Ou de l’art de remettre au surlendemain, ce qu’on aurait dû faire l’avant-veille !
Le deblog-notes, sauf quelque brefs sursauts velléitaires, est en jachère depuis fin 2022. Et pourtant ce ne sont pas les amorces de débuts de commencements d’articles qui manquent.
Mais surtout un zeste de culpabilité vient chatouiller ce qui me reste de (mauvaise) conscience : sinon rendre compte dans les règles de l’art de la recension des ouvrages de Françoise Botté-Allain ou de Pascal Bouchard, du moins m’en faire l’écho.
L’ouvrage de Françoise Botté-Allain, « Devenir chef d’établissement, continuité ou rupture », vulgarise sa thèse en sciences de l’éducation qui se fonde sur une « démarche de recherche d’orientation clinique » d’inspiration psychanalytique. Mais plutôt que cette démarche, peut-être, l’intérêt premier de ce livre repose sur les « témoignages de chefs d’établissement et d’adjoints » qui donnent toute sa chair à ce livre.
À commencer par son propre témoignage, non seulement sur son premier poste – même s’il m’intéressait, si j’ose dire, au premier chef, puisque quand elle démarrait comme principale, je démarrais comme son adjoint – mais dans la suite de sa carrière où elle décrit les difficultés professionnelles qu’elle a pu y rencontrer. Mais, d’autres témoignages, aux vécus divers, viennent illustrer « la méthode de l’entretien d’orientation clinique » ou le rôle et fonctionnement des groupes d’analyse des pratiques professionnelles (A.P.P.).
Et ce qui est le plus bluffant, comme on dit (mais peut-être que c’est déjà ringard), c’est que cette militante dans l’âme, non seulement s’est lancée dans une thèse à peine en retraite, mais a continué de s’impliquer dans les équipes de formation des personnels de direction.
DEVENIR CHEF D'ÉTABLISSEMENT, CONTINUITÉ OU RUPTURE ?
Témoignages de chefs d'établissement et d'adjoints
Préface de Bernard Delattre
Collection : Savoir et formation
23 € (Version numérique 16,99 €)
Pascal Bouchard qui, lui, possède l’art de la recension comme il l’a prouvé dans ce blog, me fait l’honneur d’un « service de presse ». C’est ainsi que j’ai reçu ce « Traité d’ontologie relative ».
La préface de Denis Kambouchner, sans emphase polémique, fait quand même un sort à tous les prétendus philosophes : « Il appartient à tous de philosopher, excepté… aux philosophes – entendez : aux philosophes de métier. Les philosophes de métier ne philosophent pas.. Bien sûr, eux aussi pourraient, s’ils voulaient. (…) Il y a des philosophes de plateau, des conférenciers qu’on rémunère pour qu’ils donnent le spectacle d’une pensée vivante. Il y a des maîtres enchantés par leur propre verbe ou habités par une mystique plus ou moins laïcisée. »
Notre philosophe buissonnier, inscrit sa démarche plus dans le relatif de l’injonction identitaire que dans l’éther de l’ontologie. Ainsi, Claude Lelièvre, historien de l’éducation le met en relief en se contentant de reprendre les titres des chapitres.
D'où l'intérêt très actuel de ce livre à la fois très personnel et très politique au sens non politicien du terme. Quelques titres de chapitres successifs évocateurs. « Qu'ai-je qui me soit propre ? ». « N'ayant rien qui me soit propre, pour pouvoir dire JE, je revendique d'être l'auteur de moi-même » . « Mais suis-je pour autant responsable de moi-même ? » . « Pour passer du JE au Nous, un système de créances est nécessaire ». « La nécessité d'un NOUS pour qu'il y ait un JE, impose l'existence d'une morale » . « La nécessité d'un NOUS pour qu'il y ait un JE impose aussi un système de reconnaissance sociale ».. « Mais un JE revendiqué incite à la transgression, à l'abolition du NOUS ou à l'élaboration d'un NOUS factice et mortifère ». « L'Ecole est nécessairement prise entre l'affirmation des JE et l'élaboration d'un NOUS ». « Jusqu'à quel point la culture, le partage du rêve éveillé nous protège-t-il d'un NOUS totalitaire ? »
La conclusion datée - « Déclaration de non -candidature à l'élection présidentielle » - souligne ma maladive procrastination.
