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8 juin 2012 5 08 /06 /juin /2012 18:09

Une quiche vert bobo peut-elle poser une question pertinente ? La réponse est oui, on ouvre l’enveloppe and the winner is… Cécile Duflot !

 

 

La question sur le cannabis vient tout au début de l'entretien

 

Que la ministre du Logement soit dévorée d’ego et de « télé-addiction » en fait un être politique normal. Qu’elle flingue son gouvernement avant législatives sans se faire virer sur le champ montre la fragilité de accord électoral PS-EELV. Pourquoi parler du cannabis et de sa légalisation, en provoquant un bal des faux culs tous partis confondus ? Par le goût de se montrer à son public néo-baba ? Peu importe. La question mérite examen, même si elle n’est pas vitale politiquement.

Que veut dire « légalisation » du cannabis ? Quelle différence avec « dépénalisation » ? Si son commerce était légal, vendeurs et acheteurs ne seraient pas poursuivis ? L’état français s’attribuerait l’autorisation et la taxation du produit, comme pour l’alcool, le tabac et les médicaments ? Ou délèguerait-t-il le commerce au privé, comme dans les « coffee shops » néerlandais, d’ailleurs remis en question ? Mais qui achèterait le cannabis, et à qui ? Qui le conditionne et le met en vente ? Qui en fixe le prix TTC ? Qui en contrôle les effets sanitaires et les fraudes ?

 

QUESTION DE QUALITÉ

 

Il y a au moins deux aspects : la morale et la réalité. Pour le premier, quasi-unanimisme : la drogue est mauvaise. Sauf celle qui est autorisée et chère : tabac, alcool, psychotropes, graisses saturées, glucides et régimes à la con, qui  font partie « under control »  du monde officiel et rentable.

kif_champsenterrasse.jpg

Cultures en terrasse dans le Rif

 

 

Le cannabis est-il plus mauvais pour la santé ? Les professionnels de la profession disent oui. Je ne sais pas. Après avoir consommé pendant plusieurs années, et quotidiennement, du kif marocain, je m’estime à un degré de dégradation mentale compatible avec la moyenne nationale (française, évidemment). J’ai arrêté pour ne pas finir ruiné, les prix français m’étant hors de portée pour un produit correct. Évidence méconnue : la mauvaise qualité n’est pas bonne. Ce qui est vrai pour les hamburgers et le poisson pané l’est pour le cannabis, la cocaïne et le reste. Comment assurer la qualité dans la clandestinité ? La réponse de Guéant et Valls est abstinence et répression. What else, dit le (dangereux) café Clooney, au prix exorbitant.

 

UN BOULOT COMME LES AUTRES ?

 

Policièrement, c’est intéressant. Les centaines de keufs qui passent du temps à choper quelques barrettes de shit pour les refiler ensuite à leurs indics (politique du chiffre oblige !), seraient mieux employés dans le vrai renseignement judiciaire, comme les braquages de transports de fonds ou l’anti-terrorisme.

Socialement, ça se discute. Si on légalise la vente du cannabis, avec ou sans monopole d’État, comment vont se nourrir les milliers de familles qui vivent du trafic, entre les gamins qui font les « choufs », les cousins qui dealent et les mamans qui font les paquets ? Une anecdote : dans les années 90, les flics kif-vente.jpgsaisissent près d’une tonne de shit dans une cité de Saint-Denis 93. Les jours suivants, des dizaines de mères de famille sans ressources officielles squattent le bureau d’aide sociale de la mairie pour demander des secours, en cash et tout de suite. Les flics ont arrêté le massacre, à la demande officieuse des élus. Le chômage et la déqualification étaient déjà là.

Autre question sociale, l’aggravation potentielle des trafics. Les dealers de cannabis vont-ils se recycler avec enthousiasme dans la formation professionnelle pour toucher peut-être le Smic en conduisant un chariot chez Auchan, après avoir gagné 150 euros par jour en matant les entrées de cité ? Ou vont-ils se convertir à des activités plus rentables comme le trafic d’organes humains, de Kalashnikov, de putes moldaves ou nigérianes, déjà existantes mais moins développées, ou même de coke fumable et de molécules de synthèse, beaucoup plus dangereuses (et chères) que le shit ?

 

 

 

MORT AUX IRRESPONSABLES !

