Victorin Lurel a déchaîné les foudres de Copé-Mélenchon. Copé gaulliste défenseur de la vraie croix (de Lorraine) est aussi crédible que Frigide Barjot en chaisière de St Nicolas du Chardonnay. Avec Mélenchon, c’est l’éructation permanente : comme il a des aigreurs perpétuelles, il a le rot verbal acide.
Et Chavez, dictateur … ou pas ?
Or donc, l’homme des Caraïbes* a dit fort sereinement, après s’être recueilli devant la dépouille d’Hugo Chavez "Il était tout mignon (...), frais, apaisé comme peuvent l'être les traits de quelqu'un mort, on avait un Hugo Chavez pas joufflu comme on le voyait après sa maladie". Sacrilège ! « Comment a-t-il pu avoir l’audace de parler d’un mort sur le ton de la blague comme il a osé le faire devant le cadavre d’Hugo Chavez ? » s’est écrié l’imprécateur, agrémentant son indigne propos d’insultes comme à l’accoutumée.
"Moi je dis, et cela pourra m'être reproché, que le monde gagnerait à avoir beaucoup de dictateurs comme Hugo Chavez, puisqu'on prétend que c'est un dictateur. Il a pendant ces 14 ans respecté les droits de l'Homme (...) Toutes choses égales par ailleurs, Chavez c'est de Gaulle plus Léon Blum". Là c’est Copé – qui n’a pas choisi l’ironie en 1ère option linguistique, mais, comme Mélenchon, l’insulte et l’anathème – qui se déchaîne.
Question donc : el comandante fut-il un dictateur, oui ou non ? Question subsidiaire : fut-il un bon président du Venezuela ?
Cohn-Bendit n’a certainement pas tort de lui reprocher ses amitiés sulfureuses avec El Assad ou Kadhafi (mais ces deux-là n’ont-ils pas été reçus en grandes pompes – à talonnettes - par le prédécesseur de F. Hollande ?), ou encore l’Iranien Ahmadinejad, sans oublier son quasi culte pour Castro.
Sauf que, contrairement à ses peu fréquentables amis, il a été pendant 14 ans élu et réélu, dans des élections au moins aussi démocratiques que celle qui a conduit Georges Bush junior à la Maison Blanche en 2000. Il a même dû affronter un coup d’état en 2002 soutenu par le même Bush, a accepté un référendum négatif et l’opposition détient des postes de gouverneurs de province. Les scores sont nets, mais n’ont rien de ceux des républiques bananières : 1998 : 56%, 2006 : 61,3%, 2012 : 54,4%.
Dans un article peu flatteur des Echos, Y. Bourdillon écrit : "Il faut toutefois reconnaître que le régime Chavez n'a jamais basculé dans la dictature absolue ; les partis d'opposition fonctionnent presque librement et les cas documentés d'arrestations arbitraires ou de tortures d'opposants sont quasi inexistants". Beaucoup de Cubains ou d’Iraniens aimeraient pouvoir en dire autant.
Mais la démocratie ne se résume pas à des élections. C’est aussi un état de droit. S’agissant des médias audiovisuels, outre l’obligation d’interrompre tous les programmes pour passer ses discours, souvent à la Castro, de plusieurs heures, Chavez a muselé radios et télés privées. Ainsi interrogé sur le sort d'une chaîne nommée RCTV, il répond ne pas l’avoir fermée mais avoir refusé de renouveler la concession hertzienne, autrement dit de l’avoir quasiment privé d’audience. Un reportage d’Euronews, le 11/03/2013, intitulé « Globovisión la dernière chaîne rebelle » fait état de pressions sur les annonceurs, menaces physiques contre les personnels en reportage qui seraient le lot de cette TV. “L’un des aspects les plus sombres du chavisme réside dans ses liens avec la presse. En un peu plus d’une décennie, presque toutes les voix allant à l’encontre des idéologies qui soutiennent le gouvernement ont disparu, via la fermeture ou l’achat de dizaines de chaînes de radio et de télévision. Globovisión est la dernière chaîne rebelle, mais pour combien de temps?” demande Luis Carballo, l’envoyé spécial d’Euronews à Caracas.
Bilan globalement positif… comme disait Marchais ?
