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9 août 2018 4 09 /08 /août /2018 17:35
Sexualité et Art Roman

Femme qui montre ses organes sexuels sur un chapiteau du presbytère de la collégiale de San Pedro de Cervatos (Cantabrique).

Les obscénités romanes sont-elles des paratonnerres contre le diable ?

Personnages priapiques, femme exhibitionniste, couple coïtant, etc. ornent aussi bien l’extérieur que l’intérieur, les chapiteaux comme les modillons, des édifices religieux romans.

Sexualité et Art Roman

Exhibitionniste dans l'église de Sequera del Fresno (Province de Ségovie).

Qu’un sculpteur farceur donne à une gargouille les traits d’un compagnon ou d’un religieux peut se concevoir ; mais il est peu probable que la représentation d’une femme exhibant sa vulve ou d’un homme au priape monstrueux puisse être une espièglerie de l’anonyme artiste. Les cohortes nomades des tailleurs de pierre, sous la responsabilité d’un Maître artisan, ne pouvaient que se plier aux ordres du commanditaire, seigneur ou prélat.

Sexualité et Art Roman

Chevalier et sa dame échangeant un baiser avent de se quitter : portail principal du monastère de San Pedro de Villanueva en Cangas de Onís (Asturies).

Détail

Détail

Quelle interprétation donner donc à cette iconographie scabreuse (située ici au Nord de l’Espagne mais que l’on peut trouver aussi en France et sans doute plus abondante car en des temps plus pudiques une partie a dû être détruite ou modifiée) ? D’autant plus scabreuses que les œuvres étaient peintes : ainsi a-t-on découvert des traces de peinture noire sur le pubis de la femme.

Sexualité et Art Roman

Modillon de la collégiale de San Martín de Elines (Cantabrique).

Faut-il y voir une visée doctrinale quasi pédagogique : la représentation de ce qu’il ne faut pas faire sous une forme vigoureusement explicite ? Interprétation pour le moins bizarre, comme si on donnait à un adolescent des revues pornos en lui disant « Regarde, voilà ce qu’il ne faut pas faire ! ».

On peut y voir aussi une représentation d’une vie quotidienne moins corsetée que les époques ultérieures. Voire une incitation à la procréation dans une période marquée par une très grande mortalité infantile ?

Sexualité et Art Roman

Détail d’un chapiteau de la Collégiale de Santa Juliana, en Santillana del Mar (Cantabrique).

Mais un expert espagnol propose une hypothèse plus religieuse. Ce serait comme une espèce de paratonnerre contre les méfaits du Malin qui tombent sur les humains. Comme un leurre pour le démon.

Sexualité et Art Roman

Un couple faisant l’amour : décoration de l’ermitage de San Pedro de Tejada (Puente-Arenas, Province de Burgos).

Une image récurrente dans les églises romanes est celle d’une femme nue tenant dans ses mains deux serpents qui s’attaquent à ses seins, dans un douloureux châtiment éternel de la pécheresse. Au-delà d’Eve et du mythe misogyne du péché originel, on retrouve celui de Pandore qui apporte tous les maux à l’humanité.

Sexualité et Art Roman

Chapiteau de l’église de Santa María de Uncastillo (Province de Zaragoza) avec un prêtre tonsuré à droite en train de coïter.

Ces sculptures sont aussi révélatrices de leur époque. On imagine à tort que tout ce qui était sexuel était considéré comme mal. Or les médecins prescrivaient la pratique régulière du coït pour les époux. Même pour le clergé*, on tolérait que les prêtres aient des relations sexuelles. Les nonnes, que l’abstinence amenait à des suffocations utérines, étaient autorisées à se masturber, y compris en usant d’un godemichet.

Sexualité et Art Roman

Modillon avec une scène de coït dans l’église de San Miguel de Fuentidueña (Province de Ségovie).

Quelles que soient les explications, ces œuvres montrent que cette période du Moyen-Âge ne fut pas une ère d’obscurité et d’horreur et que, sur la sexualité, elle était plus ouverte que les périodes ultérieures. Les phallus, que les hommes montraient sans complexe, depuis se sont dissimulés.

 

*Si la rigoureuse réforme du XIIe siècle établit le célibat des  prêtres ce ne fut qu’en partie pour des raisons théologiques – quelqu’un dont les mains seraient tachées de sperme, considéré comme impur, ne peut distribuer le sacrement de l’eucharistie – ce fut surtout pour des raisons économiques que les possibles disputes d’héritage des enfants de curés menacent les biens de l’église.

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1 décembre 2016 4 01 /12 /décembre /2016 21:33
« Les enfants de Marie » de Talavera se déchaînent

Le sexshop “Non sit peccatum” est l’objet de l’ire d’ultracatholiques qui exigent le retrait d’une crèche érotique où la sainte famille est peinte dans la céramique en forme de pénis !

