17/08/2018 : Xième scandale de pédophilie en Pennsylvanie où un Grand Jury a recensé 300 prêtres coupables d'agressions sexuelles diverses sur au moins 1000 victimes.
Un titre fort peu explicite : ce film passant sur une excellente chaîne, mais peu suivie, Arte, a failli m’échapper. Heureusement, la non moins excellente Elisabeth Quin, à l’issue de ses 28 minutes, en a fait une présentation convaincante. Spolight , qu’on pourrait traduire ici par coup de projecteur, conte l’enquête de journalistes du Boston Globe sur les prêtres catholiques pédophiles de l’archevêché du cru.
Spotlight, désigne en fait une petite équipe de journalistes du Boston Globe vouée aux investigations de longue haleine. Comme si notre Ouest-France avait des Fabrice Arfi disposant de temps et moyen pour se lancer dans des enquêtes au long cours.
Bande annonce
La fiche
Thriller américain de Tom Mc Carthy –
Avec Michael Keaton, Mark Ruffalo, Rachel McAdam, Liev Schreiber et John Slattery – Durée : 2h08 – Sortie : 27 janvier 2016
Synopsis :
Adapté de faits réels, Spotlight retrace la fascinante enquête du Boston Globe – couronnée par le prix Pulitzer – qui a mis à jour un scandale sans précédent au sein de l’Eglise Catholique. Une équipe de journalistes d’investigation, baptisée Spotlight, a enquêté pendant 12 mois sur des suspicions d’abus sexuels au sein d’une des institutions les plus anciennes et les plus respectées au monde. L’enquête révèlera que L’Eglise Catholique a protégé pendant des décennies les personnalités religieuses, juridiques et politiques les plus en vue de Boston, et déclenchera par la suite une vague de révélations dans le monde entier.
Tiré de culturebox
Sous l’impulsion d’un nouveau directeur, Marty Baron, l’équipe va se pencher sérieusement sur des allégations d’abus sexuels visant un prêtre. Le film, assez dans le style des Hommes du Président, sur l’affaire Watergate, va se centrer sur le travail des quatre journalistes.
Typiquement étatsunien, les appartenances religieuses sont affichées. Tous les journalistes de spotlight ont des racines catholiques, comme diraient nos souchiais : l’un a étudié dans le lycée où a sévi un prêtre prédateur aux dizaines de victimes, l’autre habite, avec femme et enfants, en face d’une maison de repos où l’on planque ces prêtres, etc. En revanche le nouveau directeur, non seulement n’est pas bostonien, mais est juif. Et un représentant officieux du Cardinal Law, archevêque de Boston, cauteleusement, ne se fait pas faute d’y insister auprès de Walter Robinson, dit Bobby, rédacteur en chef de spotlight.
Le tournant du film se produit quand, dans une conversation téléphonique avec l’équipe de Spotlight, le psychothérapeute Richard Sipe, un ancien prêtre très médiatisé aux États-Unis, affirme que seulement la moitié du clergé respecte le vœu de chasteté et que 6% des prêtres sont des pédophiles*. Et il estimait qu’étant donné le nombre de prêtres de l’archevêché, les prédateurs étaient au moins 90.
L’équipe qui arrivait à une douzaine de présumés pédophiles va donc essayer d’étoffer sérieusement ces présomptions. En vain d’abord, un avocat source potentielle, puisque travaillant pour des victimes, reste bouche cousue. Un autre, qui avait échoué à faire inculper l’un des prédateurs en 1976, les renvoie au dossier envoyé au journal à l’époque. Jusqu’à ce qu’ils découvrent la piste : ces prêtres sont nomades, dès qu’ils sont atteints par des soupçons, on les mute dans une autre paroisse ou on les envoie quelques temps dans une maison de repos. Or le registre nominatif des prêtres est accessible, avec les postes occupés. Le relevé va permettre de repérer 87 cas.
La loi du silence
Le film démonte bien la loi du silence qui permettait le camouflage. En témoigne, l’aveu déchirant d’une mère, dont les sept enfants ont été abusés, que non seulement elle n’était pas entendue, mais que les autres paroissiens faisaient pression sur elle pour qu’elle se taise.
Il montre aussi, avec Eric MacLeish, avocat ayant représenté des victimes face à l'Église, comment le système de justice étatsunien favorisait ce silence : par ses tractations il obtenait des dédommagements de l’archevêché pour ses clients, moyennant leur secret absolu (et en prélevant, comme honoraires, le tiers des sommes obtenues).
Spolight a mis à jour le fait que non seulement la hiérarchie catholique a cherché à taire le scandale, mais qu'elle a encouragé cette pédocriminalité en déménageant les prêtres accusés, leur permettant de renouveler leurs méfaits dans d’autres lieux.
