraites, l'alignement à la vision de Schröder alors qu'on a tjrs dit l'inverse. Et même nous n'avons pas élu notre premier secrétaire désigné par l’Elysée. La perspective d'un congrès est repoussée sans cesse. Qui ne respecte pas les votes? Et quels votes ne sont pas respectés? Ensuite depuis 1973 les dégâts de la 5eme république se sont accrus avec l'inversion du calendrier et le quinquennat... Car si une chèvre étiquetée PS pouvait être élue en 1981ce ne fut pas le cas en 86 d'où la cohabitation ni en 1989 ou le PS ne fut pas majoritaire seul! Malgré tout les parlementaires ne procédaient pas du seul président. Mais les dérives s'aggravent et la neutralisation du Parlement par l'alignement caporalise au président est un grave danger. Redonner au Parlement son rôle central et aux forces politiques, aux représentants du peuple un vrai pouvoir face à l'homme providentiel est essentiel pour notre démocratie menacée pas un décrochage massif avec la société et le peuple. Toi qui fus rocardien, tu dois mesurer ce décalage croissant entre les appareils et les citoyens. Et ça vient de loin. Comment concevoir un parti qui hier a voté en interne oui au projet de constitution européenne quand une très grande majorité de ses électeurs et même sympathisants proches voir adhérents votent non au moment décisif. Et à force de se répéter, cette situation nous a coupé des ouvriers, maintenant des employés, désormais des jeunes et d'une large partie des fonctionnaires. Il reste les csp+ ! Ne t étonne pas de l’abandon de la réforme fiscale! Évidemment le combat contre la droite est important mais en politique surtout au pouvoir les actes comptent plus que les paroles. Combattre la droite ce n'est pas jeter des invectives contre ses leaders c'est refuser sa logique, la triangulation qui nous fait perdre notre amé et mener une toute autre politique. Voilà l’enjeu. Aucun appel à la discipline ne peut régler ces problèmes politiques que l'exécutif veut éluder quand il ne veut pas nous faire abandonner des convictions qui fondent l'idéal socialiste. On comprend qu'il veuille abandonner le nom! Hier mon programme n'est pas socialiste** nous a fait beaucoup de mal... Aujourd’hui il faudrait que notre parti ne le soit plus... Attention aux dégâts!

Amitié

Marie Noëlle Lienemann

 

*  Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dit aussi Pacte budgétaire européen ou Pacte de responsabilité

** Extrait d’une déclaration de Jospin en 2002, en tant que candidat à la présidentielle, expression malhabile certes, mais la défaite catastrophique de l’ex-premier ministre est sans doute plus due aux candidatures Taubira (qu’il avait laissé faire) et Chevènement.

Lettre ouverte aux ‘frondeurs’

A noter que Mme Lienemann fut, entre autres,  ministre déléguée au Logement et au Cadre de vie dans le gouvernement de Pierre Bérégovoy, secrétaire d’État au Logement dans le gouvernement de Lionel Jospin. Elle s’y est accommodée d’une politique de reprivatisation des entreprises nationalisées, contraire aux dogmes du Congrès de Metz qui avait scellé la défaite de la 2e gauche à laquelle elle et moi, à l’époque, appartenions. Reprivatisations dont je n’ai pas un net souvenir qu’elles aient été promues par un quelconque congrès socialiste.

Autrement dit, en 1982-83, le choix de la politique prônée par Delors, plutôt que celle de Chevènement, Poperen ou Joxe, n’a pas été le fruit d’une décision du PS, mais de celles de Mitterrand et Mauroy aux manettes. Le congrès de Valence, qui avait précédé, était dans l’exultation d’une victoire tant attendue, pas dans l'optique d'un virage. Beregovoy a amorcé un nouveau virage que les contempteurs habituels ou nouveaux du PS qualifient de libéral. Les mêmes accusent Jospin d’avoir été plus privatisateur que les gouvernements Balladur et Juppé.

 

Donc, quand, au pouvoir, il faut se colleter avec la dure réalité des choses, promesses et programmes peuvent subir de nets infléchissements.

