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11 novembre 2008 2 11 /11 /novembre /2008 16:06

  Cap au Nord ! Malgré une prédilection assumée pour les auteurs « latins », j'avoue une grande admiration pour le Suédois Henning Mankell dont je ne rate aucune des enquêtes de l'inspecteur Wallander, admiration qui s'est encore accrue à la lecture de Profondeurs qui s'éloigne de ses romans policiers (quoique...)

 

Nous sommes en Suède à l'automne 1914. Le capitaine Lars Tobiasson-Svartman , hydrographe de talent, embarque sur la Baltique (où se cherchent Russes et Allemands) pour une mission secrète : sonder les fonds pour établir une nouvelle route militaire maritime au cas où le pays serait entraîné dans la guerre. Au cours d'un repérage en solitaire, il découvre sur Halsskär, un îlot réputé désert, une jeune femme, Sara Fredrika qui lui inspire à la fois attirance et répulsion. Pourtant, à son retour sur le Blenda, il déclare au commandant : « Rien. Il n'y avait rien »

 

Tout bascule alors dans une frénésie de mensonges pour satisfaire le « besoin impérieux de retourner sur l'îlot ». Pour justifier ses va-et-vient entre la capitale et sa destination secrète et pour sauver les apparences, Tobiasson-Svartman  ment à sa femme, ment à sa hiérarchie, ment avec cynisme à Sara Fredrika devenue sa maîtresse. Il est servi dans son entreprise par son obsession du contrôle - contrôle des profondeurs, bien sûr, avec sa sonde ô combien symbolique qui ne le quitte jamais, contrôle du temps, des distances, des vitesses, de ses comptes, contrôle de soi et des autres - et sa propension à la dissimulation, au sens propre comme au figuré. Ce qui n'exclut pas des accès de sauvagerie quand il risque d'être percé à jour ou que des obstacles surgissent. Il s'avoue finalement qu'il « avait poursuivi la distance au lieu de rechercher la proximité ». « La plus grande distance à laquelle je dois me mesurer, c'est celle qui me sépare de moi-même »

 

Comment expliquer alors la vertigineuse fascination qu'exerce ce sombre roman dont on sait très vite que l' «anti-héros » va vers le naufrage ? Le cadre y concourt : les descriptions de la Baltique et de ses îlots rappellent certaines séquences des films de Bergman (c'était le beau-père de Mankell) ; l'évocation de l'enfance de Lars, celle du carcan des conventions sociales (en particulier la scène du dîner familial de Noël), distillées fort à propos dans la narration contribuent à cerner la personnalité du capitaine ; enfin, on ne peut  à aucun moment oublier l'arrière-plan de la guerre, sa barbarie, la position pour le moins ambiguë des responsables militaires suédois.

 

Par un des maîtres du polar suédois, voilà donc un formidable roman noir (à déconseiller aux dépressifs !!!) conduit comme une enquête, sur l'identité d'un personnage en quête de sa propre identité, ligoté par ses mensonges et qui lâche comme par mégarde ce vers d'un poète suédois :

 

« LA LIBERTE EST TOUJOURS EN FUITE »

 

Profondeurs (Henning Mankell Editions du Seuil 2008)

Note précédente : La chrysalide (MLF 4)

 

 

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commentaires

S
Quel bonheur de te retrouver aprés plus de 22 ans sans news . Tellement de souvenirs avec vous deux ....Trouveras tu comment j ai retouvé ta trace Jean Francois ????
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