Le 49.3 est né en réaction à l’instabilité gouvernementale de la 4e République.
Si Rocard et, à un moindre degré, Cresson et Beregovoy, l’ont beaucoup utilisé, c’est qu’ils se sont trouvés devant une Assemblée Nationale ne dégageant qu’une majorité socialiste relative : 258 sièges, la majorité absolue étant à 270. La conjonction de la droite et du PCF dans des votes négatifs eût pu bloquer toute action gouvernementale. Le 49.3 en obligeant à un vote majoritaire d’une motion de censure a permis aux trois gouvernements socialistes de 1988 à 1993 de faire passer un certain nombre de textes.
Depuis 2008, le 49.3 ne peut être utilisé que sur la loi de finances et le financement de la Sécurité sociale, plus un texte par session (une session correspond à une (petite) année scolaire).
Il s’agit bien d’un passage en force, mais qui ne prive pas le Parlement de toute riposte, puisqu’une motion de censure peut faire tomber le gouvernement. C’est arrivé une seule fois mais la chambre élue après dissolution a été un désaveu cinglant pour les votants de cette motion.
"Le fameux 49.3 s’inscrit dans ce système de contrôle et d’équilibre des pouvoirs, quoiqu’on en dise, puisque l’exécutif met le législatif face à ses responsabilités, en disant “c’est cette loi ou moi”. Soit le législatif renverse le gouvernement, soit il ne le fait pas, et dans ce cas, il est regardé comme ayant adopté la loi casus belli. Mais il ne peut refuser au gouvernement les moyens de son action tout en prétendant le soutenir (ce qui était le mode de fonctionnement habituel de la IVe république)."
La satanique Loi travail s’est heurtée donc à la double opposition de la droite, qui ne la trouvait pas assez à droite, et de frondeurs qui, eux, pensaient l’inverse. Mais qui, prudemment, n’ont pas déposé de motion de censure – que la droite eût été capable de voter – pour éviter une dissolution qui aurait renvoyé la plupart d’entre eux dans leurs foyers (ce qui risque de se passer aux futures législatives, mais n’anticipons pas).
Prôner la suppression du 49.3 peut s’entendre dans la bouche d’Hamon qui, après avoir été démissionné pour cause d’abus de la cuvée du redressement, a rejoint les frondeurs. Mais, c’est plus surprenant dans celle d’un ex-premier Ministre qui en a usé.
A noter que P. Mendès-France (Pour une République moderne) préconisait un contrat de législature, avec dissolution en cas de rupture du contrat. Bien sûr, dans une architecture institutionnelle très différente. Mais reste le principe d’asseoir une majorité sur un véritable engagement qui suppose une discipline.
Et, finalement, quand une minorité, dans la mesure où elle a pu faire valoir ses arguments, n’accepte pas la position majoritairement adoptée, qu’elle fronde, elle oblige à utiliser l’arme du 49.3 ou à dissoudre, suicidairement, l’Assemblée.
Reste à savoir si, dans la phase préparatoire, le 1er Ministre a été ouvert au dialogue et a eu le sens du compromis…
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