C’était… quand déjà ? en 1985 peut-être : mon regretté ami Paulo m’avait convaincu de l’accompagner au Parc-des-Princes. Le PSG, en matchs d’avant-saison, organisait un petit tournoi avec des équipes européennes. Nous nous étions retrouvés dans une tribune aux trois quarts vides, mais avec, tout en haut, une centaine d’individus habillés de cuir noir. Le premier match du tournoi allait s’achever, des joueurs s’échauffaient pour le suivant. Alors que quelques-uns d’entre eux, dans une série de petits sprints, arrivaient au pied de notre tribune, la clique se mit à dévaler les gradins jusqu’au bord en gueulant des injures contre un joueur noir du… PSG. Cette bande de nazillards était censée faire partie des supporters du… PSG !
Ça me changeait du stade Bessonneau où on allait encourager le SCO : les spectateurs angevins étaient capables d’applaudir un beau geste de l’équipe adverse ; ça a dû leur passer.
Car depuis, à cause de prétendus groupes de supporters dont les nazillons du « kop de Boulogne » sont les prototypes, mais par la faute aussi de la lâcheté des dirigeants des clubs qui les ont laissé prospérer aux dépens des clubs (ainsi à Marseille, ont-ils le quasi monopole des abonnements populaires, d’où des luttes entre eux pour augmenter leur part de marché), la situation ne cesse de se dégrader. A de rares exceptions près – peut-être encore les Lensois – les prétendus supporters ne supportent plus leur propre équipe ; ils insultent leurs joueurs, caillassent leurs voitures. Et, quand ils n’ont pas les abrutis du camp d’en face pour une belle baston, et bien ils se battent entre eux ! Chaque match ou presque mobilise autant de CRS ou gendarmes mobiles qu’un voyage en province de celui qui fait président.
Le dernier « classico » - pure invention journalistique, les rencontres OM-PSG n’ayant aucun rapport avec celles opposant Real et Barça, ni pour la qualité de jeu, ni pour l’ambiance – a vu les marseillais refuser de monter à Paris. Donc les parisiens ont dû se contenter de se cogner entre eux. Une centaine des plus abrutis du « kop » de Boulogne sont venus provoquer ceux d’en face, la tribune d’Auteuil. Bêtise suprême, car le rapport de forces était en leur défaveur et ils ont piteusement battu en retraite, laissant l’un des leurs à demi-mort.
Ce kop, entre autre exploit, s’était distingué, lors d’une finale de la coupe de la Ligue, opposant PSG à Lens en 2008, en déployant, sous les yeux de 35 000 Nordistes, qui avait fait le voyage jusqu’à Saint-Denis, une banderole haineuse : “Pédophiles, chômeurs, con-sanguins : bienvenue chez les Ch’tis”. Ce genre de gentilles agaceries n’était pas inédit : Lyon et Saint-Etienne font un concours dans le style « plus ignoble, je meurs ». Et les Marseillais font aussi preuve d’imagination quand ils accueillent le PSG, ponctuant la rencontre de sonores « Paris, on t’enc… ».
Ce qui fit dire à un journaliste de Libé que l’indignation était peut-être surjouée. « Que s’est-il passé de plus grave samedi soir à l’occasion ou en marge de la finale de la Coupe de la Ligue entre le Paris Saint-Germain et Lens, au Stade de France ? La désormais fameuse banderole : «Pédophiles, chômeurs, consanguins : bienvenue chez les Ch’tis» ? Ou les agressions racistes et les jets de bière dont ont été victimes, à la station Saint-Michel, des passagers noirs du RER de la part de supporteurs du PSG qui poussaient des cris de singe ? »
C’est encore Libé qui, en 2005, analysait ce qu’il appelait « Guerre en tribunes ». Car au point de départ, il s’agit déjà d’une bagarre entre parisiens en déplacement au Mans : « "Une embrouille sans queue ni tête entre deux types bourrés", tous les deux supporters du PSG, selon un témoin. Un des «Boulogne Boys» (de la tribune dite «Boulogne») contre un membre des «Tigris Mystics», un des groupes du «virage Auteuil», la tribune opposée. Le différend se réglera à 2 heures du matin, après le retour en bus, à coups de lance-fusée, de bouteilles et de barres de fer, devant le siège du club parisien. »
Ce 1er affontement allait être suivi d’autres : « Le 1er octobre 2005, jour du match contre Nantes, dès 11 heures, "150 indépendants chargés, bourrés, organisés, attendent dans les rues autour du stade pour faire la chasse aux Tigris", rapporte un témoin. Ces derniers ne viendront pas, refoulés par mesure de sécurité. Autour du Parc, l'ordre règne : bras levés, chants natios, jeunes Noirs et Arabes ratonnés. Pas moins de 85 hooligans sont interpellés, pour la plupart relâchés quelques instants plus tard. »
Le ministre de l'Intérieur, de l’époque, promettait de «débarrasser nos stades des voyous».
