Faire du ménage dans ses courriels – tâche sisyphienne – permet de redécouvrir des messages oubliés ou négligés. Cet article du Monde du 13 octobre tombe finalement à pic pour prolonger une conférence-débat du 13 décembre* sur la Laïcité. Organisée par une association de parents d’élèves d’une école (CLIQUE) – menacée par une municipalité hostile à l’école publique – elle était co-animée par un représentant de la F.O.L. (Ligue de l’enseignement) et un autre de la Libre Pensée.
* Elle était évidemment prévue le 9 décembre 111e anniversaire de la Loi de 1905, mais pour des raisons que j’ignore elle dut être repoussée au 13.
« La loi de 1905, étape fondamentale de la laïcisation de la République française, est libérale et tolérante »
Pour éclairer le sens du mot « laïcité », l’historien Jean Baubérot revient sur les débats passionnés qui ont entouré l’adoption de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat, au début du XXe siècle.
Laïcité « ouverte », laïcité « positive », laïcité « républicaine », « nouvelle laïcité » : depuis que la question de l’islam a envahi le débat politique, le mot laïcité est souvent utilisé sans que l’on en définisse clairement les contours.
Pour y voir plus clair, Jean Baubérot, ancien titulaire de la chaire Histoire et sociologie de la laïcité à l’Ecole pratique des hautes études, revient sur les débats qui ont entouré, en 1905, la loi de séparation des Eglises et de l’Etat – et sur la postérité de ce texte fondateur de la République française. Il vient de publier, avec le Cercle des enseignant.e.s laïques, un Petit manuel pour une laïcité apaisée, à l’usage des profs, des élèves et de leurs parents (La Découverte, 236 p., 12 €).
Dans le débat sur le voile comme dans celui sur le burkini, les politiques qui invoquent la notion de laïcité se réfèrent sans cesse à la loi de 1905 sur la « séparation des Eglises et de l’Etat ». Vous dites qu’ils se méprennent sur le sens de ce texte. Pourquoi ?
La loi de 1905 est une étape fondamentale de la laïcisation de la République française mais, contrairement à ce que disent certains politiques, ce n’est pas une loi qui tente de chasser les religions de l’espace public : c’est au contraire un texte libéral qui repose sur la tolérance.
Il suffit de reprendre l’histoire de ce texte pour s’en convaincre. Au début du XXe siècle, le président de la commission parlementaire chargée de travailler sur la loi est un adjoint de Jules Ferry, Ferdinand Buisson, et son rapporteur un jeune député socialiste, Aristide Briand. Politiquement, ces hommes sont des libéraux. Ils ne veulent ni supprimer la religion ni détruire les croyances, mais apaiser le conflit politico-religieux qui déchire le pays depuis le XVIe siècle.
Dès le début des débats, ils s’engagent donc dans un double refus : refus de la laïcité antireligieuse défendue par le député socialiste du Var Maurice Allard, refus de la laïcité anticléricale défendue par l’ancien président du conseil Emile Combes.
Buisson et Briand estiment qu’il faut mettre fin au caractère officiel de l’Eglise catholique et des cultes reconnus, mais ils veulent aussi protéger la liberté de conscience et la liberté de culte. Beaucoup estiment qu’ils vont trop loin dans les concessions à l’égard des Eglises. Toutefois, tout le camp républicain se rallie finalement au texte, y compris Allard et Combes. Jean Jaurès décrit d’ailleurs la loi de 1905 comme une loi « libérale, juste et sage ».
Quels sont les grands principes du texte de 1905 ?
La loi de 1905 comporte trois piliers. Le premier, c’est la fin du caractère officiel de l’Eglise catholique et des cultes reconnus ainsi que de leur financement public. Ce principe garantit à tous la neutralité religieuse de l’Etat, qui n’est pas une fin en soi mais un moyen destiné à assurer l’égalité entre les citoyens et leur non-discrimination pour des raisons religieuses.
Le deuxième pilier, c’est la liberté de conscience et le libre exercice des cultes : chacun a la totale liberté de croire ou de ne pas croire et le droit de manifester sa religion – dans les limites, évidemment, du respect de l’ordre public.
