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19 décembre 2019 4 19 /12 /décembre /2019 08:26

Le chercheur obstiné que je suis a encore déniché un nouvel inédit. Cette fois, c'est Molière. Bien-sûr, il faudra que tu pardonnes à ce grand maladroit, qui fit un jour Alceste, de se moquer, Oh gentiment, d'un leader syndical qui t'es cher.

Y.S.

Molière au chevet du pays

Le Médecin : Dîtes-moi quels sont vos maux ?

Le Pays : Voilà mon cher médecin, je souffre de malaises dans les finances et de troubles de mon budget.

Le Médecin : Et que vous dit-on à ce propos ?

Le Pays : Certains me disent que ce sont des kystes de salariés, d’autres des phlegmons d’assistés.

Le Médecin : Ce sont des ignorants. C’est le cheminot qui est la cause de votre mal.

Le Pays : Le cheminot ?

Le Médecin : Le cheminot, vous dis-je. De quoi souffrez-vous précisément ?

Le Pays : D’un déficit chronique des dépenses publiques.

Le Médecin : Le cheminot !

Le Pays : De parasites qui me sucent le sang.

Le Médecin : Le cheminot !

Le Pays : D’entêtements de certains qui me montent à la tête.

Le Médecin : Le cheminot !

Le Pays : Parfois de thromboses dans la circulation de mes humeurs.

Le Médecin : Le cheminot !

Le Pays : De certains organes qui fonctionnent au ralenti et  prennent les autres en otage.

Le Médecin : Le cheminot ! Le cheminot ! Le cheminot !

Le Pays : Vraiment ! Et qu’importe-t-il de faire ?

Le Médecin : Dites-moi ce que vous conseille le docteur Martinez ?

Le Pays : De ne pas renoncer à mes droits acquis.

Le Médecin : Ignorant !

Le Pays : De me battre contre les projets du gouvernement.

Le Médecin : Ignorant !

Le Pays : De faire grève jusqu’à Noël, s’il le faut.

Le Médecin : Ignorant !

Le Pays : Et de battre le pavé dans toutes les villes et tous les villages du pays.

Le Médecin : Ignorantus ! Ignoranta ! Ignorantum ! Il faut au contraire vous purger à ma façon. D’abord, chaque matin lire une pleine page des Echos. Puis, le soir, avaler une cuillerée de la bonne potion calmante du Révèrend Père Berger. Surtout, suivre les ordonnances du docteur Macron et prendre tous les remèdes concoctés par Monsieur Philippe, son apothicaire attitré.

Le Pays : Et quand dois-je …

Le Médecin : Dès aujourd’hui

Le Pays : Et jusqu’à quand ?

Le médecin : Jusqu’à leur date de péremption.

Le Pays : C’est à dire ?

Le Médecin : Jusqu’à complète guérison, quand sera mort le dernier cheminot.

 

Yoland Simon. Cc Le Malade imaginaire.

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18 janvier 2016 1 18 /01 /janvier /2016 18:07

Deux jugements scandaleux !

Rapprochement hardi ? Des syndicalistes condamnés à des peines de prison ferme pour séquestration, un policier  relaxé pour légitime défense après avoir abattu un malfrat en lui tirant dans le dos. D’un côté des magistrats professionnels, de l’autre un jury populaire.

Huit ex-salariés de l’usine d’Amiens-Nord de Goodyear ont écopé de 9 mois de prison ferme par le Tribunal correctionnel d'Amiens, le 12 janvier 2016. Ils étaient poursuivis pour séquestration  de deux cadres  de l’usine - le directeur de la production, Michel Dheilly et le directeur des ressources humaines, Bernard Glesser - pendant 30 heures, en 2014. Bien que et les séquestrés et l’entreprise aient retiré leur plainte, le Parquet avait décidé de maintenir les inculpations.

Une accusation anti Taubira indigne

Et la CGT Goodyear Amiens-Nord de réagir en qualifiant ce jugement  d’« arme avec laquelle Hollande, Valls, Taubira et l’ensemble du gouvernement ont décidé d’intimider tous les salariés qui se battent pour leur droit et leurs emplois ».

De telles accusations étaient jusqu’à présent l’apanage des dirigeants de droite ou d’extrême-droite poursuivis par la Justice. Sarkozy-Bismuth, Balkany, les Le Pen père et fille, par exemple.  Que la section d’entreprise ait une réaction épidermique soit.

Légende modifiée

Légende modifiée

Mais que Martinez, numéro un de la CGT, qui, malgré la rusticité de son look, a prouvé une grande intelligence tactique pour succéder à Lepaon, ose dire que "C’est un message fort et dans le mauvais sens que donne le gouvernement aux salariés" et qu’il ajoute "Le procureur de la République a décidé seul de demander une peine d’emprisonnement. Il est le porte-parole du gouvernement (sic) et la lourdeur de la condamnation peut nous interroger sur le fait que cette demande a été faite au plus haut niveau de l’État, de l’Élysée ou de Matignon", est un scandâle, comme aurait dit Marchais. Il ment sciemment.

Le procureur a bien décidé seul ! et sans ordre aucun.

 

La Garde des Sceaux, Christiane Taubira, a fait clairement savoir, dès sa prise de fonctions, que, contrairement à ses devanciers, elle n’interviendrait plus dans les affaires individuelles auprès du Parquet, se contentant de donner des instructions générales*. Paradoxalement, c’est ce retrait, en principe garant d’une plus grande indépendance du judiciaire par rapport à l’exécutif, qui a permis à ce procureur de requérir lourdement contre ces syndicalistes.

