Dans les grands classiques, il y a la dénonciation de la « pensée unique » de la « bien pensance », des
« bobos », de la « gauche caviar », du « droit-de-l’hommisme » et j’en oublie. En général, le Nel Obs est considéré comme, un peu, le journal
officiel de ces bobos, bien-pensants, etc.
Mais dans les grands classiques aussi, il y a le jeu du chamboule-tout* !
Les kermesses laïques et cathos ayant disparu, il faut rappeler ce jeu qui consistait à viser des caricatures de célébrités avec des grosses boules de tissu : avec suffisamment de force,
elles tombaient.
Pour le Nel Obs, en l’occurrence télé Obs (14/04/11), inutile de mettre en cible, par exemple, Jean-Pierre Pernaut : les bobos lecteurs, que nous sommes par définition, ne voient Pernaut que dans les zappages. En revanche, se payer le Petit journal, alors là coco ça va nous les secouer nos lecteurs.
Pour secouer, ça secoue, avec un premier article néo-poujadiste de la meilleure encre. « Le tout communication » apprend-t-on
serait « devenue la derniére idéologie de politiques ayant abandonné toute idéologie ». Passons sur « le très bling-bling Grand journal » où la séquence Yann
Barthès est « devenue le programme phare d’un paf qui s’ennuie ferme » bien que dans le genre clichés in-signifiants ça fasse fort. Mais on retrouve la veine
du papetier de Saint-Céré avec « le niveau de la classe politique française, désespérante de conformisme, de reniement et de couardise ». Est cité au passage, un politologue
anonyme, pour épingler « les médias traditionnels » et leurs « rubricards ». Mais un maître penseur, Michel Crépu est cité nommément qui juge ce Petit
journal « manipulateur ultraprotégé par l’image médiatique. En réalité, contributeur de l’abêtissement général ». Il ajoutera, sublime, « avec leurs méthodes, ils
vous discréditeraient Proust en moins de deux ». Que vient faire Proust, dans l’affaire ? il n’y a que Crépu, esprit supérieur, à le savoir.
L’article suivant va d’abord nous expliquer que ce Petit Journal plaît beaucoup à Marine Le Pen (qui le poursuit en justice). Est mentionné, quand même, au passage le discours sur l’agriculture de celui qui fait président, répété au mot près d’un lieu à l’autre. Mais ce n’est pas un exemple unique, et la journaliste ne nous dit pas si Sarkocescu apprécie vraiment Yann Barthhès !
Mais le summum est atteint par le PENSEUR du Nel Obs, Jean-Claude Guillebaud. Un penseur très profond, tant ses propos sont
creux ! Il va donc dénoncer « le recours généralisé à la dérision** » cette « pluie acide qui cingle continûment le citoyen, le fustige et lui enjoint – sous
peine de ringardise – de ne rien prendre au sérieux » Dans le poncif pompeux, il ne recule devant rien, l’éditorialiste. Sauf que, mise à part quelques petites niches d’humour ou de
comique (pour ne prendre que France Inter, 3 mn journalière le matin, plus, s’agissant de politique, quelques minutes supplémentaires chez Bern, à la télé, à part Canal +, peut-être « Mon
œil » le samedi sur France 2, qui ne donne d’ailleurs pas dans la dérision) où est-ce donc qu’il a vu ce recours généralisé à la dérision ? Mais une fois lancé, plus rien ne
l’arrête : la dérision est « un rituel mimétique », la Torah est convoquée, les démocraties populaires invoquée, Bourdieu bien sûr ne manque pas à l’appel :
« la dérision est porteuse de « violence symbolique » Et le penseur se mord la queue en reprenant, in fine, la fausse affirmation du début sur la dérision « qui
tombe sans arrêt sur les ondes ou colonise les écrans ».
Ce dossier est, de fait, bien dérisoire. Faut-il rappeler à ses auteurs que personne n’est obligé de subir « la pluie acide » du Petit Journal, même si l’émission est en clair ?
* Jeu auquel s’est adonné le billetiste sportif de Libé en se payant le Barça, croyant ainsi se la jouer celui à qui on ne la fait pas !
** Remplacez dérision par satire, noble genre, et la chronique fait pschitt !