Ce sont deux principes que beaucoup oublient aujourd’hui : en France, exprimer une croyance religieuse dans l’espace public, ce n’est pas une atteinte à la laïcité ! La loi de 1905 prévoit d’ailleurs les mêmes peines pour ceux qui exercent une pression religieuse sur autrui – obliger, par exemple, les ouvriers à aller à la messe, comme le faisaient les patrons catholiques du Nord – et ceux qui troublent l’exercice du culte – empêcher, par exemple, des fidèles de participer à une procession religieuse.
Le troisième pilier, qui est l’impensé, encore aujourd’hui, de la loi de séparation, c’est le respect des règles de fonctionnement spécifiques de chaque culte, qui a conduit à accorder certains droits collectifs aux organisations religieuses. Ce dernier pilier témoigne du caractère très libéral de la loi de 1905.
Aujourd’hui, on trouve que l’obéissance des prêtres envers les évêques et le pape est tout à fait normale. Mais, à l’époque, beaucoup de républicains voulaient contrôler l’Eglise afin d’imposer un catholicisme républicain libéré de leur emprise.
Aristide Briand refuse cependant de s’engager dans cette voie : « Les Eglises ont des constitutions que nous devons respecter », déclare-t-il. Cette conception de la liberté des cultes a des conséquences encore aujourd’hui : les femmes, par exemple, ne peuvent pas devenir prêtres dans l’Eglise catholique. C’est une discrimination au regard du droit du travail, mais si une femme porte l’affaire devant la justice administrative, les juges tiendront compte du droit canon !
En France, ce sont les cultes eux-mêmes qui définissent leurs règles de fonctionnement – même si ces règles internes heurtent les principes de la République.
Extraits de l'introduction
La religion est-elle un sujet abordé dans nos classes ? Oui, car les programmes nous donnent de multiples occasions de l’aborder d’un point de vue historique, littéraire, scientifique ou philosophique. Oui, beaucoup d’élèves se disent musulmans pratiquants, mais également chrétiens, athées... Ils et elles revendiquent des appartenances nationales (française, étrangère ou les deux) mais aussi leur soutien inconditionnel à une équipe de foot ou à un groupe de musique. Ils et elles ont entre 11 et 19 ans et construisent leur identité. Est‐ce un obstacle à l’enseignement du fait religieux ? Rarement, pour ne pas dire jamais. La classe n’est pas le lieu d’un combat retranché entre, d’un côté, le professeur et, d’un autre côté, les élèves, que certains fantasment publiquement, mais un lieu de transmission du savoir et de dialogue. La représentation de la salle de classe comme camp retranché, véhiculée par un certain nombre de polémistes, contribue à augmenter les conflits et masque les réalités de l’enseignement. Être capable de réagir avec mesure à la contradiction, établir la différence entre savoir et croyance ne sont pas des compétences accessoires pour un.e enseignant.e, elles sont le cœur de notre métier. Alors que nous accumulons à nous tou.te.s plus de trente ans de carrière, avons-nous déjà dû interrompre un cours parce qu’un.e élève contestait notre approche d’un fait religieux ? Jamais. Cela doit sans doute arriver mais ce n’est pas la norme. Avons-nous déjà été menacé.e.s ou intimidé.e.s parce que nous évoquions des sujets comme les processus d’écriture de la Bible ou du Coran ou encore l’évolution des espèces ? Jamais. Entendons-nous parfois des propos sexistes, homophobes, racistes, antisémites dans nos classes ? Oui, mais nous en entendons également dans les dîners de famille, dans les cafés, parmi nos amis, à la télévision... Ces propos ne sont l’apanage ni des croyant.e.s ni des « jeunes de banlieues ». Et, comme dans le reste de la société française, nous ne sommes pas seul.e.s à défendre l’égalité et la fraternité. Nos soutiens les plus nombreux contre les propos discriminatoires et haineux sont dans les classes mêmes, parmi nos élèves qui sont loin de correspondre aux stéréotypes. En classe, on ne lutte pas contre les idéologies destructrices comme on le fait avec des adultes dans l’espace public : notre rôle est d’écouter, de comprendre les raisons de la violence pour mieux travailler collectivement à la désamorcer.
