Décidément, le temps est propice à la découverte de documents. Après les archives inédites du Duc
de Saint-Simon, je viens de
retrouver dans un collège de Saxe dont je tairai le nom, à la demande des son Oberdirectrice, cette correspondance d'une jeune Française tenue entre avril et mai 2007 et qui est susceptible de
vous intéresser.
Yoland Simon
Docteur en historiologie contemporaine
Coralie à Veronika,
Notre maîtresse nous a dit que nous étions assez grandes pour avoir une correspondante. Elle nous a donné des adresses J’ai choisi la tienne parce que j’ai trouvé que Veronika, c’était très joli. Moi je m’appelle Coralie. Je ne sais pas si tu trouves ça joli. J’aurais mieux aimé m’appeler Mathilda qui est le nom de ma meilleure amie. J’espère que tu vas le devenir aussi. Même si mon grand frère qui s’appelle Patrick dit qu’une meilleure amie on n’en qu’une. Mais ça, c’est pour m’embêter.
Coralie à Veronika,
Ici, en France, on a un gros problème parce qu’il faut qu’on élise un nouveau Président. Maintenant y’en a plus que deux qui peuvent l’être. Une femme qui est jolie et qui s’appelle Ségolène et qui aussi est assez grande. Mais beaucoup de gens disent qu’elle n’aurait pas la stature. Et puis, il y a un homme qui s’appelle Monsieur Sarkozy qui est plus petit mais qui lui l’aurait la stature. Je ne sais pas trop ce que ça veut dire cette histoire de stature et pourquoi c’est le plus petit qui l’a, et pas la dame. On m’a dit que chez toi, c’est une femme qui est la Présidente et que, elle, elle l’a la stature. Et mon père, il dit que ça prouve bien que c’est pas une question d’homme ou de femme pour choisir le Président.
Coralie à Veronika,
Tu me dis que tu as vu dans Le Bild, le journal de ton pays, une photo de Ségolène et qu’elle est bien plus jolie qu’Angela qui est la chef de chez vous. Peux-tu m’envoyer une photo d’Angela et puis une de toi aussi ?
Coralie à Veronika,
Hier, il y a eu un grand débat à la télévision entre les deux qui veulent devenir Président. D’abord, ils ont dit que c’était la femme qui avait gagné, mais aujourd’hui, ils ont demandé aux Français, des sondages, ça s’appelle, et on a bien vu que c’était Monsieur Sarkozy qui était le vainqueur parce que Ségolène, elle avait été trop méchante avec lui. Et mon père, il a redit que ça prouvait bien qu’elle n’avait pas la stature, la péronnelle. Péronnelle, je sais pas non plus trop ce que ça veut dire, mais je trouve ça plutôt joli. Et toi ?
Coralie à Veronika,
Quelle journée ! Les Français, ils ont voté, hier, dimanche exactement comme ils ont dit qu’ils allaient le faire dans les journaux et c’est Monsieur Sarkozy qui a été choisi. Le soir, il était très content. À Paris, il y avait plein de monde sur une place qui criaient tous qu’ils étaient contents, eux aussi. Sur l’estrade, il y avait les meilleurs chanteurs du pays et que tout le monde connaît, même ma grand-mère. Il y en a un qui s’appelait Enrico qui est un nom espagnol parce qu’il vient d’Algérie. Il a chanté Mon Dieu qu’elles sont jolies, les filles de Sarkozy, même que c’étaient pas ses filles, mais comme il s’en était beaucoup occupé, c’était pareil. Après le nouveau Président, il est allé au restaurant, je me rappelle plus le nom, mais il paraît que c’était un bon. La dame qui avait été battue, elle avait l’air assez content, elle aussi. Là, ça prouve, il a dit mon papa, que vraiment, elle avait pas la stature.
Coralie à Veronika,
Il paraît que le nouveau Président, il faut qu’il se repose parce que c’était une chose importante de l’avoir été élu, Président et qui faisait même presque peur. D’abord on a pensé qu’il irait dans un monastère. C’est comme une sorte de grande église avec des gens qui sont des sortes de curés et qui sont là pour prier parce qu’il n’y a rien d’autre à faire et même pas la télé. Mais c’est peut-être pas une bonne idée parce que les monastères, c’est plutôt pour ceux qui s’occupent du Bon Dieu et du Petit Jésus et qu’ont pas peur de s’ennuyer.