 

Mme la sénatrice ne craint pas le paradoxe quand d’une part elle déplore que le PS soit hors course et d'autre part elle rappelle le vote des instances du PS en faveur du oui qui s’est soldé par la victoire du non au referendum sur la constitution européenne. Je ne dirais pas que cette victoire est en partie due à la pusillanimité du 1er secrétaire de l’époque – je reste néanmoins persuadé que, s’il avait constaté d’emblée que Dolez et Mélenchon s’étaient mis en dehors du parti, le camarade Fabius ne se serait pas livré à je ne sais quelle subtile manœuvre en appelant au non donnant du poids à ceux qui, à l’époque, n’en avaient guère – pour ne pas tomber sous l’accusation de vouloir refaire l’histoire. Mais sa conception est bien que les décisions de son parti ne l’engagent que si elles sont conformes à ce qu'elle prône.

 

Ma lettre ne portait pas, d’ailleurs, là-dessus.

Mélenchon a cruellement ironisé sur ces frondeurs à la mie de pain, à la fête de l’Huma. Son but est bien la complète déroute du PS et le plus tôt possible. Il escompte rebâtir une vraie gauche sur les ruines de la sociale démocratie. On peut croire à cette chimère. Mais si on n’a pas le goût du suicide, il faut cesser de jouer aux rebelles d’opérette !

Au Sénat, ce n’est pas grave, mais à l’Assemblée Nationale à jouer à voir jusqu’où on peut aller trop loin, ça peut aboutir à une dissolution. La gauche de gouvernement serait balayée. Et la gauche tribunicienne aussi !

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23 février 2014 7 23 /02 /février /2014 17:08
Si le mariage gay vous débecte, rien ne vous oblige à épouser un gay !

Il ne faut pas dire que la votation suisse est xénophobe ; que les électeurs F-Haine le sont aussi ; et que ceux qui s’opposent au mariage pour tous sont bornés. Ceux-là même qui ironisent sur la bienpensance doivent être traités avec indulgence. Variante peut-être de l’appel de Jésus « Pardonne-leur mon père car ils ne savent pas ce qu’ils font » ? En témoigne cet « entre nous » de G. Malaurie, empreint de bénévolence.

Nouvel Obs 20-02-14

Nouvel Obs 20-02-14

Votre « entre nous », « conflit de famille », fait preuve d’une indulgence envers les contempteurs du mariage pour tous qui, de mon point de vue bien sûr, frise la complaisance. « Sachons reconnaître à ceux qui (…) hésitent et s’interrogent le droit d’avancer à leur rythme… ». Et pour appuyer votre propos vous nous citez un lecteur « militant CGT » qui était en 1968 contre « le droit à l’avortement ».

 

Faut-il rappeler qu’en 1956, Jeannette Vermeersch, épouse de Maurice Thorez, vice-présidente de l'Union des femmes françaises (PCF), prenait parti contre le "contrôle des naissances" : "Le « Birth control », la maternité volontaire, est un leurre pour les masses populaires, mais c'est une arme entre les mains de la bourgeoisie contre les lois sociales". Et, anticipant sur Jean Foyer, se battant contre la Loi Neuwirth, pour ne pas donner aux pauvres les vices des riches, elle ajoutait : « Depuis quand les femmes travailleuses réclameraient le droit d’accéder aux vices de la bourgeoisie ? Jamais ».

 

Donc, si vous vouliez dire que le conservatisme moral n’est pas l’apanage des cathos-tradis, pas plus que les références à de prétendus modèles anthropologiques (c’est fou de voir des prélats jouer aux experts en anthropologie), soit !

 

"Avancer à son rythme"

 

Mais s’agissant pour chacun, comme vous dites, d’avancer à son rythme, en quoi, un nouveau droit ouvert les en empêche ? Que je sache, aucun couple marié, catholique ou pas, n’est obligé de divorcer. Que je sache, aucune femme n’est obligée d’utiliser un contraceptif chimique ? Que je sache et a fortiori, aucune n’est obligée d’avoir recours à l’IVG ? Votre militant CGT-PSU, inquiet devant la « libération sexuelle » n’était pas obligé d’en user. Et même, tenez-vous bien, les couples homosexuels ne sont pas forcés de se marier !

 

Autrement dit, des lois ont permis successivement le divorce dit « par consentement mutuel », la contraception, l’IVG, le mariage pour tous et, à chaque fois, l’église catholique s’y est fermement, pour ne pas dire plus, opposée. Cherchant donc à imposer à l’ensemble de la société ses propres préceptes qui ne sont pas anthropologiques mais théologiques.

