Pour avoir défendu Caroline Fourest à quelques reprises, j’en déplorais encore et toujours, une relation assez particulière avec les faits. Ainsi, accusait-elle, pour avoir co-signés avec plusieurs dizaines d’autres un texte consensuel au lendemain de l’attentat de Charlie Hebdo, le Président et le secrétaire général de l’Observatoire de la laïcité de frayer avec des salafistes, car, parmi les signataires, se trouvait notamment un rapeur suspect à ses yeux. Il est vrai que le 1er ministre de l’époque s’est livré à ce même amalgame malhonnête. Elle poursuit de sa vindicte Jean Baubérot car, lui, aurait accepté de répondre à une invitation de l’UOIF ! Ne parlons pas de Cohn-Bendit qui avait été voué aux gémonies pour avoir débattu avec Tarik Ramadan en 2006. Et plus récemment Macron pour une citation de touitte, sur laquelle il n’y pouvait mais.
Le livre posthume de Charb - Lettre aux escrocs de l’islamophobie qui font le jeu des racistes - devait être adapté sur scène à l’université de Lille, avec notamment la participation de Marika Bret, ex-DRH de Charlie, qui est à l’origine de la publication du livre.
Mais le président de l’université lilloise, Xavier Vandendriessche, redoutant des “débordements” et invoquant “un climat lourd”, a cru bien faire en supprimant Charb de la programmation. À deux reprises. Le metteur en scène, Gérald Dumont, parle de “censure” dans une lettre adressée à la ministre de la Culture, Audrey Azoulay. Et la Ligue des Droits de l’Homme (ainsi que la MRAP auquel elle voue aussi une haine inexpiable) fut accusée par C. Fourest de participer à cette « censure ».
C’est pourquoi la mise au point parue dans Politis mérite d’être entièrement citée :
Les belles âmes contre la LDH
Au mépris des faits, Caroline Fourest, notamment, accuse la Ligue des droits de l’homme de censure.
La Maison régionale de l’environnement et des solidarités (MRES) est un réseau associatif du Nord-Pas-de-Calais, qui regroupe plus de 110 associations, dont la Ligue des droits de l’homme (LDH) et le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap). Il y a peu, la MRES propose à la section de Lille de la LDH, ainsi qu’au Mrap lillois, de parrainer la lecture d’un texte de Charb, prévue le 2 mai, par une compagnie artistique du cru. Il s’agit du livre paru quelques mois après la mort de l’ex-directeur de la publication de Charlie Hebdo : Lettre aux escrocs de l’islamophobie qui font le jeu des racistes.
La signification d’un tel parrainage ? Une association apporte sa caution, affirme un engagement commun. Sauf que la LDH ne partage en rien les thèses de Charb sur l’antiracisme et la laïcité. Et donc décline la proposition. Or, dans son édition du 25 mars, La Voix du Nord sous-entend faussement que ce refus de parrainage équivalait à l’annulation de la lecture. Ce qui suffit à réveiller la brigade des belles âmes. Des penseurs dorés sur tranche – Bernard-Henri Lévy, Raphaël Enthoven… – s’émeuvent en 140 signes. La Licra signe un communiqué dénonçant « un acte de censure, de lâcheté et de trahison de nos valeurs ». Sous la plume de Gérard Biard, dans Charlie Hebdo, on apprend que « la Maison régionale de l’environnement et des solidarités d’Arras [sic] a déprogrammé la lecture-spectacle du livre de Charb […]. Sur ordre du Mrap […] et de la LDH. »
Mais dans l’art des redresseurs de torts, entre fiel et acidités gastriques, devinez qui excelle en ces termes (dans Marianne) : « La LDH, cette vieille dame qui soutenait jadis les libertés, se range du côté de la censure depuis qu’elle confond les musulmans avec les islamistes et les islamistes avec le capitaine Dreyfus. Ses principaux militants parisiens ne sont plus des professeurs laïques, mais des avocats orientalistes. Ils ont adoré défendre les islamistes algériens du FIS, soutiennent Tariq Ramadan, militent contre les lois antiterroristes avec le Collectif contre l’islamophobie et parrainent la commission Islam et laïcité, ce rendez-vous branché des sociologues ayant hurlé avec les chiens contre Kamel Daoud » ? Caroline Fourest, bien sûr ! Dont le combat au service de la vérité ne résonne jamais avec le triomphe de la morale. Un vice de forme ?
POLITIS
PS C’est moi qui ai surligné.
Voir aussi la mise au point très précise de Michel TUBIANA Président d’honneur de la LDH :
Petit précis de lynchage médiatique
Comme on le constate, une fois encore, Caroline Fourest, avec l’agressivité qui la caractérise trop souvent, procède à un procès en sorcellerie contre la LDH.
Elle serait peut-être mieux inspirée de concentrer sa plume polémiste, à nouveau, à l'encontre du prétendument laïque FN et contre, aussi, les faux laïques liberticides, peu éloignés sur ce plan du FN et dont, contrairement aux apparences, elle ne partage pas les thèses.
La laïcité peut-elle être universelle ?
Entretien avec Valentine Zuber
La laïcité n’est pas une « valeur », mais un moyen de gouverner en toute équité.
En France, elle s’illustre par l’obligation de neutralité de l’État et de ses agents dans leurs relations avec les différentes composantes de la société, cette neutralité ne pouvant, en aucune manière, s’imposer aux usagers.
Il [l'état] garantit aussi le libre exercice des pratiques individuelles ou collectives que ces convictions réclament, aussi bien dans l’espace privé que dans l’espace public (art. 1 de la loi de 1905).
Pour qu’un État soit véritablement laïque, il faut que toutes ses minorités, religieuses ou politiques, jouissent exactement des mêmes droits et libertés que celles des populations majoritaires. Et il faut bien comprendre que, parce qu’elle est un processus politique, la laïcité est toujours en devenir.
Si l’on admet que le type français de laïcité de l’État n’est pas le seul modèle possible, et que, dans la mesure où la liberté, l’égalité et la non-discrimination pour des raisons religieuses de tous les citoyens sans exception sont globalement respectées par l’État, le principe de laïcité constitue un important facteur de paix civile.
Celui-ci peut être adopté sans difficulté par tous les États du monde démocratique.
Extraits
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