Coralie à Veronika,
Oh la la ! Quelle histoire encore ! Notre Président que tout le monde maintenant il appelle Nicolas qui est son petit nom, on ne savait plus où il était. Il était parti sur la mer dans un grand bateau qu’on lui avait prêté et où il pouvait réfléchir sans être embêté par trop de gens autour. Et puis, finalement, le bateau, on l’a retrouvé. C’était un vraiment très grand, un yacht ça s’appelle, et dessus le Président Nicolas, il pouvait aussi se bronzer avec auprès de lui, sa femme, Cecilia la vraie mère de ses fausses filles et qui est encore plus belle que Ségolène. Il y a des gens qui râlent que le bateau, il est quand même trop beau et les amis de Nicolas, quand même trop riches aussi. Et pourquoi ? C’est vraiment trop gentil que ces amis riches là, ils veulent bien lui prêter leurs affaires à Nicolas. Pas comme certaines qui sont dans ma classe. Et puis, mon père, il a dit que le Président de la République française, il allait tout de même pas se balader sur l’eau en pédalo. Nous, avec mon frère, on a trouvé ça très rigolo parce que du pédalo, on en avait fait l’année dernière, à Saint-Brévin-les-Pins.
Coralie à Veronika,
Figure-toi, on regarde la télé toute la journée. Sur la Première chaîne, mais ailleurs c’est pareil. Parce que le Président Nicolas, il est devenu complètement Président parce que celui d’avant est parti. C’était triste un peu aussi quand il a fait un petit coucou avec sa main par la fenêtre ouverte de sa voiture, pour nous dire au revoir. Mais mon père aussi il a fait un geste, dans le genre bon débarras. Je ne sais pas pourquoi parce qu’avant, il l’aimait bien et qu’il l’avait même voté. Il a oublié, faut croire. Après ça, tout le monde est entré dans le Palais où il va vivre le Président et qui est encore plus beau que le bateau. Mais faut que je mette la table, je te raconte demain.
Coralie à Veronika,
Bon, comme, je te disais hier, tout le monde, il est allé dans le Palais avec Nicolas. Ils ont fait des discours, ça c’était un peu barbant, et maman en a profité pour faire la vaisselle. Mais ce qui était très chouette, c’est que toute la famille du Président, elle est arrivée. Il y avait Cécilia avec ses deux vraies filles qui sont pas celle de Nicolas, deux grands et beaux garçons qui sont ceux de Nicolas mais pas ceux de Cécilia, et puis un autre garçon, mais de notre âge, et qui lui est celui de Nicolas et Cécilia. Enfin tout le monde était là, sauf la première femme de Nicolas, qu’est la mère des grands garçons et que personne connaît, et non plus le père des filles de Cécilia qu’est un peu fâché avec Nicolas et qu’est malade aussi. En tout cas, Cécilia, c’est rien de dire qu’elle était belle. Avec une robe qui brillait tout plein, Prada m’a dit maman, c’est la marque. Enfin les filles, elles étaient pas mal non plus. Et puis, le Petit Louis, c’est celui qu’a notre âge, Il a regardé un magnifique collier qu’on a offert à son papa, quelque chose tu verrais. Mais le mieux, c’est quand Nicolas, il a embrassé Cécilia, sur la bouche, enfin sur le coin. Mais, tout de même. Le journaliste il a dit que c’était inouï, c’est le mot qu’il a répété, oui c’était inouï de voir ça, car jamais avant aucun Président, il ne l’avait fait d’embrasser sa femme sur la bouche et devant tout le monde, tu comprends ça, toi.
Coralie à Veronika,
Tu me dis que dans le Bild, on voit Nicolas et ton Angela qui s’embrassent aussi, mais pas sur la bouche. C’est chouette quand même. Parce que des fois, entre la France et l’Allemagne, la maîtresse d’école elle a dit que ça avait été la guerre. Alors si Nicolas et Angela, ils s’entendent, c’est mieux, non ? En plus l’ancien Président, il aimait bien aussi les chefs de ton pays et même qu’il aimait bien leur bière. D’ailleurs, mon père aussi. Et le tien ?
Coralie à Veronika,
Là, cette fois, c’est triste ce que j’ai à te raconter. Le Président, il est allé à un monument et là on lu la lettre d’un jeune homme qu’on avait tué pendant la guerre. C’était un jeune et un communiste. Pourtant les communistes, il les aime pas Nicolas. Mais celui-là, comme on l’avait tué, c’était pas pareil. Alors le Président, il a pleuré un peu. Ecrasé une larme, il a dit le journaliste. Et ça, ça prouvait bien qu’il était humain. Et nous, les enfants, j’ai demandé à maman, Est-ce qu’on est aussi des humains ? Bien sûr, elle m’a répondu. Alors on a pleuré un petit peu. Je dis pas ça pour qu’on soit fâchés mais il paraît que c’est des gens de chez toi qui l’ont tué, Guy Moquet, c’est comme ça qu’il s’appelle le pauvre jeune homme. Mais c’était avant on a dit. Du temps des méchants. Maintenant y’en plus ou un peu moins. Et puis ils ont dit aujourd’hui, nous avons l’Europe. Et ça, j’ai pas bien compris. Et mon père, il a pas su expliquer.
On n’a pu retrouver la suite de cette correspondance qui à vrai dire fut peut-être interrompue.