La députée, cheville ouvrière de la loi sur le mariage homo en Nouvelle Zélande, regarde les tribunes où les spectateurs ont entonné un chant Maori.
Travail de Sisyphe : il faut inlassablement répondre aux contre-vérités que martèlent les contempteurs d’une réforme qui ouvre des droits à certains sans en priver les autres. Car leurs mensonges répétés finiraient pas passer pour vérités.
Dans un pays où le précédent président adorait tellement l’institution du mariage qu’il en a déjà usé trois fois (en ajoutant demi-frère puis demi-sœur à ses deux aînés) et où son successeur a eu quatre enfants sans se marier, essayer de faire croire que mariage à l’ancienne – papa, maman, la bonne et moi – et procréation sont liés relève de l’imposture.
Les pseudos découpages, plus infantiles qu’enfantins, qui ornent les T-shirts roses des anti-mariage pour tous – censés représenter un couple marié à vie et leurs deux enfants – ne symbolisent qu’une fraction de la réalité. Plus de la moitié des naissances ont lieu hors mariage. Pour deux mariages (ou-remariages) il y a un divorce. Près d’un enfant sur cinq vit dans un foyer dit monoparental. La bigamie de fait – illustrée aussi par un président de la République – si elle reste marginale, existe et pas que chez les vilains barbus de la banlieue nantaise.
Prétendre que la réforme qui va être votée dénature le mariage relève aussi de l’imposture. Le mariage catholique – prétendument inspiré par Jésus, donc non pas naturel mais divin – n’est instauré qu’au début du XIIIe siècle. Les voies du seigneur sont non seulement impénétrables, mais lentes : l’inspiration divine a mis du temps à souffler sur les esprits des prélats réunis en concile à Latran, 4e en ce lieu. Sa vocation à la “génération” des enfants a été précocement contournée en France, dès le XVIIIe siècle où la natalité baisse beaucoup plus vite que dans les pays voisins. Nos aïeux sautaient du train en marche, avant l’invention du chemin de fer !
Quant au mariage civil – le seul en débat – il n’a rien de naturel : c’est une institution qui a évolué. L’histoire du divorce en témoigne : en 1792, à sa fondation en France, il peut se faire par consentement mutuel ; il faudra attendre 1975 pour voir réapparaître ce consentement ; entre temps il sera limité au divorce pour faute, interdit même à la Restauration, rétabli en 1884… Faut-il rappeler que, sauf évidemment avec la loi Bonald qu’elle a inspirée en 1816, l’église s’est toujours opposée à la législation sur le divorce civil ?
Le mariage civil étendu aux couples homosexuels ne changera rien pour les hétérosexuels et rien aux mariages religieux. Pas plus que les lois sur l’égalité homme-femme n’ont obligé l’église catholique à accepter d’ouvrir la prêtrise aux femmes, la réforme du mariage civil n’obligera l’église à bénir l’union de deux femmes ou de deux hommes. L’instauration du divorce n’oblige personne à rompre les liens conjugaux. Comme aujourd’hui, les hétéros procréeront ou pas, mariés ou pas, auront recours à la PMA si besoin est et s’ils le jugent conforme à leurs convictions. Leurs droits actuels sont complètement respectés. Ils pourraient même être élargis si l’on traite avec sérieux les problèmes de co-parentalité qui ne concernent pas que les couples de lesbiennes, mais les nombreuses familles recomposées.
Adoption de la loi sur le mariage pour tous en Nouvelle Zélande
A voir l’image du Parlement Néo-zélandais et celle lamentable qu’ont offerte quelques députés UMP dans notre assemblée, on se dit que s’il y a encore des voix républicaines au Centre et à droite il est temps qu’elles se fassent entendre, au lieu de laisser les cyniques continuer à jeter de l’huile sur le feu.
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