Mais encore mieux le 30 octobre, «cinq heures avant le match, 100 hooligans fichés, hors catégorie, sont là. Des fous. Et l'AJ Auxerre, qui veut faire du chiffre, leur a vendu des places à 6 euros. Juste pour remplir les tribunes.» En plein match, les «hools» traversent sans encombre le stade champêtre de l'Abbé-Deschamps pour bombarder la tribune visiteurs, où siègent les Tigris : sièges, boulons, et même des cuvettes et carreaux en faïence arrachés dans les toilettes du stade, retrouvées atomisées. Sous l'oeil de Canal + et de TF1. «Quand il n'y avait plus de Tigris, ils ont cherché les Beurs dans le stade. Après, ils ont chargé les CRS avec des barrières en métal. On n'a pas eu de mort, mais on n'en est pas loin.» Une aimable soirée de football, qui se conclut sur le score de zéro interpellation. »
Libé, toujours en 2005, décrit les deux tribunes : « A droite : le Kop de Boulogne, fief historique des supporters parisiens. En haut de la tribune, les associations officielles avec, au premier rang, les Boulogne Boys. A l'étage d'en dessous, la section «R2», celle des fachos pur jus, pratiquants assidus du salut nazi et du cri de singe. A divers endroits de la tribune, les «indépendants» et hooligans rompus à la guérilla des stades. Des tribus distinctes, mais une tribune «nationaliste». […] Noirs et Arabes n'y sont pas les bienvenus, orientés vers d'autres tribunes par les stewards du club eux-mêmes. Mesure de sécurité. «[…] Quand on vient des cités, on va à Auteuil...»
De l'autre côté de la pelouse, et aux antipodes : le virage Auteuil, ses vapeurs de shit et ses groupes ultras plus «cosmopolites et racailleux», dit un habitué. […] En première ligne : les Tigris Mystics, 500 encartés, considérés comme un «bon groupe» par ses voisins d'Auteuil. Mais un peu trop «hégémonique» et remuant. «Chez les Tigris, il y a des mecs extrêmement violents, aussi cons que ceux d'en face, estime un proche du club. A Boulogne, il y avait des "sales Noirs", des "sales Arabes". Maintenant, on entend aussi des "sales Français".»
Et l’article décrit bien aussi la lâcheté des dirigeants qui cèdent devant le lobby des ultras en limogeant un responsable de la sécurité trop zélé ! « Les différentes directions du PSG ont toujours plus ou moins toléré la présence de groupes extrémistes et violents à Boulogne, allant parfois jusqu'à employer certains de leurs membres. »
Après le dernier épisode gageons que le kop boulogne avec ses "Crânes rasés, autocollants lepénistes placardés sur les murs, Marseillaise ponctuée par des «Bleu Blanc Rouge, la France au français», et pourtant non je ne vous décris pas là un meeting du Front National mais bel et bien l’ambiance du Kop le plus controversé de France. Bienvenue à Boulogne, la seule tribune garantie 100% blanche en France.", comme le décrit Sportvox, va, non seulement pouvoir continuer de sévir, mais jouer les martyrs.
Et, gageons que ces nazillons vont continuer de sévir en toute impunité, soutenus non pas seulement par les souchiais, mais aussi par les pseudos-laïques !