Au quotidien, la laïcité est de plus en plus régulièrement invoquée pour mettre à part et stigmatiser une partie de nos élèves, voire des personnels de l’Éducation nationale. Traque des vêtements censément religieux, surveillance accrue des comportements des élèves supposé.e.s musulman.e.s, injonction insistante à l’affirmation de l’adhésion aux valeurs républicaines aux collègues perçus comme immigré.e.s ou enfants d’immigré.e.s : ces pratiques discriminatoires, parfois humiliantes, deviennent monnaie courante, au nom d’une laïcité qui semble s’être retournée contre ceux et celles qu’elle est censée protéger.
Pour reconstruire une laïcité scolaire qui soit non pas une menace mais bien une assurance pour les personnels et les élèves d’évoluer dans une institution respectueuse des croyances de chacun.e, la priorité était de sortir des discours guerriers et des appels à la croisade laïque pour revenir sur nos expériences mais aussi nos hésitations et nos expérimentations.
Le Cercle des enseignant.e.s laïques est un collectif de profs de différentes disciplines exerçant leur métier dans des établissements de la Seine-Saint-Denis. Leur manuel écrit avec J. Baubérot décrit des situations concrètes puis propose des analyses et surtout des pratiques. Il fait plus que compléter le Livret laïcité du Ministère, en partant de leur vécu.
Livret Laïcité _ décembre 2016
Certains débats du début du XXe siècle rappellent nos controverses actuelles sur le voile. C’est le cas de la discussion sur les signes religieux dans l’espace public. Qu’en dit-on à cette époque ?
Les débats d’alors, en effet, présentent beaucoup d’analogies avec les nôtres ! Avec l’affaire Dreyfus, la République se sent menacée. Lors des débats sur la loi de séparation des Eglises et de l’Etat, un député combiste, Charles Chabert, dépose un amendement interdisant le port de la soutane dans l’espace public. Ses arguments sont les mêmes que ceux d’aujourd’hui contre le foulard : la soutane, qui est un signe plus politique que religieux, est un vêtement de soumission et d’enfermement qui empêche de penser librement.
Aristide Briand refuse cependant d’entrer dans une logique d’interdiction. Il invoque trois arguments : la loi de séparation doit être une loi de liberté, ce qui est contradictoire avec la prohibition ; elle pourrait sombrer dans le ridicule en interdisant la soutane, ce qui serait dommage ; enfin, l’Etat risque, avec cet amendement, de s’engager dans un jeu du chat et de la souris sans fin – on peut compter sur l’habilité des prêtres et des tailleurs, explique Briand, pour trouver d’autres formes de signes distinctifs.
Ce débat sur la codification des vêtements religieux renaît aujourd’hui autour de la question du foulard. Après l’interdiction du voile à l’école, en 2004, il s’est passé exactement ce que prophétisait Aristide Briand en 1905 en évoquant l’imagination des prêtres et des tailleurs : l’école s’est lancée dans une bataille sans issue sur la forme des bandanas et la taille des jupes longues.
La codification des signes religieux est une impasse : ils vont et viennent, ce n’est pas le rôle de la République de les interpréter, voire de les traquer. Aristide Briand l’expliquait d’ailleurs avec humour : « Tout le monde a le droit de porter une soutane, même les prêtres ! » – une façon de dire que la République n’est pas là pour prêter un sens à des vêtements religieux.
En 1905, le débat sur les processions est lui aussi très vif. Il est difficile d’imaginer aujourd’hui ces processions politico-religieuses où l’on combattait la République en se battant avec les libres-penseurs. Elles duraient plusieurs jours et elles réunissaient des centaines de participants revêtus d’habits spécifiques, qui chantaient des chants religieux en brandissant des oriflammes. La commission parlementaire décide de les interdire – sauf pour les enterrements, bien sûr. Cependant, Ferdinand Buisson veut les autoriser au nom de la liberté, et Aristide Briand, tout en louvoyant, donne le sentiment qu’il est favorable, lui aussi, à la liberté.
