Aurier à bannir à vie ! Benzema : une affaire d’état ! Tout ce qui est excessif est insignifiant, disait Talleyrand. Beaucoup de journalistes – et pas que sportifs – font assaut d’insignifiance.
Or donc, pour les ceusses qui ne suivent pas trop l’actualité fouteuse, précisons que le jeune Serge Aurier, joueur du PSG, sur « Periscope », avec un complice fumant un narguilé, pardon chicha, avait non seulement traité quelques collègues de guez (nuls) mais surtout, crime de lèse-coche, traité Laurent Blanc, son entraîneur, de fiotte. Il croyait – l’innocent ivoirien - que ce Periscope n’était vu que par quelques interlocuteurs et ne laissait pas de trace. Evidemment, ce fut enregistré par un participant et fort sympathiquement diffusé urbi et orbi.
Tout cela n’eût mérité que quelques coups de pieds au cul de la part des insultés ou des dizaines de pompes en bramant « Pourvu que ça dure, c’est la vie de château », mais les châtiments corporels sont interdits, même dans le foute (sauf sur le terrain et en dehors du regard des arbitres). Au lieu de ça un déchaînement dont 20 h foot sur I-Télé fut notamment l’écho : le bannissement à vie* était la moindre des sanctions. Touche pas à ton coche ! clamait le chœur des indignés. Choeur qui, cependant, ne dépassait guère le cercle des journalistes spécialisés, dans les medias.
Rien à voir donc avec le tsunami – cliché employé ad nauseam – de l’affaire Benzema !
Images de vacances en 2013 : avec un chapeau Valbuena, puis vers la droite Gomis et Benzema
Si on reprend l’histoire, il y en a déjà un qui doit regretter de s’être fort civiquement adressé à la police, c’est la victime du chantage, Valbuena. Car pour le traitement discret de son affaire, il repassera.
Or donc, ayant changé de téléphone mobile, il a confié le transfert des données du mobile ancien au neuf à un parasite marseillais, un peu homme à tout faire des joueurs. Ce parasite a prétendu avoir découvert et copié une sextape – entendez, si vous débarquez d’une autre planète et n’avez jamais entendu parler de sextape, une petite auto-vidéo sur une partie de zizi-panpan avec sa partenaire - sur le mobile ancien. Et avec deux complices, il a donc entrepris de faire chanter le petit international.
Idée pas si stupide que cela, un des policiers chargé de l’enquête se fait passer pour le chargé d’affaire de Valbuena. Sauf qu’au lieu de confondre les trois pieds-nickelés et de boucler cette minable affaire en pas plus de temps qu’elle n’en méritait, notre policier va lambiner. Les minables maîtres-chanteurs vont chercher à joindre leur victime par un autre intermédiaire. Et c’est ainsi qu’ils vont tomber sur un autre parasite, mais lui voué au seul Benzema, un ami d’enfance.
Les calvitos (chauves) ironisent sur l'affaire Benzema :
Le Benzema il est cousu de pèze, il gagne des millions, il va pas se salir pour 150 000 euros ! dit celui de gauche.
Impossible ! ce serait comme si un dirigeant de banque, garni de thunes, gagnant des millions, se commettait à payer son parking avec une carte de crédit "au noir" ! T'imagines ? répond le deuxième;
Hahaha ! conclut celui de tête
Traduction très approximative. La "tarjeta black" fait allusion à un scandale qui a concerné des dizaines d'administrateurs des banques Caja Madrid et Bankia : ils bénéficiaient d'une carte de crédit, en principe pour régler leurs frais de représentation, mais qui servait en fait à tous leurs frais personnels et familiaux, jusqu'à 60 000 € annuels, revenus "au noir" non déclarés !
Police, Justice travaillent à ciel ouvert !
Qu’a dit Karim à son collègue Mathieu dans une chambre de Clairefontaine à un rassemblement de l’équipe de France, on n’en saura que ce que Karim conte lui-même à l’autre Karim, le copain d’enfance, car ils sont sur écoutes. Entre autres gracieusetés, il traitera son coéquipier de tarlouze et, de cet échange, à la syntaxe hardie, il ressortait qu’il proposait à Valbuena de le mettre en relation avec ledit ami – « tu veux régler tes histoires, donne ton numéro, je lui donne et tu vois avec lui » - mais que « s’il veut pas, bah laisse, il va se démerder avec ces piranhas. » Ce qui vaut donc à notre avant-centre du Real, après 24 h de garde à vue, une inculpation de complicité de tentative de chantage et participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement !
Et bien sûr, la retranscription de l’écoute policière de cet échange entre Zenati – l’ami – et Benzema se retrouve miraculeusement à Europe 1 et à L’équipe. Plus tard, ce sera le PV de l’audition de Benzema par la juge d’instruction qui arrivera du coup à Lhomme et Daviet, les grands journalistes d’investigation du Monde !
Que des journalistes sportifs se transforment en procureurs implacables ne surprendra que ceux qui n’assistent pas au retournement à 180° entre un match aller minable en éliminatoires pour une coupe du monde et un retour flamboyant : d’indignes les joueurs devenaient des Zhéros avec un Z très majuscule (n’est-ce pas Pascal Praud ?).
Que les hyaineux qui pullulent sur les réseaux plus asociaux que sociaux se déchaînent contre le beur, rien que d’hélas prévisible.
Mais que le premier ministre lui-même vienne y mettre son grain de sel est assez affligeant.
En tant qu’ex-ministre de l’intérieur, il ferait mieux de s’interroger sur ces policiers, non seulement incapables de boucler une affaire simple en quelques semaines, mais faisant fuiter les PV en toute impunité. Et les citoyens que nous sommes, au lieu, pour certains, de se focaliser sur le degré de bêtise et de culpabilité du joueur inculpé, feraient mieux de prendre conscience que l’encombrement de la justice tient aussi des juges eux-mêmes : faut-il des mois d’instruction pour régler une minable affaire de chantage ?
Quant à savoir si le galopin d’Aurier doit rejouer dans son club, le coche a tranché : il a joué ; pari risqué, pari perdu ; et Paris en mauvaise posture. Quant à cette caillera de Benzema, le problème de sa sélection ne se poserait guère s’il jouait aussi bien en équipe de France que dans son club. Le plus souvent, ce fut loin d’être le cas et, contrairement à Valbuena qui se dépense, lui, il donne l’impression d’y traîner son ennui, sur le terrain...
* Ce bannissement à vie a provoqué une réaction indignée de François Pinet
Exagération toute relative car sur le plateau il était bien question de ne plus faire jouer du tout le jeune homme au PSG.
A noter que F. Pinet, qui prend la mouche, n'a jamais joué au procureur et que P. Praud, l'animateur, s'il s'est lancé dans un délire anti-Benzema, a été au contraire très modéré sur le cas Aurier, le ramenant à une gaminerie.
PS Aurier, bien sûr, porte la responsabilité de l'échec du PSG en quart de finale - l'équipe va jusqu'à écrire que Blanc s'est trompé tactiquement et moralement en le retenant lors des deux rencontres avec Manchester City - du journaliste sportif en moraliste !
Et le Karim lui est éliminé de l'Euro au grand plaisir de nos autres moralistes style Bruno Roger-Petit - il faudra quand même qu'il se relise car il me semble qu'il a affirmé que le vilain Le Graet, Président de la fédé de foute, était prêt à tout pour sauver le soldat Benzema - ou Pascal Praud !
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