De Lionel Jospin à Helmut Newton, quoi de commun ? Rien, si ce n'est, peut-être un visage très charpenté.
Né le 31 octobre 1920, à Berlin, d'un père juif allemand et d'une mère américaine, il devint dès seize ans l'apprenti de la photographe Else Simon, dite Yva. Fuyant l'Allemagne nazie en 1938, il se retrouve d'abord à Singapour, avant d'émigrer en Australie. En 1947, il y rencontrera une actrice, June Brunell,, qui deviendra sa femme et une grande photographe sous le nom d'Alice Springs.
Quand il s'installe à Paris, en 1956, il a déjà travaillé pour le magazine Playboy. Photographe de mode, pour Vogue notamment, il innove en installant les mannequins dans des décors naturels.
L'admirateur d'Yves Saint-Laurent produit des nus d'un érotisme glacial, pour autant que les deux mots soient compatibles. Souvent pris en contre-plongée, grandes silhouettes parfois gigantesques (ses « grands nus » d'un ouvrage baptisé Sumo), avec de forts contrastes comme inspirés des films expressionnistes allemands. Bien qu'ayant fui le nazisme, on trouvera dans ses portraits de célébrités Leni Riefenstahl*, la cinéaste du 3e Reich ou Jean-Marie Le Pen (mais il le fait poser avec ses chiens, en écho d'un célèbre portrait d'Hitler).
Parfois, comme inspiré de sa courte expérience du photo journalisme dans un journal de Singapour, ses photos semblent tirées d'un fait-divers ou de la traque des paparazzis. Ainsi de cette série de photos, au style très noir, type roman-photo policier (une veste de policière est présente sur la plupart des photos), dans un bureau puis une chambre sordides que l'on verra dans le petit montage.
* Laurent Dispot, éminent germaniste qui, avec violence, voulut nous faire prendre le Dalaï Lama pour un crypto nazi, a été le traducteur d'un livre de Leni Riefenstahl sur les Noubas (1976). Elle fut pourtant la réalisatrice d'au moins trois films de propagande nazi (deux sur les rassemblements de Nuremberg, le troisième sur les jeux olympiques de Berlin en 1936). Bien qu'elle se soit défendue d'avoir appartenu au parti Nazi, elle proclamait : « Pour moi, Hitler est le plus grand homme qui ait jamais vécu. Il est vraiment parfait, si simple et en même temps tellement plein de puissance masculine... Il est vraiment beau, il est brillant. Il est radieux. » Bien sûr, les Noubas du Soudans sont bien loin des Dieux du stade de 1936, mais bien moins que le boudhisme Tibétain l'est du nazisme, avec lequel il n'a aucun point commun (si ce n'est dans l'imagination délirante de M. Dispot).
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