Des fabliaux aux pubs Benetton ou d’Antonio Federici, en passant par toute une littérature, les nonnes friponnes se faisant allègrement trousser par un curé lubrique ont peuplé dessins et récits paillards. Mais là, il ne s’agit plus de péchés de chair entre adultes jetant de concert leurs vœux de chasteté aux orties, mais de harcèlements et de viols. Et, même si elles ne subissent pas de violences sexuelles, beaucoup de religieuses sont traitées par les prêtres, des évêques, des cardinaux comme des boniches à leur service (et gratuites). Le pape vient de le reconnaître : "des prêtres se sont servis de religieuses comme esclaves sexuelles".
La loi du silence et du secret
Deux ex-nonnes, Rocío Figueroa et Doris Wagner Reisinger, ont rompu la loi du silence et fondé une association Voices of Faith pour amener leurs consœurs à dénoncer la violence exercée par une partie des prêtres et évêques. Elles ont déjà obtenu que l’Union internationale des supérieures générales (UISG), organisme qui représente plus d’un demi-million de religieuses dans le monde, fasse part de sa "profonde tristesse et indignation" face aux abus qui règnent au sein de l’église. Mais ces « Supérieures » n’ont-elles pas, naguère, fait prévaloir la loi du silence et du secret ? C’est ce qui ressort en tout cas des témoignages de Wagner et Figueroa.
Rocío Figueroa, péruvienne, fut durant 21 ans, religieuse dans la Fraternité mariale de la réconciliation rattachée à la Congrégation de la vie chrétienne (Sodalitium Christianae Vitae), un des groupes les plus conservateurs des églises d’Amérique latine. Rocio souffrit des abus du vicaire de la congrégation, German Doig, au su du fondateur Luis Fernando Figari.
Rocio conte que dès ses 15 ans, elle sentit l’appel de dieu et elle rencontra cette congrégation ultra-conservatrice. German Doig devint son directeur spirituel. Au bout de quelques mois, il l’amena à pratiquer le yoga. Peu à peu les sessions de groupes se transformèrent en duo, lui et elle. Il lui enseigna des exercices spéciaux destinés à renforcer son autocontrôle sur sa sexualité. Graduellement, ils devinrent de plus en plus intimes et les exercices de plus en plus spéciaux… Mais elle n’en dit rien à personne, se sentant coupable.
A 18 ans avec 5 autres jeunes filles, elle décide de se consacrer à la vie religieuse, devenant la branche féminine du mouvement. Elles furent très durement traitées par la branche masculine, avec un Figari misogyne qui considérait les femmes comme moins intelligentes. Comme Rocio devenait de plus en plus critique sur le traitement subi, elle fut envoyée à Rome.
Doig mourut en 2002, et Figari, sans vergogne, voulut qu’elle l’aide à obtenir sa béatification. Mais, ayant découvert qu’elle n’était pas la seule victime de Doig, qu’il était un abuseur en série, elle eut la néfaste idée d’en informer le fondateur et se retrouva, elle-même, accusée de mensonge. Et quand elle raconta au Cardinal Rylko les abus dont elle avait été victime, il lui répondit qu’elle avait le choix entre quitter la communauté ou garder le silence. Il a fallu l’aide d’un journaliste pour que, bien des années après, les abus commis par Doig, Figari et au moins deux autres membres de la direction de cette congrégation deviennent publics.
Doris Wagner entre dans la vie religieuse à 19 ans. Dès le départ, elle subit ce qu’on pourrait appeler une dépersonnalisation progressive (du même style que celle subie par les petits séminaristes de Vendée) : confesseur et directeur de conscience imposés, interdiction de parler librement avec les autres membres de la communauté, de lire des livres… Cinq ans plus tard, à Rome, le supérieur de la communauté religieuse, L’Œuvre, est entré dans sa chambre, l’a dénudée, et comme elle protestait, l’a frappée et l’a pénétrée. Quelque temps plus tard, un autre responsable de L’Œuvre, « aujourd’hui chef de bureau à la Congrégation pour la doctrine de la foi », précise-t-elle, demande à sa supérieure d’être son confesseur et se sert de cette position pour l’agresser. Elle demande à sa supérieure de changer de confesseur mais quand celle-ci lui en fait expliquer les raisons, elle trouve des justifications à son agresseur : « Elle m’a dit savoir qu’il avait une certaine faiblesse pour les femmes et que nous devions essayer de supporter cela ». (La Croix)
Abus sexuel : abus de pouvoir
Comme le dit Figueroa, tout abus sexuel dont est victime une religieuse est avant tout un abus de pouvoir. Et que la victime ressent comme une trahison : le prêtre, consacré, ‘représente’ la voix de dieu ; la trahison de la confiance amène la victime à se sentir abandonnée de ce dieu ; l’abus sexuel au sein de l’église génère un conflit théologique et existentiel, déstabilisant la foi de la victime, son identité spirituelle, sa conception de dieu.
Selon Doris Wagner, près de 40 % des religieuses auraient été victimes d’agressions sexuelles. Elle ajoute qu’il y a de nombreux cas où des prêtres ayant mises enceintes des religieuses les ont forcées à avorter*.
Nonnes à tout faire
Et, scandale moins spectaculaire – mais qui peut se cumuler avec les abus sexuels – de nombreuses religieuses du tiers monde ont été en quelque sorte importées en Europe et en particulier à Rome : ces sœurs qui ont quitté leur pays en croyant servir le ‘‘Seigneur’’ en se mettant au service des pauvres, ont été réduites à être de pauvres servantes des seigneurs évêques et des princes cardinaux !
Si l’on ajoute que Sodoma révèle l’emprise non plus d’un lobby mais d’un système gay sur le Vatican – ce qu’affirmait déjà un Alberto R. Cutié, et que semblait démontrer Amores Santos documentaire brésilien - on plaint le pauvre pape François face à ce mur d’hypocrisie.
* L’article mis en lien fait état d’un rapport de 1995, dans lequel sœur Maura O’Donohue rapporte l’histoire d’une religieuse morte au cours d’un avortement : le prêtre qui l’avait mise enceinte, et conduite à l’hôpital pour y remédier, a célébré sa messe de funérailles !
SOURCES
À la Congrégation pour la doctrine de la foi, une simple « admonestation » pour agression sexuelle
Vatican: démission d'un responsable accusé de harceler une religieuse
Rocío Figueroa, exmonja y víctima de abusos sexuales
Monjas de todo el mundo se organizan contra los abusos sexuales y laborales que sufren en la Iglesia
Sur ARTE, le mardi 5 mars 2019 à 20 h 50
Documentaire sur les religieuses abusées, la justice contraint Arte à cesser toute diffusion
À la suite de la plainte d’un prêtre allemand, un tribunal de Hambourg a contraint Arte à retirer de sa plate-forme de vidéos à la demande le documentaire « Religieuses abusées, l’autre scandale de l’Église ».
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Intrinsèquement désordonnés
“Religieuses abusées, l’autre scandale de l’Église” Télérama
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