Les rues de Caracas sont à peu près aussi sûres qu’une sortie de prison à Marseille, si l’on en croit Paulo A. Panugua, journaliste du Monde. Le Venezuela est "le deuxième pays le plus meurtrier au monde", juste après le Honduras. Caracas est la ville la plus dangereuse du monde. Et la situation ne cesse d’empirer. Même Le Monde diplomatique – rien à voir avec Le Monde – est obligé, du bout des lèvres, de le reconnaître. Il rappelle cependant que la violence n’a pas attendu Chavez pour régner dans les rues de la capitale : en 1996, « Avec une moyenne de quatre-vingts morts par balles chaque fin de semaine, avec des attaques quotidiennes dans les transports en commun, avec sa pauvreté au développement exponentiel, avec enfin une crise économique qui ronge le pays depuis plus de quinze ans — l’inflation est de plus de 1 000 % par an —, Caracas est devenue depuis quelques années l’une des villes et peut-être même la ville la plus dangereuse du monde » (Raids). Sauf que là, l’équation mécaniste – pauvreté-à insécurité – ne devrait plus exister, ou au moins être nettement atténuée après 14 ans de chavisme. « Le gouvernement bolivarien ne serait-il pas tombé dans l’analyse réductionniste qui attribue la violence à la seule misère ? On peut le supposer. » Sécurité, échec patent donc !
Pour reprendre un cliché, Chavez a bénéficié d’une manne pétrolière qui lui a permis, si l’on en croit Le Monde diplo, de faire dégringoler le taux de pauvreté de 60 à 23% et l’indigence de 25 à 5%. Elle a permis la gratuité des soins et de l’école. Mais outre que l’histoire – à commencer par celle de Cuba – nous a rendu méfiant sur les bilans toujours triomphants des plans quinquennaux, il semblerait que la dernière des grandes « missions sociales », celle récente sur le logement a été quelque peu improvisée ; et aussi qu’il y a beaucoup de pertes en ligne, corruption aidant. Mais, quelles que soient les insuffisances de ces « missions », il faut aussi rappeler qu’entre 1984 et 1995, le nombre de pauvres était passé de 36 à 66%, 70% de la population n’avait aucune couverture sociale, la moitié des enfants et des adolescents étaient déscolarisé. Avec l’aide massive de médecins cubains, un système de santé a été mis sur pied qui accueille les pauvres. L’analphabétisme a été éradiqué et les efforts sont poursuivis pour hisser le niveau de formation. Une retraite minimum est assurée à des travailleurs qui n’avaient pu cotiser…
Cependant, comme le souligne Le Guardian, les infrastructures sont en déliquescence : “Les routes sont crevassées, les ponts s'effondrent et les raffineries explosent. Le réseau électrique, asthmatique, enchaîne les coupures de courant. Les hôpitaux publics sont rongés par l'humidité et dans les prisons d'une saleté répugnante la barbarie règne". Et la situation économique reste pétrodépendante donc soumise aux fluctuations d’un marché largement manipulé par l’ennemi suprême, les Etats-Unis.
Laissons donc Mélenchon à son adoration béate et hargneuse et Copé à son cynisme politicien. El comandante, comme le prévoit Ouest-France, va devenir une icône quelque part entre Eva Peron et Che Guevara. Son legs idéologique – le bolivarisme - est des plus flous. Comme son rôle à la tête du Venezuela, démocrate et autocrate, son bilan est assez mitigé. Mais il aura rendu sa fierté aux plus modestes de son pays et levé des espoirs dans toute l’Amérique latine.
Mais quant à choisir une icône en Amérique latine, pourquoi pas José Mujica Cordano, surnommé « Pepe Mujica », le Président de l’Uruguay ?
* Que sous-entend l’ex-sénateur PS avec ce « masque d’homme des Caraïbes ». En tout cas tous ceux qui écoutent l’extrait d’entretien donné à RTL constatent que les insultes grossières dont Méluche l’assaisonne – arrogance, mépris - s’appliquent tout-à-fait à celui qui les profère. Quant à « solférinien » - outre la niaiserie de cette appellation – Lurel, homme des caraïbes, le fut sans doute moins que l’ex-membre du bureau national et même ex-secrétaire national et néanmoins sénateur PS qui a encore perdu une occasion de se taire – ça ne veut rien dire. Mais même ses alliés du PC commencent à se lasser de cette hystérisation permanente du débat public.
Pour compléter : http://www.courrierinternational.com/dossier/2013/03/06/le-venezuela-perd-son-leader voir notamment Hugo Chàvez ou la fabrication d'un mythe avec l'étonnante prière
finale
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