Le nouveau sigle de Canal synthétise la bretonnitude de son patron, Bolloré, et l’orientation ultra-droitière du zélé Zeller qu’il vient de placer à la tête de l’information des chaînes du groupe « canal » et en particulier d’I-Télé. Bolloré, le forban*, s’est emparé de Vivendi à moindre coût ; il prend les rênes de C+ avec un comptable comme homme de main ; et confie l’info à un enfant de chœur à l’ancienne.
Les experts en grandes manœuvres capitalistiques expliqueront comment le propriétaire du yacht « Paloma » et du Falcon 900 qu’il mettait généreusement à disposition de Sarkozy est venu à la tête de Vivendi donc de Canal +. Grand nettoyage d’été sur la chaîne amirale et sa petite sœur I-Télé. Après Belmer, son second, Méheut est viré, remplacé par un homme lige, Jean-Christophe Thiery.
Jeux des chaises musicales sur les émissions en clair où le pauvre de Caunes se retrouve dans un placard, Maïténa Biraben prenant sa place au Grand Journal, mais apparemment avec des moyens squelettiques ; Ali Baddou, lui, la remplace au Supplément, émission dominicale ; il est lui-même suppléé par Daphné Bürki dans La nouvelle édition, émission en clair de la mi-journée ; Ophélie Meunier, ex-membre de cette Nouvelle édition, ira donc prendre sa place sur Le Tube, émission hebdomadaire sur l’actualité des médias…
Pendant ce temps-là sur I-Télé, ça valse : Cécilia Ragueneau, directrice générale et Céline Pigalle, directrice de la rédaction sont virées.
Et donc, à la tête de l’info du groupe on trouve un crapaud de bénitier, Guillaume Zeller. Ce brave garçon, au visage de 1er communiant, est l’ancien directeur de la rédaction de D8 (avant que la chaîne soit vendue… à Canal) et de DirectMatin.fr, le site du journal gratuit de Bolloré.
"Invité régulier de l'antenne d'extrême droite Radio Courtoisie, défenseur du général Aussaresses, et chouchou des cathos tradi'", ainsi le présente Street Press.
Sur Radio-Courtoisie, organe du national catholicisme, où il fut invité sur des thèmes très pieux ou guerriers – Dien Bien Phû, les prêtres dans les camps de concentration, le massacre d’Oran en 1962, la mission des journalistes catholiques,… - il côtoie des personnages hauts en couleurs.
Chez les animateurs, on a le gendre du professeur Lejeune, Jean-Marie Le Méné, qui préside la Fondation Jérôme-Lejeune qu’il a fondée (Lejeune pourfendeur acharné de l’IVG). Il s’adjoint parfois Ludovine de la Rochère, chargée de la communication de sa très pieuse Fondation, après avoir assuré celle de la conférence des évêques de France, qui évincera Frigide Barjot de la Manif anti mariage pour tous !
Rémi Fontaine, lui, anime un libre journal des scouts. Il a entre autres publié, aux éditions Renaissance Catholique, Le Livre noir des évêques de France, Le Livre noir de la culture de mort, Le Livre noir & blanc des évêques de France. Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur le scoutisme.
Ce charmant personnage assène qu’Ecrasée entre l’enclume du laïcisme et le marteau du prosélytisme islamique, la France chrétienne semble condamnée à disparaître. Il prône une culture de dissidence au service du bien commun conjuguée à ce qu’il appelle un sain et légitime communautarisme, par une solidarité chrétienne et nationale, cette vertu et cette attitude éminemment politiques pourraient réveiller l’âme française, sous la bannière de Jeanne d’Arc !
Parmi les invités, on ne s’étonnera pas de compter Aude Dugast, postulatrice de la cause de Jérôme Lejeune à Rome (le cher professeur est en instance de béatification, bien que le saint homme se soit approprié les travaux d’une consœur pour s’attribuer toute la gloire de la découverte du chromosome surnuméraire responsable de la trisomie 21). Un peu dans le même style, Jean-Marie Mupendawatu, secrétaire du Conseil pontifical pour la pastorale de la santé à Rome. Même écurie, Lucie Pacherie, responsable de la bioéthique à la Fondation Jérôme Lejeune (la bioéthique consistant à condamner l’IVG et les recherches embryonnaires).
Passons sur Maître Jacques Trémolet de Villers – aussi de Villers que Giscard est d’Estaing - l’avocat de Touvier, royaliste : il a son rond de serviette à radio-courtoisie ! Dans la même veine royaliste, mais beaucoup moins médiatique, Philippe Aucazou, poète, chroniqueur, dont le site intitulé O Crux ave Spes unica est sur fond de fleurs de lis et dont le 1er article met en vedette Pie X, le pape borné qui a tenté de saboter la mise en œuvre de la loi de 1905.
Mentionnons pour la beauté de son casque, Christian Venard, aumônier parachutiste.