N’en déplaise à L’Huma ce n’est pas « le procureur de la République [qui] a condamné les salariés à 24 mois de prison, dont 9 ferme », mais un tribunal correctionnel présidé par un juge du siège qui, lui, est totalement indépendant. La droite et l’extrême-droite sont promptes à dénoncer les juges rouges. Il serait peut-être temps, qu’à gauche, il n’y ait pas que les seuls anars à se souvenir que la magistrature penche majoritairement à droite !

"Je le déclare une fois de plus, je le dis bien souvent et je le répète : ce sont des choses que je n’aime pas, d’abord parce qu’elles risquent de compromettre par une apparence superficielle de barbarie, la beauté des promesses de civilisation que le prolétariat porte en lui, et puis parce que la violence des gestes, la destruction partielle ou totale des machines, des fils, des lignes, des rails, ou bien la violence des gestes ou des paroles contre les personnes, tout cela c’est l’effet et le signe d’une organisation insuffisante.

 

Plus l’organisation ouvrière est forte, plus sont nombreux les militants groupés dans les syndicats, plus est faible chez le militant, chez le syndiqué, chez le gréviste, la tentation de recourir à ces moyens de violences sommaires."

 

Jean Jaurès, Février 1912

Inefficace et préjudiciable

 

« Au bout de 30 heures, les deux cadres étaient ressortis, laissant les salariés sans garantie d’obtenir de meilleures indemnités. » écrit L’Humanité. Donc, du pur point de vue de l’action syndicale, cette séquestration a été d’une totale inefficacité. Le blocage des stocks de pneus l’a été certainement beaucoup plus. Pire, en faisant de ces cadres des victimes, elle a nui à l’image de la CGT, donc du syndicalisme.

Voir, comme à Air France, un cadre – salarié d’ailleurs et peut-être lui aussi syndiqué – la chemise en lambeaux obligé de franchir un grillage pour fuir ses poursuivants est médiatiquement catastrophique. « Sous la chemise, y a la peau » dit une très belle chanson et cette chemise déchirée a comme un avant-goût de lynchage !

Et l’action syndicale elle-même est détournée de ses buts, puisqu’elle va se focaliser sur la défense des auteurs de ces violences.

Plus qu’une faute voire un délit, une erreur !

"La justice acquitte et la police assassine"

Le vendredi 15 janvier 2016, la Cour d'Assises de Bobigny a prononcé la relaxe pour un policier poursuivi pour avoir tué d'une balle dans le dos un malfrat.

Amine Bentounsi, un braqueur en cavale condamné à 22 ans de réclusion, qui avait oublié de revenir en prison après une permission de sortie, est signalé anonymement comme se trouvant devant un bar de Seine-Saint-Denis, le 21 avril 2012.

Selon la version du policier  le délinquant avait sorti une arme. « J’ai tiré parce que j’ai failli mourir. C’était lui ou moi », dit-il. Sauf que le fugitif est mort d’une balle dans le dos. Et si l’on en croit les témoins – dont une avocate, là par hasard – Bentounsi, après une course-poursuite, s’est écroulé face contre terre.

Le procureur, qui n’est pas le porte-parole du gouvernement mais est chargé de défendre l'intérêt de la société et l'application de la loi, avait requis 5 ans de prison avec sursis et la radiation de la police.

De faux témoignage du co-équipier de l’inculpé, de pressions des syndicats de police, en intervention du préfet de police, Christian Lambert, tout avait été fait pour saboter l’enquête. Ainsi, le deuxième policier s’était blessé à la jambe en se jetant à terre quand le fuyard avait jeté une grenade factice. Bien qu’il n’ait rien vu, il prétendra le contraire, affirmant qu’Amine Bentounsi a bien braqué son arme sur son collègue. La position des douilles fait aussi planer le soupçon que les policiers aient même maquillé la scène du crime.

« L’impact de la balle n’est pas dans la poitrine, pas dans l’abdomen ou sur le flanc. Il est en plein milieu du dos. Et la version la plus cohérente, c’est qu’à cet instant, Amine Bentounsi s’enfuit et qu’on lui a tiré dans le dos ! » explique le Procureur (Le Monde, 17-18 janvier 2016).

   Finalement, la cour et le jury populaire ont décidé que les actes commis par l’accusé étaient commandés « par la nécessité de sa défense », autrement dit la thèse de la légitime défense a été validée. Le doute, aussi ténu soit-il, aura profité à l’accusé, diront d’aucuns.

Cependant, dans le cas des syndicalistes condamnés à la prison ferme, comme dans celui de ce policier acquitté, le poids des préjugés des magistrats professionnels – antisociaux – ou des jurés – marqués par les événements de novembre – a joué un rôle décisif.

Très instructive aussi a été l’attitude de policiers  qui, comme dans un feuilleton récent furent pesamment présents au procès de Bobigny pour marquer leur solidarité à leur collègue accusé : « Pressions par la voie syndicale. Pressions sur les témoins pour qu’ils ne viennent pas déposer. Mensonges d’un policier » énonce le Procureur. Et tout cela en toute impunité. Un projet de loi se propose d’assouplir encore plus les règles de la légitime défense des policiers et de leur donner toujours plus de possibilités d’agir sans contrôle.

Au regard de ce type d’événement, l’inquiétude, pour rester dans l’euphémisme, me gagne !

 

* « Le ministre de la justice conduit la politique d'action publique déterminée par le Gouvernement. Il veille à la cohérence de son application sur le territoire de la République. À cette fin, il adresse aux magistrats du ministère public des instructions générales d'action publique. »

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