 

Au lieu de s’attendrir sur les braves gens qui piétinent devant des évolutions, il faut leur dire et redire qu’elles ne touchent pas à leur libre arbitre, à leurs intimes convictions. Catholiques, musulmans, juifs, etc. fervents, suivez les règles de vos religions, tant qu’il vous plaira. Si pour vous la capote est à l’index ne l’enfilez pas (et, cela va de soi, évitez les conduites à risques). Mais n’imposez pas vos dogmes et vos interdits à ceux qui ne partagent pas votre foi.

 

 

Pour compléter : La cerise sur le catho

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13 février 2014 4 13 /02 /février /2014 19:18
NON AU MUNICH IDEOLOGIQUE

« L’adjectif qualificatif, épithète ou attribut, s’accorde en genre et en nombre avec le nom ou le pronom qu’il qualifie ». Cette règle est, on le conçoit, doublement inacceptable. D’abord et avant tout avec ce genre qui a le fumet peu ragoûtant d’une théorie honnie. Mais même avec ce nombre qui implique le pluriel, c’est-à-dire ce pluriculturalisme cher aux bobos soixante-huitards attardés et aux naufrageurs de notre identité nationale, cibles du grand philosophe Finkielkraut.  Il faut donc souhaiter qu’au plus vite, sous le souffle invincible du Printemps Français, avec la bénédiction de nos chers Prélats, l’Académie Française décrète que l’adjectif qualificatif est désormais invariable, ancré solidement dans l’humus fertile de notre refus inoxydable et insubmersible du genre et des dérives du relativisme multiculturaliste qui sapent les fondements même de notre République dans son unicité. Halte au communautarisme grammatical !

Un peu caricatural ? A peine !

Le mot genre est devenu quasi tabou. Ainsi un ouvrage intitulé «  Déjouer le genre : pratiques éducatives au collège et au lycée  », aux éditions SCEREN-CNDP, a été retiré de la diffusion et de la distribution. Il était sorti le 4 septembre 2013, après avoir été validé à plusieurs reprises par les commissions ad hoc du CNDP. Sa diffusion avait fait l’objet d’un avis très favorable avant l’été, avec demande à l’auteur de mettre en chantier un deuxième ouvrage portant sur le primaire.  Mais, le 14 septembre, le patron du CNDP bloque le bouquin, au prétexte que le mot « genre » dans le titre, ainsi que la 4e de couverture, risque d’alimenter la polémique sur l’ABCD de l’égalité. Un bel exemple de terrorisme verbal réussi avec en corollaire un bel exemple de lâcheté institutionnelle.

 

N’accablons pas le pauvre Directeur général du CNDP, M. Merriaux (d’autant que la Cour des comptes est d’une grande sévérité envers son organisme) car dans le même temps on modifie un intitulé de conférence et une mission sur égalité et genre devient égalité fille/garçons. Le mot « genre » est à proscrire !

Peillon, après être resté sur la défensive, semble se rendre compte du danger : « Quand on interdit les mots, on interdit les pensées. On a connu cela à d’autres époques. L’épuration de la langue est le premier acte. Après on fait la chasse aux livres. Puis la guerre aux professeurs et aux valeurs républicaines. » (Libération 12/02/14)

 

Il était temps de dire Non à un Munich éducatif !

La police des mots

 

La police des mots fait également disparaître embryon et fœtus. A peine la petite graine du papa a-t-elle réussi à féconder le bel ovule dans les entrailles de la maman, qu’il est né le divin enfant. Entonnons le cantique, non plus le 25 décembre mais le 25 mars, quand le saint-esprit est venu cocufier Joseph. Aussi l’IVG revient à assassiner le petit enfant dans le ventre de l’indigne maman. CQFD !

 

D’autres mots sont diabolisés. On l’a vu de l’innocente théorie qui, associée au satanique genre, ne prend qu’un sens péjoratif d’ensemble de spéculations, d'idées gratuites présentées de manière plus ou moins scientifique, alors que ce mot désigne un ensemble de lois formant un système cohérent et servant de base à une science, ou rendant compte de certains faits. Le doux mot d’euthanasie, sous la plume des Hutin, devient quasi synonyme d’éradication des vieillards. Le droit à une mort digne et sereine serait une menace pour les plus vulnérables.