Laurent Wetzel, présenté comme historien pour disserter sur l’histoire-géographie, discipline en péril, centriste extrême, oscillant entre Le Pen et de Villiers (de l’époque MPF), fut Maire de Sartrouvile, où il y a procédé à une débolchévisation du paysage urbain (consistant à débaptiser les rues : Ménard n’a rien inventé) ; son œuvre d’historien est quasi nulle. On trouve aussi Franck Margain, conseiller régional d'Île-de-France, président délégué du Parti Chrétien Démocrate (le micro parti de Christine Boutin).
Mais le personnage le plus haut en couleurs est bien Pierre-Yves Rougeyron, ce président de l'Association des amis d'Eric Zemmour (!) qui est aussi le fondateur d’un Cercle Aristote qui a longtemps tenu ses réunions dans le bar associatif de Serge Elie Ayoub, plus connu sous le nom de Batskin, ancien leader des skinheads néo-nazis, réunions annoncées sur Egalité et Réconciliation, le site d'Alain Soral, il est aussi proche de Riposte Laïque...
Le sémillant nouveau directeur de l’info du groupe canal a aussi donné quelques articles à Boulevard Voltaire de Robert Ménard. Il partage avec le redoutable Maire de Béziers son aversion pour le 19 mars comme date anniversaire de la paix en Algérie.
Mais surtout il confesse son attrait pour le général tortionnaire et fier de l’être, Paul Aussaresses. « Celui qui aurait pu être un héros national (…) est pourtant devenu le repoussoir par excellence. Non sans une certaine complaisance, il aura ainsi beaucoup fait pour se voir accoler l’épithète infamante de tortionnaire », reconnaît-il. Mais pour tout de suite lui trouver des circonstances très atténuantes, dans ce qu’il nomme pudiquement, la mise en œuvre des méthodes les plus brutales de la contre-insurrection : la cruauté des méthodes adverses et le fait de confier à l’armée des tâches policières étrangères à sa vocation. Au passage il mentionne Hélie Denoix de Saint Marc, officier factieux, au moment du putsch avorté des généraux félons*, pour qui Ménard vient de débaptiser la rue du 19 mars 1962, pour lui donner le nom de ce factieux (que Sarkozy, indigne héritier du gaullisme, a osé élever à la dignité de grand-croix de la Légion d'honneur).
Zeller intervient vers la fin de l'émission
Du temps où il dirigeait l’info de D8 (qu’il va donc retrouver), le très pieux jeune homme avait mis sur l’antenne une sainte émission Dieu Merci ! où l’animateur ne manquait pas de l’inviter. Ainsi le retrouve-t-on avec le très homophobe Christian Vanneste, pour entre autre expliquer que « la mission [évangélisatrice de l’église pendant la colonisation] est avant tout un geste d’amour ».
Il est peu probable que les salariés de canal prennent les coups de force de Bolloré pour des gestes d’amour. Ces bolloré-boys, à commencer par Thiery, qui n’est pas du tout la fronde mais le froid exécuteur des désirs de son maître, en continuant par Zeller applaudi par les cathos tradi du Salon Beige, comme par la droite extrême de Valeurs actuelles, sont bien là pour mettre au pas d’abord, puis en ordre de bataille pour Sarkozy, la chaîne cryptée.
Quitte à perdre en cours de route une partie des abonnés.
Quand on aime, ça ne compte pas.
Il a notamment entubé Rocard dans un projet de construction ferroviaire en Afrique : sollicité il feint de considérer ce projet comme non viable pour mieux le reprendre à son compte en squeezant la société Africarail (dont Rocard est président d’honneur). Dans « Sarko m’a tuer », Jacques Dupuydauby conte comment il s’est fait confisquer la concession de Port de Lomé au profit de Bolloré sur intervention de Sarkozy !
** Le moins connu des quatre se nommait André Zeller : coïncidence ?
En complément : Libération
"Le temps des purges n’en finit pas à Canal +. Après Bertrand Meheut (président du directoire), Rodolphe Belmer (directeur général), Thierry Langlois (directeur des antennes), Alice Holzman (patronne de CanalSat), Ara Aprikian (patron de D8, D17 et i-Télé), Cécilia Ragueneau (directrice d’i-Télé), Céline Pigalle (directrice de la rédaction du groupe Canal +), après les auteurs des Guignols et Renaud Le Van Kim, producteur du Grand Journal, c’est au tour de Thierry Thuillier (directeur des sports de Canal +) et de Nathalie Coste-Cerdan (directrice du cinéma) d’être virée de la chaîne. Signe de ce management autoritaire, cette dernière l’a appris au cours d’un rendez-vous avec Vincent Bolloré vendredi, et elle est tombée de sa chaise : il lui avait en effet donné des garanties quelques jours auparavant sur son maintien en poste." Libé
commenter cet article …