Un groupe d’ultracatholiques de la ville tolèdane de Talavera de la Reina, répondant au doux nom d’« Enfants de Marie » a décidé de montrer son particulier attachement à la crèche – chère à nos culs-bénits de Ménard ou Retailleau – en s’en prenant à une boutique, “Non sit peccatum” (ce n’est pas un péché), spécialisée dans la parapharmacie pour la santé sexuelle (herboristerie et accessoires) qui exposait dans sa vitrine des godemichets peints, évoquant la "sainte famille" - Jésus, Marie, Joseph - dans la crèche, œuvres du sculpteur Ernesto Yáñez ; il avait conçu, l’an passé, un dildo en céramique, grande spécialité talaverane (la céramique pas les dildos), baptisé « La lance de Talavera » qui avait obtenu un grand succès. Les membres de cette secte, indignés, ont donc, à maintes reprises, demandé le retrait de ces œuvres.

« Les enfants de Marie » de Talavera se déchaînent

Alternative écologique aux jouets érotiques de silicone ou de plastique, cette lance change la perception du plaisir.

Le seul toucher de ce jouet de céramique de luxe te coupe le souffle. Fabriqué en matières naturelles et recyclables, ce gode artisanal et organique est respectueux de ton corps et parfait pour jouer avec la température. Cette lance est une une œuvre d’art parfaitement sculptée pour la jouissance.

La structure de la surface ultra lisse est dessinée pour stimuler voluptueusement chaque courbe et contour de ton corps. Il se lave à l’eau chaude ou froide et se réchauffe ou se refroidit instantanément.

NB La traduction mot à mot serait plutôt "lancier" que "lance".

Peintures sur céramique

Le plus étonnant dans cette affaire est que les godemichets de céramique  peints avaient déjà été exposés l’an passé ;  bien mis en évidence dans la vitrine, ils n’étaient donc pas passés inaperçus et avaient même eu un écho médiatique au niveau national ; ils n’avaient cependant pas attiré, comme cette année, l’ire de ces néo pharisiens, alors même qu’ils étaient relégués dans un coin de la vitrine. Ils n’ont cessé de harceler le propriétaire de la boutique, depuis leur mise en place le 16 novembre dernier.

Héctor Valdivielso raconte que dès ce jour-là s’est pointé un individu, dans la cinquantaine, se réclamant des « Enfants de Marie » et demandant le retrait de la crèche de la vitrine, en outre, il est resté dans la boutique une vingtaine de minutes récitant des prières à voix haute, à la grande surprise des clients !

Un couple exalté

Ce que Valdivielso prenait pour un acte isolé, dû à un esprit rétrograde et dérangé,  s’est reproduit le jour suivant. Mais du coup, ce fut un couple exalté qui dit avoir reçu par WhatsApp la photo des godemichets avec les dessins évoquant la sainte famille et exigea leur retrait immédiat de la vitrine. Le propriétaire de la boutique leur signala que c’était l’œuvre d’un artiste reconnu et qu’il n’avait aucunement l’intention de les retirer. Il invita le couple à vider les lieux, mais l’homme répondit agressivement que s’il n’enlevait pas ces godes il allait le faire par la force. Si bien que Valdivielso n’eut d’autres solutions que d’appeler la police pour les virer.

Un commando d'enfants de Marie

Le harcèlement a continué. Quelques jours après une délégation, d’on ne sait quelle confrérie, formée de douze femmes et de deux hommes d’âge avancé (« aucun d'entre eux n’est client de mon entreprise », explique le propriétaire), est venue dans le sexshop pour exiger le retrait immédiat des dildos. « Ils sont restés pendant une demi-heure dans le magasin et nous ont menacés de prendre des mesures contre l’entreprise » dit Héctor Valdivielso.

Un des plus étonnés de cette controverse est l’auteur de l’œuvre, Ernesto Yáñez : « C’est une minorité, la majorité de la ville aime cette crèche ». Le sculpteur, d’origine cubaine, mais qui habite Talavera, dit qu’il ne comprend pas que cette œuvre, exposée à la vue de tous depuis trois ans, puisse provoquer tout ce tapage maintenant. « Je ne pense pas qu’elle soit vulgaire ou offensante ».

Mais, au moment où un « Monseigneur » ose invoquer la liberté d’expression, pour défendre des sites anti-IVG qui pratiquent, sans vergogne, la contrefaçon en se faisant passer pour des sites officiels, cette action des culs-bénits ibères nous rappelle celles de leurs homologues gaulois contre des pièces de théâtre ou des expositions !

 

D'après El Plural

 

 

 

 

 

 

L'affaire a eu des retentissements dans la presse nationale :

La Vanguardia se place du côté du commerçant qui dénonce une campagne de harcèlement.

Le très conservateur ABC feint de croire que la polémique est due au « Lancero ».

El País lui est moins hypocrite et montre les objets réels du litige.

De même qu’El diario qui parle explicitement de crèche de Noël avec des godes de céramique (à noter le nom des godemichets en castillan « consoladores » !).

L’Huffington Post parle lui de l’ire catholique contre la crèche-godes.

 

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