 

Mais, avec les mots bannis ou déformés, c’est le débat qui est enterré. Les nouvelles chaisières de la manif anti mariage pour tous – Ludivine de la Rochère et Béatrice Bourges – ont à peine fini de vitupérer, que l’on enterre une timide loi sur la famille. Loi où il n’était pas question de PMA et encore moins de GPA. Gageons que la refonte de la Loi Léonetti sera aussi repoussée aux fameuses calendes grecques. Et pendant ce temps-là, en toute impunité, ressurgissent des slogans des années 30. Parfois avec la complicité quasi goguenarde d’esprits supérieurs.

Il serait plus que temps que, comme Peillon, tous les ministres, le PS, la gauche républicaine, prennent conscience que les reculades ne font que renforcer les tenants de l’obscurantisme et de l’intégrisme. Sinon, le Munich idéologique qui se dessine risque d’aboutir à un néo-Pétainisme*.

 

* « Le pétainisme continue d'imprégner les discours, à travers cette façon indigne de parler des étrangers comme d'une menace, cette nostalgie de la France des clochers, cette exaltation du travail comme rédempteur, cette peur des pulsions, ce pistage des dangers, ce mépris des intellectuels, cette haine des fonctionnaires… » G. Miller

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15 juin 2013 6 15 /06 /juin /2013 20:51
“Le cléricalisme ? voilà l’ennemi ! ”

Le pape François, dont il ne faut pas évoquer la passivité (au mieux) ou la complicité (au pire) du temps de Videla et consorts, se révèlerait-il comme la réincarnation de Pie X* ? L’aggiornamento de Vatican 2, n’aura-t-il été, en fait, qu’un bref coin de ciel bleu ? La prétention de la hiérarchie catholique à faire passer ses dogmes pour lois générales le fait craindre. Les ténèbres du cléricalisme plombent à nouveau le ciel catholique. Mais, devenus Gramsciens, les prélats sont en train de gagner la bataille de l’hégémonie culturelle.

 

Pas de malentendu : qu’une religion demande à ses fidèles de se conformer à des règles et interdits, n’intéresse qu’elle et ses adeptes. Sous réserve toutefois que ses préceptes ne soient pas contraires à la loi et que leur observation ne se fasse pas par la contrainte. Ce que réclament de courageux laïques, au Maroc et en Algérie notamment, luttant contre l’obligation de fait du jeûne du ramadan.

Que les catholiques considèrent leur sacrement du mariage comme indissoluble, refusent l’utilisation de moyens contraceptifs et a fortiori de l’IVG, etc. ne concerne qu’eux. Mais ces choix qu’ils font, ils n’ont pas à les imposer aux autres.

Le cléricalisme, c’est justement cela : cette intrusion constante du clergé dans le domaine temporel et plus spécialement dans le domaine politique. Cette volonté de tenter de bloquer toute réforme sociétale que les prélats et leurs sbires jugent non conforme à leur charia, à leurs dogmes. Cette obstination à vouloir « subordonner la société civile à la société religieuse, à vouloir étendre à la société politique les règles et méthodes de cette Église, à utiliser des armes spirituelles à des fins temporelles, à se servir du pouvoir politique pour imposer sa vision morale, individuelle ou collective » (Marc Ferro)

Le pape et des parlementaires français

Le pape et des parlementaires français

L’audience accordée par le pape François à 45 parlementaires français est en quelque sorte la revendication affirmée de cette intrusion. Après un propos, que je n’ose qualifier de papelard, sur la laïcité il déclare : « L’Église désire ainsi apporter sa contribution spécifique sur des questions profondes qui engagent une vision plus complète de la personne et de son destin, de la société et de son destin. Cette contribution ne se situe pas uniquement dans le domaine anthropologique ou sociétal, mais aussi dans les domaines politique, économique et culturel. » « Votre tâche est certes technique et juridique, consistant à proposer des lois, à les amender ou même à les abroger. Il vous est aussi nécessaire de leur insuffler un supplément, un esprit, une âme dirais-je, qui ne reflète pas uniquement les modes et les idées du moment, mais qui leur apporte l’indispensable qualité qui élève et anoblit la personne humaine. »

"Monseigneur" Batut

"Monseigneur" Batut

Oh, qu’en termes choisis, ces choses-là sont dites. Mais parler de contribution s’agissant de prises de positions intransigeantes du style « l'adoption du projet de loi serait un grave recul anthropologique »,  en prétendant être le mieux à même d’«éclairer les consciences, dissiper les confusions, et formuler le plus clairement les enjeux », comme l’a fait l’épiscopat français, est, peut-être, un peu jésuitique.