Ce qui me permet de dire Je
Pascal Bouchard
Pascal Bouchard pose l’hypothèse de l'unicité du genre humain. S’impose alors pour l’homme la nécessité de revendiquer une identité, un « moi profond ».
Le JE est une invention nécessaire et comme un JE ne peut exister seul, il oblige à construire un NOUS. À la question de ce JE articulé à un NOUS, l’ouvrage apporte une réponse originale tout en invoquant les grands philosophes.
16,00 € TTC
L'éternité, c'est long, surtout vers la fin.
Woody Allen
Roman est-il écrit sous le titre, conte philosophique eût pu aussi convenir.
Ce n’est pas ‘spoiler’ que de dire que le héros grâce à une ‘miraculeuse’ rencontre avec une Viviane va accéder à une immortalité qui arrête l’aiguille à 27 ans. Mais on ne révélera pas comment peut se conclure cette immortalité.
Et immortalité mise à part, le roman peut captiver d’abord par la personnalité du héros et par son parcours de l’exode de 1940 à l’armistice de 1945. Il y a du Meursault chez ce Laurent Berthier, un peu ‘étranger’ à sa propre vie.
Pendant l’exode, alors que deux avions allemands s’apprêtent à attaquer la colonne de civils où la voiture paternelle est bloquée, il va obéir à une jeune femme inconnue qui l’incite à fuir. «…il y repensera souvent et se demandera par quel mécanisme il a pris la décision, sans plus de réflexion, sans même l’avoir voulu… ». Un peu plus tard, arrivée dans la ferme normande propriété de sa famille, il réalise qu’ « Il a pris la place qu’avait son père et sa poitrine se gonfle d’un peu d’orgueil… » « Il s’en veut de cette pensée fiérote » « alors qu’il devrait pleurer ses parents et son frère. « Mais il n’arrive pas à être totalement triste. »
En 1943, le mari de sa femme de ménage lui confie trois enfants juifs de 8 à 12 ans : « Plus tard, il se dira qu’il est entré en résistance pour ne pas décevoir la femme de ménage ni son mari, que toute sa vie a basculé à cet instant, où juste il n’a rien dit… ». Là, l’engagement dû du hasard des circonstances dépasse le personnage : le Lacombe Lucien de Louis Malle décrivait le (non) choix inverse.
Plus tard, après avoir connu les affres de la clandestinité, dans la résistance, à la Libération, « il s’engage. » Officier, il a une réputation de bravoure. Mais lui, il sait qu’ »Il a fait preuve de courage parce qu’il ne pouvait faire autrement. »
Il a demandé à être démobilisé après l’armistice. « Il s’était promis, en quittant l’armée, de vivre pleinement l’avenir. Il n’avait aucun projet. »
Et le roman va basculer, après quelques chapitres délicieusement nimbés d’érotisme et de mystère, dans le conte philosophique avec l’acceptation du « cadeau de l’immortalité », cadeau d’adieu de sa fée Viviane !
Je laisserais le lecteur découvrir comment on vit l’immortalité.
Il faut bien que jeunesse se passe (L’anti-Faust)
Pascal Bouchard
Editions Lazare et Capucine
16 €
Sur quelques ouvrages de Pascal Bouchard :
"Ce que vivre m'a appris" Pascal BOUCHARD
Augustin (saint-) et moi
Jean-Michel Blanquer, l'Attila des écoles
Quelques unes des contributions de Pascal Bouchard au deblog-notes :
Écriture inclusive
"Un Sujet français"
N'ayons plus peur
"Le principal, il nous aime pas", un livre exceptionnel
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