A la tête de cette hiérarchie, le cardinal Bernard Law, l’archevêque de Boston de l’époque. Dans le film, on le voit parader dans des réunions de notables bostoniens et se comporter avec morgue à l’encontre du nouveau directeur du Boston Globe venu se présenter ; le sachant juif, il lui offre un catéchisme.
Les tribunaux américains ne porteront jamais d’accusations contre sa personne. Il plaidera qu’il avait toujours agi de bonne foi, laissant la gestion active à des subalternes. Dans une déclaration, peu après sa démission forcée à la fin 2002, il dira juste : To all those who suffered from my shortcomings and my mistakes, I once again apologize and I beg for their forgiveness (À tous ceux qui ont souffert de mes erreurs, je m’excuse de nouveau et je leur supplie de me pardonner).
Il fut nommé archiprêtre de la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome (jusqu’en 2011).
L’enquête du Boston Globe lui a valu le prestigieux Prix Sullitzer. Surtout, elle a permis de dévoiler toute l’ampleur du scandale dans l’église catholique des Etats-Unis. Le John Jay report (étude de 2004 réalisée par le John Jay College of Criminal Justice) intitulé La nature et l'ampleur du problème des abus sexuels sur mineurs par les prêtres et les diacres catholiques aux États-Unis, va dénombrer 4400 prêtres accusés d'abus sur des mineurs aux États-Unis entre 1950 et 2002, et 11000 victimes reconnues. Leur indemnisation coûtera 2 milliards de dollars à l’église catholique étatsunienne !
Aux Etats-Unis sont venus s’ajouter d’autres scandales retentissants sur toute la planète, notamment au Canada, en Irlande, ou encore aux Pays-Bas et tout récemment, sans parler de Barbarin, l’Australie. En 2014, un rapport du Comité des Droits de l'Enfant, publié le 5 février pointait les infractions, par le Vatican, à la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE). Et si le pape François a fermement décidé de s’attaquer réellement à ce fléau, certains prélats, espagnols ou sud-américains notamment, ont toujours des propos bien plus ambigus quand ils ne continuent pas les pratiques du cardinal Law à Boston !
* Cette estimation, tirée empiriquement de ses observations, a été bien sûr contestée par des médias cathos. Or une récente étude officielle australienne aboutit à un chiffre comparable : "Entre 1950 et 2010, globalement, 7 % des prêtres étaient des auteurs présumés" d'abus sexuels sur des enfants. Dans certains diocèses, la proportion atteignait 15% de prêtres soupçonnés de pédophilie.
PS Le troll SC a évidemment sévi en évoquant la pédophilie dans l’éducation nationale : ce ministère fait son boulot !
« Le ministère de l’éducation nationale a procédé en 2016 à 30 radiations liées à des cas de pédophilie ou pédopornographie. Vingt-sept cas avaient été comptabilisés en 2015.
Au total, en incluant les « fautes graves », 41 radiations ont été prononcées dans l’enseignement public et privé, dont 16 en primaire et 25 dans le secondaire, a indiqué le ministère de l’éducation nationale.(…)
Le nombre de radiations pour des affaires de mœurs (avec des faits qui ne se sont pas forcément produits dans un cadre scolaire) était de 27 en 2015, 19 en 2014, 26 en 2013 et 15 en 2012, rappelle la rue de Grenelle.
L’éducation nationale emploie plus de 850 000 agents exerçant auprès de mineurs ».
La Croix 23/02/2017
Le nombre de cas annuels est certes trop grand, mais en proportion du nombre d'agents publics et privés en contact avec des mineurs, on est dans les 0,03.. pour mille.
NB C'est moi qui surligne.
"Tout a commencé par une lettre" au pape Jean-Paul II... C'est ainsi que débute le documentaire, Mea maxima culpa (Ma très grande faute).
Le sous-titre – le silence dans la maison de dieu - est chargé d’un lourd double sens puisque les crimes pédophiles se passent dans une institution accueillant des enfants sourds-muets.
Le documentaire raconte le combat de ces enfants pour faire reconnaître l'horreur qu'ils ont vécu. Face à la "loi du silence", il aura fallu du temps pour que l'Église reconnaisse sa faute envers "ses frères et soeurs" et dépasse le simple déni.
C'est en 2010 dans un article du New York Times que l'on découvrait l'incroyable histoire de ce prêtre américain Lawrence C. Murphy, directeur de l'école St-John, soupçonné dans les années 90, d'avoir violenté plus de 200 enfants handicapés. Ce prêtre avait envoyé une lettre en 1996 au cardinal Ratzinger, futur Benoît XVI, à l'époque préfet de la congrégation pour la foi, le suppliant d'interrompre le procès ecclésiastique, au nom "de la dignité de son sacerdoce". Il ne connaîtra pas la fin de son procès car il décède en 1998, dans une totale impunité.
D’après L’Express
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