Lette ouverte à Bernard Roman, député.
(voir le Post Scriptum qui complète et corrige cette lettre après la remise du rapport de l'IGA au ministre de l'intérieur)
Monsieur le député et cher camarade,
Je n’ignore pas que les extraits de déclarations sont toujours réduits aux fameuses “petites phrases”; je comprends, pour la partager, l’émotion que l’on ressent en apprenant qu’une collégienne de 3e a pu être arrêtée dans un voyage scolaire ; il y a cependant des mots qu’on n’emploie pas.
“Rafle” est de ceux-là. Au sens où vous l’avez employé il signifie : “Arrestation massive opérée par la police à l'improviste” (CNTRL). Et vous ne pouvez ignorer que ce mot est historiquement fortement connoté.
Pour avoir commis une “lettre ouverte à mon camarade Valls*”, je ne suis pas le mieux placé pour fustiger les attaques dont il est l’objet.
Cependant, je n’ai pas la prétention de croire que ma modeste philippique d’adhérent de base ait le même poids que les attaques publiques de la direction du PS, du Président de l’Assemblée, de parlementaires et même, en plus nuancé cependant, d’un ministre au moins. Comme le remarquait, un observateur chevronné de la vie politique, Nicolas Domenach, cette offensive publique et qui peut paraître orchestrée, contre le ministre de l’Intérieur d’un gouvernement socialiste, par le Parti socialiste, le président socialiste de l’assemblée, des parlementaires socialistes est totalement inédite et quasi démente voire suicidaire.
Dans cette affaire, il n’était pas totalement interdit de s’interroger sur le rôle du préfet.
Si l’on considère que la famille avait épuisé tous les moyens de droit et que donc l'expulsion vers le pays d’origine était fondée – hypothèse qui reste à vérifier – quel besoin y avait-il, toutes affaires cessantes, de faire stopper un autocar en sortie scolaire pour en extirper une élève ? La procédure - de rejets en appels, de recours en rejets - avait duré plus de quatre ans. Le préfet était-il à un jour près ?
Ne serait-il pas plus judicieux, comme a su le faire, par exemple, le sénateur Placé, de s’interroger sur le comportement de ce préfet qui ne pouvait ignorer que cette arrestation en milieu scolaire risquait de provoquer des remous. Et mettrait son ministre dans une position inconfortable, puisqu’il ne pourrait désavouer une expulsion légale (toujours dans l’hypothèse où elle était bien fondée en droit), même s’il n’était pas tout-à-fait dupe de la manoeuvre vicieuse du préfet. Car s’il le sanctionne, je vous laisse imaginer l’exploitation qui en serait fait non seulement au F-Haine mais à l’UMP.
Une réaction émotionnelle outrée et surtout mal ciblée ne peut faire que des dégâts.
J. F. LAUNAY
* Elle portait néanmoins, puisqu’on parle de valeurs, non pas sur une bavure (ou pire bien sûr si la procédure entière était entachée d’illégalité), mais sur un propos quasi ontologique sur la “vocation” des Roms à s’intégrer ou pas.
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