 

Sur le fond, l’interdiction est aujourd’hui une vision de société. Nous devons beaucoup à toutes les bonnes âmes, droite et gauche mêlées, qui veulent le bonheur du peuple volens nolens, citant à tout va mai 68, l’amour de la vie, l’éducation des enfants, la croissance non productiviste et le principe de précaution. Vous ne vous rendez pas compte que vous avez dépassé les 130 km/h sur autoroute par temps sec et faible trafic ? Trois points en moins, misérable déviant ! Vous avez consommé chez vous et sans modération une bouteille de Chablis sans penser à l’exemple désastreux que vous donnez à vos enfants ? Honte à vous, père indigne ! Étonnez-vous si vous en faites des drogués ! À moins de tuer préalablement votre famille par tabagisme passif !

Vous avez des problèmes de nerfs et de sommeil ? Prenez des benzodiazépines, légales et remboursées ! Ce n’est pas comme votre cannabis, qui détruit les neurones en rendant euphorique ! Vous avez lu « Le nom de la rose » ? Vous avez compris que le rire et la joie sont la mort de la morale sociale ?

Dans le papier « Légalisation du cannabis, sujet tabou ? », à côté d’éléments pertinents, je ne partage pas la proposition « de réunir, dans un climat politique serein, des commissions de consensus* » pour discuter de tout ça. Quand a-t-on vu pour la dernière fois un tel climat ? Plus grave, qui sont les membres de cette commission qui vont décider de ce que je peux fumer, boire, ingérer et penser ? Je revendique la liberté d’information, qui m’avertira si je le souhaite des risques encourus dans l’état actuel de la science. Je revendique la liberté de pensée et d’action, si je ne porte préjudice à personne. Un fait me rassure : les Khmers verts, végétariens buveurs d’eau, moralistes implacables, finissent par mourir, et pas forcément centenaires. C’est rassurant.

 

Gilbert Dubant

 

* Note du déblogueur : Pour le moment, la consommation de cannabis est - en principe - prohibée, donc une commission de consensus tentant de faire des propositions sur ce sujet ne peut pas faire "pire" que de maintenir le statu quo et, au "mieux" permettre, sans l'imposer bien sûr, la consommation d'un produit aujourd'hui interdite. Mais de telles commissions pourraient aussi se pencher sur d'autres questions de société, comme les "mères porteuses", l'euthanasie, qui, pour le moment, ne donnent lieu qu'à des échanges caricaturaux

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7 juin 2012 4 07 /06 /juin /2012 11:16

cohnbenditduflot

Ayrault est en pétard. Valls fulmine. Et Rama Yade a fumé la moquette ! Cécile Duflot, erreur de jeunesse (?), a remis inopportunément la question de la dépénalisation du cannabis sur le tapis.

 

Guaino, le bafouilleur, Bertrand, le gros méchant mou, ont tout de suite clamé : « C’est un désastre moral », «si la gauche l’emporte, il y aura légalisation du cannabis ». Mais la plus comique fut Rama Yade qui dans un amalgame hardi a rapproché cette proposition des Verts, de celles de Peillon sur la notation et les évaluations des élèves, dénonçant une idéologie post-soixante-huitarde qui consiste à donner tous les pouvoirs aux élèves, à dire que l’enfant est roi, à estimer qu’il ne faut pas lui demander d’efforts, que le mérite ne compte pas , « le laxisme éducatif », c’est « le retour de Woodstock dans l’Education Nationale ».

 

Certes, à quelques jours du 1er tour des législatives, ce n’était peut-être pas le moment de remettre cette question-là sur le tapis, même en prenant la précaution de préciser : « Je sais que ce n’est pas la position du gouvernement », ce qu’évidemment la meute UMPiste fait semblant de ne pas entendre.

 

Une répression coûteuse, arbitraire et surtout inefficace

 

Cependant, avec Daniel Vaillant ou François Rebsamen, hors échéance électorale directe, sera-t-il permis de demander à ce qu’on sorte de l’hypocrisie ?

 

La chasse aux consommateurs et aux petits dealers a été plus qu’encouragée par la politique du chiffre imposée par Sarkozy. Quoi de mieux pour les policiers, puisque, avec une seule interpellation, on obtient au tableau statistique : le délit, le coupable et une augmentation du pourcentage des affaires résolues. Elle a autorisé aussi des opérations à grand spectacle, mobilisant des centaines de membres des forces de l’ordre, sous les yeux des caméras, qui, au petit matin, se conduisent dans les quartiers comme une force d’occupation, pour un résultat quasi nul. Au bout du compte, l’économie parallèle, dans ces quartiers, dits zones de non droit, ne s’est jamais mieux portée. La vie des habitants y est toujours et encore pourrie par les petits dealers.

