Comment un poète qui se croit de gôche relaie une saloperie d’un site d’extrême-droite et comment les cagots, avec l’appui de la même extrême-droite essaient de bloquer le débat sur le droit à une fin de vie dans la dignité.
Un certain Benoist Magnat m’envoie ses « lettres de nouvelles »(en engliche newsletter), une fois sur deux sur la poésie, une autre fois une compilation de dessins, photo-montages et historiettes pompés ici ou là.
Cet envoi baptisé « L’Ara qui rit », hommage donc à Harakiri, le seul, le vrai est devenu « Le nouveau cheval qui rit ». Et le compilateur se met à éditorialiser. Du sous-Mélenchon teinté d’un vague anarchisme où il pourfend l’état UMPS, cible bi-front (national et de gauche). Ça se conclut par un Que faire ? léninien, mais la réponse laisse un peu perplexe : « Ah ouais bonne question, même si les réponses d’aujourd’hui ne sont pas les mêmes qu’hier. Creusons-nous la tête bon sang, jusqu’à la cervelle et mettons nos neurones en liaison avec tous les autres et cherchons cherchons que diable et rapidement car l’enfer est ici et maintenant. »
Suivent quelques images anti-Hollande dont l’une en forme de souhait pour l’an neuf, 2014, représente le Président en fusée expulsée de l’Elysée avec ce commentaire Faisons un rêve pour le premier de l’an 2014, on l’allume et bon départ pour une autre planète (la pauvre). Tout-à-fait dans la ligne des UMPistes qui considèrent que tout Président de gauche est illégitime.
Du « Hollande bashing » niveau Valeurs actuelles. Et pas éloigné de ces « valeurs » là, puisqu’il écrit plus loin : « Ben, ils sont contents les Suisses, plus Hollande taxe, plus les riches Français réfugient leur pognon en Suisse. » Un dizaine d’images anti-Hollande plus loin, deux montages un peu minables d’ailleurs, sur NKM, un anti F-Haine, un sur les Balkany.
Enfin ce montage sur Attali. Tiré d’un site « Orages d’acier », site qui défend les anti-mariage pour tous, proclame que « L’antiracisme, arme idéologique de la gauche, ne fait plus recette. », défend Dieudonné et les légionnaires qui se font tatouer des croix celtiques, se réjouit que des partisans de la fronde fiscale aient perturbé la cérémonie du 11 novembre, et appelle à soutenir Esteban (Morillo, inculpé dans le meurtre de Clément Méric) à Neuilly-Saint-Front, ça ne s’invente pas. Magnat a mis du temps à collecter l’image qui date de septembre et fait allusion clairement au 70e anniversaire de J. Attali le 1er novembre 2013.
Tapez sur un moteur de recherche Attali et l’euthanasie et vous tombez sur un article de « Laissez les vivre », le site des disciples du Professeur Lejeune, anti-IVG ! Les citations sont tirées d’un livre de prospective de Michel Salomon "L'Avenir de la Vie" (Seghers, 1981). Une série d’entretiens portant sur le futur millénaire, l’après 2000. Dans le cadre de cet ouvrage, on lui pose la question : est-il souhaitable et possible de vivre cent vingt ans ? Attali, futur conseiller du prince à l’époque, se place dans « la logique même de la société industrielle » : « dès qu'on dépasse 60/65 ans, l'homme vit plus longtemps qu'il ne produit et il coûte cher à la société. »
L’attaque avait commencé dès 1981, alors qu’Attali venait d’entrer à l’Élysée. S’appuyant sur cette réponse, la revue Profils médicaux sociaux l’accuse de préconiser le génocide des vieux. Le Quotidien de Paris et Le Figaro reprennent l’accusation. Cependant, quatre ans plus tard, le tribunal de Paris condamnera la revue pour diffamation. (M-A Lamontagne)
Les cagots et les nostalgiques d’Occident et de sa croix celtique feignent toujours de le prendre au 1er degré, comme si on accusait Orwell d’avoir inspiré la NSA !
Des sociétés dominées par des vieux riches
Attali est revenu presque 20 ans après sur ce thème. « …on se réjouit de voir augmenter de 50 % les dépenses de téléphones portables et on se plaint quand les dépenses de santé augmentent de 3 %. On freine la croissance des dépenses de santé en imposant des quotas globaux et on refuse de combattre les gaspillages individuels des médecins, alors qu’il faudrait faire exactement l’inverse : interdire aux médecins, individuellement, de gaspiller mais leur permettre, collectivement, d’utiliser tous les progrès qu’ils génèrent.
Cela s’explique par la nature profonde du pouvoir dans nos sociétés, dominées par les vieux riches, ce qui s’exprime par la priorité donnée à la lutte contre l’inflation sur celle contre le chômage et par la prééminence des fonds de pension. Or la rentabilité du capital que gèrent ces fonds pour le compte des plus riches est grevée par les dépenses de santé et d’éducation. On les verra donc s’efforcer de plus en plus de limiter ces dépenses. Naturellement, lorsqu’elles sont faites [pour] les autres. Car les plus riches n’accepteront évidemment pas qu’on limite leur droit de se soigner en fin de vie. Ni qu’on réduise le droit aux études de leurs propres petits-enfants. […]
La vraie pensée unique
Telle est la vraie pensée unique : celle qui sert à imposer aux pauvres des contraintes que les riches refusent de s’appliquer à eux-mêmes. Elle conduira à l’euthanasie implicite de presque tous, au nom du respect de grands équilibres que les plus riches n’auront pas à maintenir.
Sortir de la pensée unique, ce n’est donc pas, comme le croient certains en mal de combats anachroniques, se battre contre le traité d’Amsterdam, ni contre l’équilibre budgétaire ; c’est refuser toute contrainte imposée sans raison sur la part des soins et de l’éducation dans le revenu national. » Le Monde 6 janvier 1999
La résurgence de cette attaque ancienne contre Attali n’est pas un hasard. Il s’agit, par des accusations outrancières, des procès en sorcellerie, de bloquer toute vraie réflexion, tout vrai débat, sur une politique de santé intelligente et sur le droit à une mort digne. La priorité est-elle de repousser encore et encore l’espérance de vie quitte à la prolonger artificiellement ou d’améliorer au maximum l’espérance de vie en bon état physique et mental ? Ouvrira-t-on le droit à choisir librement, pour chacune, chacun, sa fin de vie, dans la dignité ?
N.B. On ne me soupçonnera pas d’un « attalisme » forcené puisque j’ai eu quelques échanges musclés avec le camarade Jean Kaspar, à propos d’un rapport Attali en 2008 : Attali et Kaspar Digitum in oculum !
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