 

Lecture symptomale d’un satanique athée ? Lisez donc un Monseigneur Batut, épinglé il y a peu par Le Canard Enchaîné : « Que faire maintenant que la loi est votée et entérinée par le Conseil constitutionnel ? (…) Nous souvenir d’abord, comme le rappelait Jean-Paul II dans son encyclique sur l’évangile de la vie, qu’"une loi injuste n’est pas une loi". Il n’y a pas plus injuste que la loi qui vient de détruire le mariage : ce n’est donc pas une loi, et ses dispositions n’obligeront jamais personne… ». Il est vrai que ce personnage est l’adjoint de Barbarin.

Parlementaires français offrant leur cadeau au pape

Parlementaires français offrant leur cadeau au pape

Nous sommes donc loin de l’innocente contribution du saint-père. Mais, cette brutale et insupportable intrusion des prélats sur le mariage pour tous – aidée, il est vrai, par les cyniques de l’UMP - a réussi à repousser tout débat démocratique serein sur la PMA et la GPA.

En ce sens le vote de la loi sur le mariage de personnes de même sexe est une victoire à la Pyrrhus. Le droit de mourir dans la dignité va être, si l’on peut dire, enterré. L’offensive anti IVG est relancée avec la prétention cléricale de décider que l’embryon est un être humain. Avec à nouveau la complicité cynique de Copé et sa clique, une proposition de loi des radicaux de gauche, fort prudente, sur l’utilisation pour la recherche scientifique des embryons in vitro a été bloquée. Les études de genre sont encore et toujours dans le collimateur de M. Vingt-Trois. Et même Peillon se fait prendre aux arguties mensongères du prélat.

Antonio Gramsci

Antonio Gramsci

Il serait peut-être temps que les vrais laïques se réveillent. Certes, baby loup… certes, le fichu dit voile islamique à interdire urbi et orbi… mais, pendant ce temps-là les intégristes de nos fameuses racines ont lu Gramsci et sont en train, si nous continuons de nous battre sur les terrains vagues d’une prétendue menace islamiste**, de gagner la bataille de l’hégémonie culturelle.

 

* Pape qui condamna la Loi de 1905 dans l'encyclique Gravissimo Officii Munere (10 août), que Mgr Louis Duchesne baptise malicieusement « Digitus in oculo » (« doigt dans l'œil »). Le pape y affirme alors que la « loi [...], en brisant violemment les liens séculaires par lesquels [la] nation [française] était unie au siège apostolique, crée à l'Église catholique, en France, une situation indigne d'elle et lamentable à jamais » (Wikipedia). Alors que la loi de séparation entre l’Eglise et l’Etat, grâce à l’entregent et à la clairvoyance d’Aristide Briand, n’avait rien d’un couperet anticlérical mais constituait un bon équilibre, dont se félicitent aujourd’hui in petto les évêques.

 

** Entendons bien, il ne s’agit pas de nier les menaces terroristes, style Merah, mais d’affirmer que l’équation musulman=islamiste=terroriste est xénophobe.

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19 avril 2013 5 19 /04 /avril /2013 17:49
La députée, cheville ouvrière de la loi sur le mariage homo en Nouvelle Zélande, regarde les tribunes où les spectateurs ont entonné un chant Maori.

La députée, cheville ouvrière de la loi sur le mariage homo en Nouvelle Zélande, regarde les tribunes où les spectateurs ont entonné un chant Maori.

Travail de Sisyphe : il faut inlassablement répondre aux contre-vérités que martèlent les contempteurs d’une réforme qui ouvre des droits à certains sans en priver les autres. Car leurs mensonges répétés finiraient pas passer pour vérités.

 

Dans un pays où le précédent président adorait tellement l’institution du mariage qu’il en a déjà usé trois fois (en ajoutant demi-frère puis demi-sœur à ses deux aînés) et où son successeur a eu quatre enfants sans se marier, essayer de faire croire que mariage à l’ancienne papa, maman, la bonne et moiet procréation sont liés relève de l’imposture.

