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23 juin 2011 4 23 /06 /juin /2011 21:04

« On ne naît pas femme, on le devient » vs « Et dieu créa la femme »

 

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Après l’article sur le cléricalisme de l’église espagnole, un camarade syndiqué m’avait signalé une polémique qui naissait sur les programmes de SVT de 1ère L et ES, avec l’introduction implicite des études du Genre ou gender studies. Un coup de gogol et je tombe sur des sites intégristes déchaînés et sur la dame Boutin qui se fendait d’une « Lettre ouverte à Chatel ». Marginal, ai-je, bien à tort, pensé. Mal m’en a pris, car peu après ce fut, outre les bigotes associations familiales chrétiennes, la Direction de l’enseignement catholique qui partit en croisade. Un peu jésuitiquement, en s’en prenant aux manuels et non frontalement aux programmes.

 

androgyneCdl126pxQue disent-ils de si scandaleux, ces programmes ? Sous le titre « Féminin, masculin », on peut lire :

« L’étude de la sexualité humaine s’appuie sur les acquis du collège. Dans une optique d’éducation à la santé et à la responsabilité, il s’agit de comprendre les composantes biologiques principales de l’état masculin ou féminin, du lien entre la sexualité et la procréation et des relations entre la sexualité et le plaisir. Ces enseignements gagneront à être mis en relation avec d’autres approches interdisciplinaire (philosophie) et/ou intercatégorielles (professionnels de santé). Il s’agit d’aider l’élève à la prise en charge responsable de sa vie sexuelle. »

Mais c’est surtout le sous-titre « Devenir femme ou homme » qui soulève l’ire de la cathosphère.

« On saisira l’occasion d’affirmer que si l’identité sexuelle et les rôles sexuels dans la société avec leurs stéréotypes appartiennent à la sphère publique, l’orientation sexuelle fait partie, elle, de la sphère privée. Cette distinction conduit à porter l’attention sur les phénomènes biologiques concernés. »

 

androgynesContrairement à ce que la cathosphère veut faire croire, les études du Genre ne nient pas les différences biologiques. Elles distinguent le sexe biologique du « sexe social ». Inspirées de penseurs français comme Deleuze, Foucault ou Derrida, les « gender studies » se sont développées aux Etats-Unis. En résumé, elles cherchent à démontrer que c'est l'éducation au sens large, dans le contexte historique et social,  qui construit le «genre» de l'individu.

 

En France les études du Genre sont quasi inexistantes «Les réticences viennent d'une conception étroite de notre universalisme. Car ces débats sur le genre traversent la société française avec la parité en politique ou les débats sur les quotas. Comment expliquer, par exemple, qu'il y ait 80% de filles dans les filières littéraires au lycée ? On nous dit qu'elles ont un esprit littéraire. Qu'est-ce que cela signifie ? », dit Richard Descoings, le directeur de Sciences Po où les questions sur le genre ou sexe social vont faire l'objet d'un enseignement obligatoire.

androgyne Solomon-soul

baiser lesbien Le secrétaire général adjoint de la direction de l’enseignement catholique, Claude Berruer, a donc envoyé une lettre aux chefs d'établissement de l'enseignement catholique par l’intermédiaire des directeurs diocésains pour les alerter sur le chapitre impie «devenir homme ou femme» qui fait «implicitement référence à la théorie du genre, qui privilégie le “genre” considéré comme une pure construction sociale, sur la différence sexuelle[…] L'identité masculine ou féminine, selon cette théorie, n'est donc pas une donnée anthropologique mais une orientation

 

podvin.jpgL’épiscopat sur son site officiel est encore plus explicite :

«Les nouveaux programmes de SVT (Sciences et Vie de la Terre) des Premières ES et L font référence à la « théorie du genre ». Une idéologie qui contredit la conviction chrétienne que l'on naît garçon ou fille. Et que Dieu créa l'homme et la femme l'un pour l'autre, pour qu'ils s'aiment et qu'ils transmettent la vie». « Les responsables de l'Enseignement catholique sont pleinement dans leur mission quand ils interpellent ces contenus, écrit Mgr Bernard Podvin, Porte-parole des évêques de France, dans l'hebdomadaire Famille Chrétienne. Ce qui me préoccupe le plus est que l'on distille, dans les années lycéennes où la pensée ne fait que se forger, un subjectivisme et un relativisme. […] A la lumière de notre vie spirituelle, nous redisons avec Benoît XVI que le masculin et le féminin se révèlent comme faisant ontologiquement partie de la création ».