Finalement, les processions religieuses non seulement sont autorisées mais elles ne sont plus tenues de respecter les limitations posées par Napoléon – éviter, par exemple, certains quartiers comportant des synagogues ou des temples. Le droit des processions est plus libéral après la séparation qu’avant !
Pourquoi les républicains de 1905 choisissent-ils la voie du compromis ?
Si la République, en 1905, fait la distinction entre l’essentiel et l’accessoire, c’est pour deux raisons. La première est politique : Briand et Buisson cherchent à élargir le camp républicain en ralliant à eux les catholiques qui sont fidèles à l’Eglise dans les grands moments de leur vie mais qui ne sont pas des militants antirépublicains. Leur but est d’isoler les extrémistes qui veulent en découdre avec la République.
La seconde est philosophique : les républicains ont le sentiment que la raison n’a pas besoin que l’Etat devienne son gendarme. Jaurès et bien d’autres estiment ainsi que l’obscurantisme reculera peu à peu de lui-même grâce au développement de l’instruction publique.
Comment la loi de séparation est-elle accueillie à l’époque ?
Le pape Pie X la refuse, non pas à cause de son contenu, comme l’a prouvé l’historien Maurice Larkin en travaillant sur les archives du Vatican, mais par crainte d’un « jeu de dominos » : vu l’importance de la France d’alors, d’autres pays européens et sud-américains risquent de séparer, à leur tour, la religion et l’Etat. D’autre part, le pape préfère aboutir à « une franche persécution » plutôt qu’aux « accommodements trompeurs » (selon lui) de la loi.
Face à cela, en 1907 et 1908, Briand fait voter de nouvelles lois permettant, dit-il, à l’Eglise catholique d’être « légale malgré elle ». Des républicains protestent contre cette succession de défaites. Pourtant, de défaite en défaite, la République a gagné.
C’est l’un des paradoxes de ces lois françaises de séparation : dès 1908, la séparation fonctionne malgré le refus de l’Eglise catholique. Il y a des rancœurs, bien sûr, mais en dix ans la vie sociale est pacifiée. L’union sacrée de 1914 en est la preuve : en 1904, une telle union aurait été absolument impossible !
La guerre renforce cette pacification. Les officiers catholiques, qui n’ont jamais été à l’école publique, découvrent que, contrairement à ce qu’on leur a dit, les soldats issus de « la laïque » ne sont pas des lâches et qu’ils font preuve de bravoure et de solidarité : l’école sans Dieu, constatent-ils, n’a pas été une source d’immoralité.
Quant aux enfants de l’école laïque ou de la libre-pensée, ils découvrent que les aumôniers ne sont pas des porcs, comme le prétendaient certains caricaturistes, mais des gens estimables qui font leur devoir et qui affrontent la mitraille pour porter un secours spirituel aux soldats.
Aujourd’hui, le débat sur la laïcité divise à nouveau la France, notamment au sujet des vêtements portés par les femmes musulmanes – voile, burka, burkini. Pourquoi cette tentation de codifier les vêtements religieux que l’on constatait en 1905 autour de la soutane ?
Au début du XXe siècle, il y a effectivement chez les républicains une obsession vestimentaire : ils demandent aux congréganistes de se séculariser, de ne plus vivre en communauté et de mettre des habits civils. Cette obsession disparaît après 1905.
Aux lendemains de la seconde guerre mondiale, l’abbé Pierre, qui a été élu député de Meurthe-et-Moselle, et le chanoine Kir, député de Côte-d’Or et maire de Dijon, assistent aux débats parlementaires en soutane sans que personne y voie une atteinte à la laïcité.
Dans certaines prisons de femmes, les religieuses, qui sont fonctionnaires publiques de l’administration pénitentiaire, travaillent en habit de bonne sœur et cela ne choque personne.
