« La chronique, par nature subjective, peut recourir indifféremment à l'ironie, l'humour, l'émotion, l'indignation. Elle se caractérise par un regard original sur l'actualité. » Laurent Greilsamer*, pour se conformer à ces prescriptions de la bible, pardon du style du Monde, use d'un procédé qui, à force, fini par manquer d'originalité. Dans son journal teinté centre gauche, il va prendre fait et cause pour le Président bling-bling (le comparant assez impudemment à P. Beregovoy) ou pour cette pôvre Rachida Dati, avec un art de la victimisation un peu grossier.
La chronique étant par nature subjective, inutile de s'embarrasser d'arguments. La Rolex de l'enfant de Neuilly est assimilée aux chaussettes tombantes de l'ex-ouvrier de la banlieue rouennaise : l'amalgame tient lieu d'émotion ou d'indignation.
Usant du vieux procédé rhétorique de la répétition, notre chroniqueur va dénoncer « la chasse à la Dati », « une chasse aux gros plombs » où, nous les lecteurs, sommes comme les gamins de la cour de récré d'autrefois scandant « Du sang, du sang !»
A la Finkielkraut, il va dénoncer non pas le Syndicat de la magistrature ou l'Union Syndicale des Magistrats, mais « les gens de robe », « le monde judiciaire » pour terminer par une envolée : « Elle rend ivre ses adversaires, de droite et de gauche, qui ne recule devant aucun argument pour lui régler son sort ».
Sa plaidoirie est pourtant, en filigrane, un réquisitoire.
Qu'elle applique, impétueuse et implacable, la politique de Nicolas Sarkozy, mais sans le savoir-faire de son maître (sic) devrait-elle la mettre à l'abri de la critique (ce qui n'empêche pas bien sûr de critiquer d'abord le maître) ?
Les élus qui, sans aucune concertation, voient des tribunaux disparaître dans leur ville, leur département, pratiquent-ils la chasse au Dati en dénonçant cet arbitraire ? La très modérée USM devait-elle accepter sans broncher l'attitude que l'on n'ose qualifier de scandaleuse - pour ne pas être taxé de chasse aux gros plombs - de la garde des sceaux faisant interroger en pleine nuit un magistrat qui ne faisait qu'appliquer ses prescriptions ? Le SM a-t-il tort de dénoncer la loi sur la rétention de sûreté qui permet de maintenir en détention indéfiniment une personne qui a purgé sa peine ?
Le Canard enchaîné doit-il passer sous silence les démissions successives de membres de son cabinet lassés de se faire insulter ? La couverture de Match, en robe de grand couturier, s'impose-t-elle pour la Ministre de la Justice ?
Et la mufflerie, la beaufitude est-elle de gauche quand un de ses collègues du gouvernement clame, sans qu'on ne lui ait demandé, avec un rire gras, qu'il n'est pas le père de son futur enfant ? Les critiques acerbes que l'on prête au conseiller de Sarkozy pour la Justice sont-elles de pures élucubrations ? Quels sont ces gens de gauche qui ne reculent devant aucun argument pour lui régler son sort à notre si vaillante garde des Sceaux ?
Ah oui, j'oubliais, la chronique est par nature subjective. « Sa vocation est d'instaurer une complicité durable avec le lecteur ». M. Greilsamer devrait au moins obtenir la complicité d'une lectrice.
Pour une prochaine chronique nous lui proposons : « Peut-on défendre Brice Hortefeux ? »
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