Jeune, femme, noire et insoumise, Danièle Obono a, ô la vilaine, soutenu un chanteur* qui avait commis un « Nique la France ». Nouvelle polémique, lancée du coup par un Team Macron, à partir d’un entretien en engliche avec counterfire, un site d’information anglais, qui se présente comme un media radical et socialiste (mais évidemment rien à voir avec les rad-socs de chez nous).
Quatre phrases – ou prétendues telles – sont traduites et extraites de l’entretien.
Celle sur la manif du 11 janvier est la plus typique du procédé classique qui consiste à extraire deux morceaux de phrase pour en faire une seule qui fait choc. Rien de pire cependant que les propos tenus par nos intellectuels de moleskine Onfray ou Todd.
Dans l’entretien, elle développe son point de vue dans 3 paragraphes et 336 mots, notre team Macron en tire 1 phrase de 22 mots et qui lui fait dire ce qu’elle n’a pas explicitement dit.
Inutile de préciser que, pas plus que pour Onfray ou Todd, je ne partage son point de vue. Il a le droit bien sûr de s’exprimer. On a le droit de le critiquer. Mais pas en se contentant de qualifier ses propos de choquants et scandaleux, en faisant chorus avec la lie identitaire à la de souche !
« French society has a systemic racism problem » : même si l’anglais est une langue qui m’est restée étrangère, la citation du team semble là exacte. Certes, elle amorce un développement où D. Obono s’appuie sur les travaux de la Commission nationale consultative sur les Droits de l’Homme (CNCDH) et les succès d’ouvrages anti-musulmans de Houellebecq et Zemmour , pour étayer cette affirmation. Elle n’en reste pas moins une généralisation – la société entière – et une affirmation erronée – systémique. Que pour R. Camus, de Villiers, par exemple, l’islamophobie soit érigée en dogme ne permet pas dire que la société française dans son ensemble est contaminée.
Les deux dernières citations, issues du même paragraphe, résument mais ne trahissent pas le propos de la dame. Qui là, comme le camp d’en face des pseudos républicains mais à l’opposé exact, ne fait preuve d’aucune nuance. On a pu débattre de la loi de 2004 : elle s’est appliquée sans grand problème. Celle de 2011, sur le voile intégral, posait un problème d’opportunité – fallait-il une loi pour quelques centaines de cas ? – et de mise en œuvre – la police avait peut-être plus urgent à faire que de verbaliser ces fantômes habillées de noir et qui faisaient dans la provoc. Mais ces lois ne méritent pas le qualificatif dont elle les affuble. Quand à dire que le concept de laïcité et la loi de 1905 sont utilisés contre les musulmans, c’est confondre la conception qu’ont les faussaires de la laïcité – cette conception liberticide à la Valls – et méconnaître totalement la loi de 1905.
Conception liberticide – mais là encore inversée – de Mme Obono qui accuse Charlie Hebdo de se complaire dans les caricatures islamophobiques (Charlie Hebdo’s decade-long stream of Islamophobic caricatures). Avec finalement la même tendance globalisante des racistes qu’elle dénonce, quand elle parle constamment de Muslim people comme si tous ceux et celles, qu’en fonction de leur origine, on assigne à cette religion, formaient un groupe homogène.
* Le rappeur Saïdou, du groupe ZEP (Zone d’Expression Populaire) avec un sociologue Saïd Bouamama, comme co-auteur. Les deux hommes ont été mis en examen (puis relaxés) pour ‘injure publique’ et ‘incitation à la haine raciale’ après la diffusion du clip ‘Nique la France’", qu’ils ont co-écrit : "Nique la France et son passé colonialiste, ses odeurs, ses relents et ses réflexes paternalistes/Nique la France et son histoire impérialiste, ses murs, ses remparts et ses délires capitalistes". D. Obono, à l’époque – 2012 – au NPA de Besancenot avait signé une pétition, pour défendre la liberté d’expression, au moment de la mise en examen, pétition signée aussi par Noël Mamère ou Eva Joly, entre autres.
commenter cet article …