 

Baiser Gay Mais c’est un prof de philo d’un lycée catho, Thibaud Collin, qui met au jour l’obsession homophobe sous jacente  «La prime à l'indifférenciation sexuelle promeut en fait l'homosexualité. Ces théories sont une tête de pont pour un changement radical de société

 

 

L’association FHEDLES (Femmes et Hommes, Égalité, Droits et Libertés dans les Églises et la Société), qui ne fait pas partie de la cathosphère, car proche de Golias, remet les pendules à l’heure : « Enseigner une anthropologie « naturelle » immuable est une imposture et disqualifier les théories du genre en les faisant passer pour une idéologie de l’indifférenciation est une malhonnêteté. »

 

 

boussole.1262652386.jpg A l’inverse, deux profs de SVT d’un lycée public, Katia Lévy et Matthias Dourdessoule, ont lancé un blog intitulé « L’école déboussolée » qui propose une pétition au Ministre de l’Education nationale où  on peut lire « Profitant de l’ambiguïté de votre circulaire parue au Bulletin officiel du 30 septembre 2010 définissant des programmes qui n’ont été soumis à aucune consultation nationale, ces manuels dénaturent profondément ce cours, en imposant ce qu’il est désormais convenu d’appeler la théorie du « Gender »qui est une théorie philosophique et sociologique et non scientifique. Elle affirme que l’identité sexuelle (qui est un concept non biologique) est une construction culturelle relative au contexte du sujet. » Sur le fond du pur Boutin quand elle s'insurge contre l'imposition "d'une cer­taine vision de l'homme et de sa sexua­lité [...] qu'il ne relève pas du rôle de l'Education natio­nale d'inculquer". Mais tout cela au nom de « l’école publique », avec un détournement éhonté de la « Lettre de Jules Ferry aux instituteurs »* de 1883. Il n’est pas étonnant qu’ils soient flatteusement présentés comme de nouveaux « hussards noirs » (sic) dans Nouvelles de France qui se dit Portail libéral-conservateur.

 

androgyneCdl126pxPhilippe Watrelot, responsable du CRAP (cahiers pédagogiques) note que « Ce n’est pas la première fois (et malheureusement pas la dernière) qu’un groupe de pression s’en prend aux programmes scolaires. On se souvient de la polémique causée par la proposition de députés d’intégrer “les aspects positifs de la colonisation” dans les programmes d’histoire. Ou encore des lobbys patronaux reprochant aux programmes de SES de ne pas assez donner une image positive de l’entreprise. Ce qui est notable ici c’est qu’il s’agit non pas seulement d’un groupe de pression mais d’un pan de l’enseignement français (qu’on le veuille ou non) qui s’oppose à un programme adopté par l’ensemble de la communauté éducative. Cette prise de position vient après d’autres marquées par un durcissement du discours et une volonté de réaffirmer la spécificité de l’enseignement catholique non seulement sur les dispositifs mais aussi sur les contenus. »

 

Et la prise de position officielle des évêques montre que la tentation cléricale d’imposer leurs dogmes – baptisés lois naturelles – à l’ensemble de la société est toujours présente. Comme le rappelle justement l’UNSA éducation « les Eglises, quelles qu’elles soient, n’ont pas à donner leur avis sur des programmes scolaires qui visent à la formation de « citoyens » et non de « croyants », sauf à vouloir défaire la loi de séparation des Eglises et de l’Etat ».

 

 

* Citer la « Lettre de Jules Ferry aux instituteurs » relève d’une certaine ignorance du contexte historique (naissance de l’école publique dans un environnement souvent hostile) et feinte ignorance des enseignants auxquels il s’adresse : les instituteurs à une époque où la scolarité s’arrêtait à douze ans. L’auraient-ils correctement lue qu’ils auraient vu qu’elle ne vise que l’Instruction morale et civique. A vouloir lui faire dire ce que la lettre ne dit pas ils justifient le refus de certains parents – tout aussi « honnêtes » que le père de famille qu’évoque J. Ferry, à propos de précepte ou maxime – de certaines parties des programmes de SVT. Ceux, peu nombreux au demeurant, qu’évoquent perpétuellement les islamophobes. 

 

Pour compléter :

Liberte-des-maeurs-egalite-des-droits_medium.jpgTéléchargez l'essai gratuitement  (433,79 ko)

 

Pour compléter encore : http://www.rue89.com/2013/06/29/risque-radoter-theorie-genre-nexiste-243298#comment-3671856

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commentaires

B
<br /> A bas la calotte !<br /> <br /> <br />
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