Un été où la maisonnée a été bien remplie et une nouvelle « bécane » qu’il a fallu apprivoiser m’ont fait délaisser cette rubrique mais non la lecture. Voici donc quelques ouvrages et auteurs que j’ai sélectionnés pendant cette période.
D’abord, une confirmation : Brady Udall
est bien un grand. Après Le polygame
solitaire, j’ai enchaîné avec Le miraculeux destin d’Edgar Mint (10/18 : 9,40 €) qui met en scène
un gamin métis (né d’un père blanc -et absent- et d’une mère apache -et alcoolique-) Orphelin, rescapé -avec des séquelles
handicapantes- d’un terrible accident, il est ballotté de l’hôpital
à l’orphelinat et à la famille d’accueil, de la cruauté enfantine à l’ambiguïté du médecin qui l’a tiré d’affaire, sans guère rencontrer reconnaissance ou affection. Mais le récit n’est ni
misérabiliste ni pleurnichard, il est très tonique, souvent teinté d’humour féroce et on s’attache à ce drôle de petit bonhomme, un peu barboteur, qui
s’accroche à la vie comme à son antique machine à écrire et à son surprenant « doudou ». Du même auteur, je recommande chaudement aux amateurs de nouvelles le recueil Lâchons les chiens (10/18 : 7€) première œuvre d’Udall, bourrée de pépites.
Ensuite, trois découvertes :
1. L’auteur
norvégien Jo Nesbo, avec Le
léopard (Gallimard : 21€) un gros thriller bien saignant qui entraîne le lecteur de Hong Kong aux montagnes norvégiennes et aux volcans africains
en compagnie d’Harry Hole, flic alcoolo et toxico sur fond de guerre des polices ; ça peut paraître caricatural mais c’est bien ficelé (un peu trop barbare toutefois à mon goût) et la
psychologie du héros est plus complexe que prévu.
2. L’auteur
nord-irlandais Robert Mc Liam Wilson pour Eureka street publié en 1996 et offert par 10/18 pour deux bouquins achetés, une aubaine !
(Prix en librairie : 8,60€). La quatrième de couverture est éloquente :
C’est un bouquin truculent en dépit des circonstances mais non dépourvu d’émotion, un hymne à l’amitié interconfessionnelle et à
Belfast. Une réserve cependant : la traduction française m’a paru parfois laborieuse.
3. La
réputation de Michael Connelly n’avait pas encore suscité ma curiosité. J’ai ouvert La défense Lincoln (Points : 8€) sur un transat
gadiri et je dois avouer que j’ai été captivée par ce thriller judiciaire. Le héros, Mickey Haller, est en effet un avocat
californien, voué aux causes minables, qui se voit enfin proposer une
défense juteuse. L’intrigue est très bien conduite mais ce que j’ai surtout apprécié, c’est d’y voir décortiquer le fonctionnement surprenant de la justice étatsunienne au moment où l’affaire que
vous savez occupait nos médias.
A présent, un coup de
cœur : il va à En
avant, route ! (Folio : 6,80€) d’Alix de Saint-André. Ce petit livre relate les trois
pèlerinages que la journaliste-écrivaine a effectués à Saint Jacques de Compostelle. C’est très alerte, pétri d’humour, plein d’enseignements sur les rapports humains et surtout, dénué de tout
prosélytisme.
Terminons par le Goncourt. J’ai achevé la (longue) lecture de L’art français de
la guerre (Gallimard* : 21€) d’Alexis Jenni la veille de l’attribution du prix. Le propos en est assez simple : un ancien engagé (par
hasard) de la « guerre de vingt ans » (Résistance, Vietnam, Algérie) confie au narrateur le soin de rédiger son histoire en échange d’une initiation au dessin à l’encre qu’il maîtrise
parfaitement. Mais le narrateur -doux glandu difficile à cerner- ne se contente pas de rapporter le parcours de Victorien Salagnon : il alterne comme un métronome les
séquences « ROMAN » qui évoquent les guerres de Salagnon et des « COMMENTAIRES » qui sont comme un prolongement, un écho de l’Occupation (la queue dans une pharmacie de garde)
ou des guerres coloniales dans la France contemporaine. Certes, cela justifie le titre mais autant le récit des mémoires de Salagnon sauvé par son art sonne juste (rythmé, bien
documenté, bref convaincant) autant les « COMMENTAIRES » souvent répétitifs, alourdis par un style ampoulé me semblent rater leur cible. Dommage ! L’auteur m’a paru éminemment
sympathique dans ses interviews.
* Comment Gallimard, qui passe pour un éditeur sérieux, a-t-il pu laisser estropier ainsi une conjugaison (p. 200) : « Salagnon se rencoignit » ?
PS Un grand merci à P. Bouchard pour avoir signalé le livre d’Ali Magoudi dont je termine la lecture enthousiaste.