 

Les pseudos découpages, plus infantiles qu’enfantins, qui ornent les T-shirts roses des anti-mariage pour tous – censés représenter un couple marié à vie et leurs deux enfants – ne symbolisent qu’une fraction de la réalité. Plus de la moitié des naissances ont lieu hors mariage. Pour deux mariages (ou-remariages) il y a un divorce. Près d’un enfant sur cinq vit dans un foyer dit monoparental. La bigamie de fait – illustrée aussi par un président de la République – si elle reste marginale, existe et pas que chez les vilains barbus de la banlieue nantaise.

 

Prétendre que la réforme qui va être votée dénature le mariage relève aussi de l’imposture. Le mariage catholique – prétendument inspiré par Jésus, donc non pas naturel mais divin – n’est instauré qu’au début du XIIIe siècle. Les voies du seigneur sont non seulement impénétrables, mais lentes : l’inspiration divine a mis du temps à souffler sur les esprits des prélats réunis en concile à Latran, 4e en ce lieu. Sa vocation à la “génération” des enfants a été précocement contournée en France, dès le XVIIIe siècle où la natalité baisse beaucoup plus vite que dans les pays voisins. Nos aïeux sautaient du train en marche, avant l’invention du chemin de fer !

 

Quant au mariage civil – le seul en débat – il n’a rien de naturel : c’est une institution qui a évolué. L’histoire du divorce en témoigne : en 1792, à sa fondation en France, il peut se faire par consentement mutuel ; il faudra attendre 1975 pour voir réapparaître ce consentement ; entre temps il sera limité au divorce pour faute, interdit même à la Restauration, rétabli en 1884…  Faut-il rappeler que, sauf évidemment avec la loi Bonald qu’elle a inspirée en 1816, l’église s’est toujours opposée à la législation sur le divorce civil ?

 

Le mariage civil étendu aux couples homosexuels ne changera rien pour les hétérosexuels et rien aux mariages religieux. Pas plus que les lois sur l’égalité homme-femme n’ont obligé l’église catholique à accepter d’ouvrir la prêtrise aux femmes, la réforme du mariage civil n’obligera l’église à bénir l’union de deux femmes ou de deux hommes. L’instauration du divorce n’oblige personne à rompre les liens conjugaux. Comme aujourd’hui, les hétéros procréeront ou pas, mariés ou pas, auront recours à la PMA si besoin est et s’ils le jugent conforme à leurs convictions. Leurs droits actuels sont complètement respectés. Ils pourraient même être élargis si l’on traite avec sérieux les problèmes de co-parentalité qui ne concernent pas que les couples de lesbiennes, mais les nombreuses familles recomposées.

Adoption de la loi sur le mariage pour tous en Nouvelle Zélande

A voir l’image du Parlement Néo-zélandais et celle lamentable qu’ont offerte quelques députés UMP dans notre assemblée, on se dit que s’il y a encore des voix républicaines au Centre et à droite il est temps qu’elles se fassent entendre, au lieu de laisser les cyniques continuer à jeter de l’huile sur le feu.

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26 novembre 2010 5 26 /11 /novembre /2010 16:04

clairobscur

Qu’un Valls ou un Hollande mettent en cause un document élaboré par Hamon, et la presse de titrer sur les divisions du PS. Mais qu’un Rocard et un Jospin taillent en pièces un travail sur un sujet ô combien passionnel, la gestation par autrui (GPA), autrement dit « les mères porteuses » ne provoque aucun écho. La bioéthique ça ne buzze pas. Et pourtant le scénario a tout pour plaire : de vieux éléphants gardiens des valeurs face à des personnalités du monde bioéthique ayant produit un rapport qui a inspiré celui du PS sur ce thème. En caricaturant : dogmatisme vs pragmatisme.

 

En France, actuellement, la situation est claire : l'article 16-7 du Code civil dispose que  « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est nulle ». Sauf que, les gestations par autrui qui ont donné lieu à un acte de naissance aux Etats-Unis sont parfois reconnus par l’état-civil conformément d'ailleurs au même code civil.

contrejour

Le rapport de Terra Nova, controversé jusque dans ses rangs, inscrit sa démarche dans un « droit à la parentalité ». Il prend en compte toutes les techniques d’assistance médicale à la procréation (AMP) ainsi que l’accès à la parenté des couples homosexuels, les dons de gamètes anonymes ou pas… Il montre aussi que la frontière entre filiation charnelle et filiation adoptive est caduque avec l’AMP.

