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21 août 2015 5 21 /08 /août /2015 16:27
LE SENS DE LA RÉPUBLIQUE

La loi Taubira sur l’esclavage taxée d’anachronisme, l’espace Schengen à quitter, les nounous à voiler et le cochon à imposer dans les cantines scolaires : Patrick Weil, fermement mais sereinement, recadre des débats hystérisés. Et il remet l’identité nationale dans le cadre des valeurs républicaines qui la fondent.

Ne serait-ce parce qu’il met clairement les points sur les i sur la loi dite Taubira sur l’esclavage, l’essai de Patrick Weil mériterait d’être lu.

 

La loi du 21 mai 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité votée à la quasi-unanimité proclame dans son article 1 « La République française reconnaît que la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l'océan Indien d'une part, et l'esclavage d'autre part, perpétrés à partir du XVe siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l'océan Indien et en Europe contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l'humanité. »

Olivier Pétré-Grenouilleau,  historien, dans un entretien accordé au Journal du dimanche du 12 juin 2005, dénonce « le problème de la loi Taubira qui considère la traite des Noirs par les Européens comme un "crime contre l’humanité", incluant de ce fait(sic) une comparaison avec la Shoah. Les traites négrières ne sont pas des génocides. (…) Le génocide juif et la traite négrière sont des processus différents. Il n'y a pas d’échelle de Richter des souffrances.» Déclaration qui aurait dû surprendre par son étonnant manque de rigueur de la part d’un historien qui assimile crime contre l’humanité et génocide (mot totalement absent du texte de loi) et qui, à partir, de cet amalgame qu’on espère involontaire, a beau jeu de montrer que la traite n’était évidemment pas un génocide, puisqu’il s’agissait de se pourvoir en main d’œuvre traitée comme du bétail. Attaqué par un collectif « Antillo-Guyanais-Réunionnais », il est soutenu par une association, Liberté pour l’histoire, créée pour l’occasion par Pierre Nora avec 18 autres historiens dont Jacques Julliard, Mona Ozouf, Antoine Prost.  Sans plus relever le douteux amalgame, ils font un procès en anachronisme à la Loi Taubira : « L’historien ne plaque pas sur le passé des schémas idéologiques contemporains et n’introduit pas dans les événements d’autrefois la sensibilité d’aujourd’hui. » Et Françoise Chandernagor maintient même implicitement l’amalgame en affirmant que « les concepts de crime contre l’humanité et de génocide sont récents ».

1794 : l’esclavage est déclaré crime de lèse-humanité

  Or P. Weil montre « qu’ils ont historiquement tort » ! Le 27 avril 1848, le gouvernement de la République Française abolit définitivement l’esclavage. Le décret d’abolition déclare l’esclavage crime de lèse-humanité et tout Français qui serait encore coupable ou complice d’esclavage serait déchu de sa nationalité. Victor Schœlcher justifie cette déchéance de nationalité  en expliquant que le décret « veut que le Français, en quelque pays qu’il réside, abdique le honteux privilège de posséder un homme : la qualité de maître devient incompatible avec le titre de citoyen français ». Dès la 1ère abolition de 1794 – annulée par Bonaparte – l’esclavage était déclaré crime de lèse-humanité.

 

Qu’un Olivier Pétré-Grenouilleau, historien spécialiste de la traite des noirs, que ma chère Mona Ozouf, aussi hélas, historienne avec F. Furet de la Révolution, qu’un Antoine Prost ou un Jacques Julliard, aient contribué à m’induire en erreur sur ce prétendu anachronisme qui reprenait la notion de crime lèse-humanité vieille de plus de deux siècles et contemporaine des deux abolitions de l’esclavage, me navre absolument.

Immigration et espace Schengen

Le spécialiste des questions d’immigration remet aussi les pendules à l’heure sur ce sujet si hystérisé.

 

Ainsi montre-t-il comment Christophe Guilly manipule les chiffres de l’immigration en comptant deux fois les étrangers régularisés comptabilisés  avant en irréguliers, ainsi que les étudiants entre temps repartis chez eux.

 

Il montre aussi comment les primes au retour aux Bulgares et Roumains –idée ô combien géniale de Sarkozy – avait attiré les Roms : une telle disposition leur offrait la certitude que, quand ils voudraient rentrer chez eux, le voyage de retour serait pris en charge avec une prime (en 2008 le salaire moyen en Roumanie était de 194 € mensuel, la prime 300€ par adulte, 100€ par enfant).

 

Il rappelle également que l’espace Schengen, s’il a été initié sous Mitterrand en 1990, a été concrétisé par Pasqua ! Les accords de Schengen stipulent que le pays par lequel entrent les étrangers assure le contrôle. Pour la France, quand l’immigration se fait par la terre, il y a toujours un ou plusieurs pays qui contrôlent avant. Et au lieu de mobiliser de la police aux frontières, ces accords libèrent des policiers pour de possibles contrôles sur tout le territoire.

Halal et cantine, voile et nounous

 

Face aux adeptes – Sarkozy en tête faut-il le rappeler ? – de la cochonnerie de batterie pour tous, donc de l’expulsion de fait des enfants musulmans ou juifs des cantines, P. Weil rappelle sereinement que 80% de la nourriture commune est aussi halal et casher : les légumes, les fruits, les oeufs, la plupart des poissons. Donc pourquoi ne pas baser d’abord les menus sur ce fond commun ? et proposer une option végétarienne quand on inscrit du porc au menu. Une option que propose aussi Yves Jego  dans une pétition POUR UNE ALTERNATIVE VÉGÉTARIENNE OBLIGATOIRE DANS LES CANTINES SCOLAIRES, Jégo ex-secrétaire d’état de Fillon, difficilement soupçonnable de communautarisme échevelé !

Même position d’apaisement quant aux mamans voilées – c’est-à-dire portant un fichu sur la tête – qui accompagnent les enfants en sorties scolaires. Reprenant l’arrêt du Conseil d’état qui spécifie que le parent n’est pas soumis au devoir de neutralité qui s’impose aux enseignants et que donc ces mères ne peuvent être écartées qu’en vertu d’exigences liées au service public de l’éducation nationale (et bien sûr pour prosélytisme), il note que des conflits d’interprétation peuvent se produire. Et qu’ils sont normaux. 

L’exemple du conflit de la crèche Baby-Loup où la chambre sociale de la cour de cassation cassait le licenciement, alors qu’ensuite l’assemblée plénière l’approuvait, le démontre.

Et il ironise sur une proposition de loi de la sénatrice Laborde visant à instaurer une obligation de neutralité dans les crèches privées et jusqu’aux assistantes maternelles à domicile ! Pas de nounous en fichus ! « Les parents peuvent vouloir une nounou qui soit neutre sur le plan religieux » « Je pense que les parents veulent en général des nounous qui s’occupent de leurs enfants avec tendresse, affection et professionnalisme, indépendamment de leur couleur de peau, de leur religion de leur accoutrement » répond-il.

Comme disait Jacques Julliard autrefois, j’ai fait une lecture symptomale de ce sens de la République qui vaut surtout par son approche de l’identité nationale, dans cette dialectique du pareil et du différent : traitement de tous les citoyens de façon égale, indifférenciée, par les administrations, l’école, la police, les employeurs, etc. et respect voire la reconnaissance de [leur] diversité.

LE SENS DE LA RÉPUBLIQUE

Le Petit Journal

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