 

En revanche, le trafic global lui-même ne s’est jamais mieux porté : seulement 5 à 15 % des importations de cannabis clandestines sont interceptées. Les mafias locales s’entretuent comme au bon vieux temps d’Al Capone à Chicago. Et le vrai travail policier, consistant à remonter les filières pour les démanteler jusqu’au sommet est négligé, car peu rentable pour la politique du chiffre.

 

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% d'usagers de cannabis de 15 ans et + (la France championne avec le Danemark)

 

Et surtout, la consommation loin de régresser progresse ! D’après l'Observatoire européen des drogues et de la toxicomanie (OEDT) la consommation de cannabis a très largement augmenté chez les jeunes de l'Hexagone : +60% entre 2007 et 2011. La France arrive en première position en ce qui concerne le cannabis, deuxième au niveau des drogues en général. Et c’est dans une période – 2007-2011 – où les procureurs actuels de la gauche laxiste étaient aux manettes !

 

Subsidiairement, la lutte anti-drogue est arbitraire. La mobilisation contre la consommation touche beaucoup moins les sniffeurs de cocaïne que les fumeurs de joints. La possession de cannabis peut être aussi bien jugée comme relevant de la consommation individuelle ou du trafic : ce qui se traduit par des peines très différentes.

 

Addiction, dépendance : deux poids, deux mesures !

 

cannabis  Le camarade – en tout cas le mien qui l’ai côtoyé autrefois au côté de Stéphane Fouks et Alain Bauer, jeunes rocardiens – Manuel Valls, lors des primaires citoyennes, a eu en substance ces propos : l’idée que l’on puisse légaliser le cannabis est insupportable, car le cannabis crée de la dépendance et être de gauche c’est lutter pour la liberté contre les dépendances ! Outre que, contrairement à ce qu’il assène le cannabis ne crée pas de dépendance, sinon psychologique, faut-il lui rappeler que deux drogues, beaucoup plus addictives, sont, elles,  parfaitement légales : le tabac et l’alcool ?

 

Jacques Attali et Martine Perez sont conséquents qui préconisent d’interdire le tabac Mais ils ne poussent pas leur logique prohibitionniste jusqu’au bout. Attali n’ose pas écrire : il faut interdire la production, la distribution et la consommation de … vin ? (citation exacte au dernier mot près). Quant à l’inverse C. Duflot dit : « Il faut considérer que le cannabis, c’est comme l’alcool et le tabac, même régime : une politique de santé publique et de prévention, notamment vis-à-vis des plus jeunes » a-t-elle complètement tort ?

 

En Juin 2011, un rapport d’un groupe de travail PS, présidé par Daniel Vaillant, ancien Ministre de l’Intérieur se situait dans une optique pragmatique : "Il ne s'agit plus de prôner une abstinence illusoire mais de modérer la consommation des Français". Il prônait un certain nombre de mesures concrètes pour une "légalisation contrôlée" pour les personnes majeures qui permettrait, "grâce à l'encadrement de la production et de la distribution", d'"instaurer une politique de réduction des risques". Ce rapport provoqua les cris d’orfraies de la droite (Eric Raoult – celui qui propose Sarkozy comme prix Nobel de la Paix – en tête). Mais au PS, et pas que Valls, certains s’y opposaient. Jean-Marc Ayrault, président à l’époque du groupe PS à l'Assemblée, calmait le jeu, assurant que la question d'une légalisation "contrôlée" du cannabis n'était "pas tranchée" et que, si la gauche revenait au pouvoir, elle organiserait une "commission de consensus pour essayer de dégager des solutions".

 

Les contre-arguments ne sont pas que sophismes à la Valls. La prohibition limiterait malgré tout la consommation ; sa suppression n’éradiquerait pas ipso facto les mafias qui en vivent, puisque le tabac, bien que légal, connaît aussi des trafics, etc.

 

Sera-t-il possible, dans un climat politique serein, de réunir, sur des sujets de société, des commissions de consensus qui, au moins, permettraient de débattre sans outrance et caricature ?

 

 

Pour compléter

 

Rapport de la commission mondiale pour la politique des drogues

Cannabis : Réguler le marché pour sortir de l’impasse Note par Christian Ben Lakhdar, Pierre Kopp, Romain Perez.

Terra Nova Le 19/12/2014

 

 

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