 

Mais la piste la plus sujette à controverse était celle qui proposait la reconnaissance – limitée et encadrée – de la gestation par autrui (GPA). Autrement dit des « mères porteuses ». Mères porteuses qui acceptent donc de recevoir, s’agissant de couples hétérosexuels, l’embryon fruit de la fécondation in vitro des gamètes des futurs parents.

 

epanouie

Les auteurs du rapport avait pleine conscience du caractère audacieux de la proposition : « Les réticences collectives autour de la GPA sont intenses. Elles dénoncent une technique de confort pour 'career women' qui n’ont plus de temps à consacrer à la grossesse, ou pour stars qui veulent garder le ventre plat. Une commercialisation du corps humain, un nouvel asservissement des pauvres qui louent leur ventre pour l’enfantement des enfants des riches. Une aliénation du corps de la femme, dont l’utérus est instrumentalisé et ravalé au rang de couveuse. La négation de la grossesse et du lien fondamental créé entre la femme et l’enfant à naître qu’elle porte. Enfin, au plan moral, la violation de l’ordre naturel et la manipulation de la vie. Les dérives constatées aux Etats-Unis montrent que ces réticences sont légitimes. »

 

Mais la proposition était très cadrée : insuffisance utérine de la mère d’intention, interdiction bien sûr de la commercialisation, sécurisation de la mère porteuse. « Ces femmes peuvent être heureuses de leur grossesse : elles aident des couples en détresse, souvent des amis ou des parents, dont elles sont le dernier espoir, là où la médecine a échoué, et elles en tirent une forte valorisation personnelle. »

 

Un réquisitoire implacable

 

Le contre-rapport est un réquisitoire implacable. Il inscrit sa lutte contre les « mères porteuses » dans un combat multi-séculaire,  « pour la cause des femmes et la défense des acquis progressistes.

 La disparition du servage et l’abolition de la domesticité au XVIIIème siècle, l’abolition définitive de l’esclavage au XIXème siècle, la fin de l’infériorité juridique de la femme au XXème siècle sont autant d’étapes essentielles dans la marche vers le progrès de la société française. L’inaliénabilité de la personne humaine doit être consacrée au XXIème siècle. »

 

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« Partout où elle a été légalisée dans le monde, la pratique des mères porteuses se traduit concrètement par une nouvelle exploitation, radicale, au sens où il s’agit de la prise de contrôle sur la vie d’une femme pendant neuf mois, et généralement d’un rapport inégalitaire et d’aliénation, entre commanditaires aisés et mères porteuses défavorisées souvent recrutées par des sociétés aux pratiques marchandes plus ou moins attentatoires à la dignité humaine.

Sa légalisation ouvrirait la voie à d’autres remises en cause : en donnant pouvoir à autrui sur la grossesse d’une femme, elle pourrait menacer le droit à l’avortement ; en reconnaissant le droit par contrat d’aliéner son corps à autrui, elle faciliterait l’émergence d’un cadre légal que ne manqueraient pas d’utiliser les promoteurs de la prostitution. »

 

La conclusion est donc nette : « Les mères porteuses, loin d’être un progrès, sont une cause régressive et un mauvais combat pour la gauche, la plus récente et peut-être la plus choquante des extensions du domaine contemporain de l’aliénation.»

 

Ici, comme souvent, affirmation vaut argumentation !

 

Un débat de société

 

Ce débat est finalement plus important que celui qui opposerait les réalistes (Valls, Hollande) au gauchisant Hamon : chacun sait que si la gauche revenait au pouvoir, il faudrait hiérarchiser les mesures à prendre pour une égalité réelle, en fonction des urgences et des moyens.

 

A priori, la thèse du refus adossée à des principes qui se veulent intangibles est beaucoup plus solide que celle, reprise par les rapporteurs du PS – Najat Vallaud-Belkacem et Bertrand Monthubert – qui, estimant que « la gestation pour autrui peut constituer un véritable don »,  préconisent une pratique très encadrée.

 

Mais les contempteurs de cette légalisation des mères porteuses (légalisation porteuse, elle, selon ces adversaires, de valeurs réactionnaires et ultralibérales) mettent aussi en cause une proposition de loi, déposée par des sénateurs socialistes, dont Michèle André et Robert Badinter (qu’on ne soupçonnerait pas de défendre de telles valeurs), tendant à légaliser et encadrer la gestation pour autrui.

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