En France, les vêtements des catholiques évoluent peu à peu, mais pas sous la contrainte de l’Etat : c’est l’Eglise qui, au fil des décennies, a abandonné la soutane et qui, après le concile Vatican II [1962-1965], a adopté des signes distinctifs plus discrets.
Ce mouvement obéit aux rythmes internes à l’institution, pas aux directives de l’Etat. Il ne faut pas confondre la sécularisation, qui désigne le mouvement d’une société, et la laïcité, qui est un principe politique. On ne peut pas imposer la sécularisation aux individus au nom de la laïcité de l’Etat. Ce n’est plus de la laïcité, c’est une forme d’athéisme d’Etat !
En 2003, François Baroin rend au premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, un rapport intitulé « Pour une nouvelle laïcité ». Il défend alors une laïcité plus offensive et plus intransigeante que celle de 1905. En quoi se démarque-t-elle de la loi de séparation des Eglises et de l’Etat ?
La rupture entre la nouvelle laïcité et la loi de 1905 est politique. Depuis quelques années, cette « nouvelle laïcité » tente de contrôler l’organisation interne d’une religion – l’islam –, alors que la loi de 1905 se garde bien d’intervenir dans ce domaine : elle est au contraire très respectueuse des spécificités d’organisation des cultes.
Cette « nouvelle laïcité » est l’héritière du gallicanisme que professait Emile Combes : elle veut protéger le « bon » islam et contrôler le « mauvais », comme les républicains combistes voulaient, au début du XXe siècle, protéger le bon catholicisme acculturé et combattre le « mauvais » ultramontain.
Mais elle est aussi l’héritière, à droite, voire à l’extrême droite, d’une autre tradition politique française : le discours maurrassien sur les racines chrétiennes de la France, qui ne sert plus à dénoncer la Révolution française et la démocratie, mais l’« islamisation » du pays. C’est cette conjonction de la tradition combiste scientiste et de la tradition maurrassienne contre-révolutionnaire qui fait la force de cette « nouvelle laïcité » : elle reprend deux imaginaires nationaux très puissants.
Face à cette « nouvelle laïcité », vous plaidez pour une laïcité « apaisée ». Quelles sont ses réponses face à l’islamisme ?
La situation internationale est extrêmement difficile, bien sûr : la France doit désormais compter avec des ennemis déclarés. Mais la stratégie autoritaire qui a été adoptée par le premier ministre, Manuel Valls, risque de conduire beaucoup de musulmans, et pas seulement les radicaux, à se méfier de cette république intransigeante et excluante.
Les discours autoritaires risquent de leur faire écouter les sirènes des ennemis de la République. Il vaudrait mieux adopter la stratégie inclusive choisie lors de la loi de séparation de 1905 : elle tentait de rallier à elle les catholiques qui n’étaient pas des militants antirépublicains.
Il faudrait en outre adopter une laïcité égalitaire. On ne peut pas à la fois soutenir les caricatures de Charlie Hebdo et dire que les religions doivent être discrètes dans l’espace public. Si l’on exige la discrétion des convictions religieuses dans l’espace public, il faut aussi exiger la discrétion des expressions antireligieuses.
Le premier choix à faire, c’est donc celui de l’égalité – liberté pour les caricatures, liberté pour les femmes voilées ou les propos religieux. Cette règle d’égalité s’impose également pour les limitations posées à l’ordre public démocratique : elles doivent être les mêmes pour toutes les religions. Si l’on interdit le voile dans l’espace public, il faut aussi interdire la kippa et la soutane – en ayant conscience que, dans cet engrenage, les libertés seront menacées.
Le problème, au fond, c’est qu’au lieu de réfléchir posément aux enjeux de la laïcité, on fait comme si certains Français étaient tombés tout petits dans la laïcité comme Obélix dans la potion magique – ils défendraient toujours les valeurs démocratiques et l’égalité hommes-femmes –, alors que les musulmans, eux, devraient en ingurgiter régulièrement quelques cuillerées parce qu’ils ne sont pas naturellement laïques. Comment voulez-vous vous sentir un citoyen comme les autres quand on vous reproche en permanence d’être un mauvais républicain ?
Anne Chemin
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