Les révélations du « Canard enchaîné » sur la rénovation onéreuse (105 000€) de l'appartement de fonction* et du bureau (62 000 €) de Thierry Le Paon, puis, cerise sur le gâteau, la pire peut-être, de cette incongrue indemnité de départ de plus de 25 000 € versée par la CGT de Basse-Normandie, ne lui sont pas tombées du ciel, au volatile ! Sans être un grand investigateur, on ne peut qu’être sûr que la source gravite autour de l’immeuble de la CGT à Montreuil. Et ce n’est pas déployer des trésors de perspicacité que de subodorer que le but de ces fuites est de dégommer Le Paon.
Ce faisant, le sniper s’est servi non d’un fusil à lunette mais d’un obusier aux dégâts collatéraux incommensurables.
La CGT, dans son ensemble, y perdra des plumes. Si, hypothèse douteuse, Le Paon se maintient, il n’aura plus ni crédibilité externe, ni autorité interne. S’il est poussé vers la sortie, son successeur aura une légitimité des plus fragiles, car ne devant son siège qu’aux fuites assassines.
Ce ne sont pas tes oignons, va-t-on me rétorquer. Sauf que, ces révélations vont nourrir un poujadisme déjà virulent. Même si les sommes annoncées sont sans commune mesure avec celles de Bygmalion, même si l’insolite indemnité ne paierait même pas les cigares annuels d’un Balkany, cela va permettre, permet déjà, aux beaufs de comptoir d’entonner le chœur fameux des Tous pourris, même les syndicats.
Et cela dans un contexte où les ouvriers, même syndiqués – hélas une minorité – se laissent tenter par les sirènes de Marine. Au-delà de brebis galeuses, comme le maire d’Hayange, cégétiste passé au F-Haine, une majorité des ouvriers qui ont voté aux européennes ont opté pour les listes F-Haine. Plus de 40 % donc des votes ouvriers, cinq fois plus que pour le PS ou le Front de Gauche (8% chacun). Il faut certes relativiser, puisque plus de 60 % des ouvriers sont restés chez eux. Mais ce n’est guère moins inquiétant car une telle démobilisation profite aussi aux Le Pénistes.
Il est donc des plus probables que l’affaire Le Paon ne va que renforcer la dérive d’une fraction grossissante de l’électorat ouvrier vers l’extrême-droite. Et fraction qui revendique publiquement son ralliement.
Eh quoi ? Fallait-il donc que les opposants à Le Paon manquent au devoir suprême de transparence en ne faisant pas fuiter les trop luxueuses dépenses de leur secrétaire général ? Outre que ces blancs chevaliers avancent dans l’ombre ce qui entache un peu leur vertueuse opération, il faut rappeler que le linge sale ne se lave qu’en famille.
Et un Pierre Héritier qui, profitant du cinquantième anniversaire de la CFDT, laisse entendre – sans preuve aucune – que l’élection de Nicole Notat en 1988 ressemblait à celle de Copé en 2012, porte aussi un très sale coup au syndicalisme.
Qui n’en a pas besoin.
* Travaux confiés à une entreprise dont le patron est proche de l’UMP et qui semble s’être fait une marge juteuse.
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