Ce deblog-notes est une bonne invention. Il permet à d’obscurs plumitifs d’intervenir à côté de beaux esprits. Je ne m’en prive donc pas. Le numéro intitulé « Sénatoriales/Primaire citoyenne » a démangé mon clavier. Grattons !
D’abord un retour sur les sénatoriales. Les tremblements du président Larcher, alias Gros Gégé, devant ses deux micros au soir de la raclée, consolent de bien des crapuleries de l’UMP. Voir la satisfaction de Copé à peine masquée devant la débâcle justifie l’expression « Cache ta joie ! ». Assister à la lamentable prestation du conseiller spécial aux conseils, le pathogène Henri Guaino, mangeant son chapeau chez Yves Calvi lundi 26 dans « Mots croisés », devant un Edwy Plenel déchainé par les « affaires », vaut tous les anxiolytiques. Quant à l’application mécanique des élections précédentes concédée par les Uhèmepistes les moins stupides, elle ne peut cacher les fractures de leur organisation, qu’Isabelle Balkany et Pierre Charon illustrent à leur façon. Ne boudons donc pas notre plaisir…
Times are a-changin’ (Bob Dylan)
Certaines analyses de ce réjouissant numéro valent pourtant d’être nuancées. Si le grand électeur reste en effet plus rural qu’urbain, la différence entre rat des champs et cousin des villes s’estompe. D’abord parce que la « rurbanité » est là, que la campagne n’est plus seulement peuplée d’agriculteurs, et que la réforme catastrophique des collectivités territoriales frappe tout le monde. On peut être « modéré » et vouloir garder son département. Quant aux « sans étiquette », ils veulent tout simplement ne pas se fâcher avec leurs voisins dans les communes où le panachage est permis aux municipales.
Un mot sur le scrutin sénatorial jugé « archaïque »*. Le suffrage universel direct, majoritaire à deux tours, est-il si « moderne » à côté d’une représentation proportionnelle, la seule à protéger du bipartisme sans nuances ? Et le constitutionnaliste Guy Carcassonne avance un argument fort : si les deux chambres étaient élues comme l’Assemblée nationale, elles auraient la même légitimité et le bicamérisme serait ingouvernable.
Sous le patronage de Charles Pasqua
Passons aux commentaires vifs de Jean-François Launay sur les propos du « frontdegauchiste » qui soutient les « profs à poil » et attaque les « primaires citoyennes » du PS. Étant moi-même « frontdegauchiste », je suis d’autant plus consterné devant les bêtises de mon camarade d’isoloir. Évidemment, personne ne doit s’engager à voter quoi ou qui que ce soit, Constitution oblige. Quant à l’engagement de se « reconnaître dans les valeurs de la Gauche et de la République », il n’est pas opposable aux tiers et l’expert en promesses qui n’engagent que ceux qui les croient, nommé Charles Pasqua, en ferait un bon mot.
Les primaires du PS sont intéressantes et facultatives. Intéressantes au vu du premier débat télévisé où, mis à part le roi du cassoulet de gauche, les cinq autres tenaient la route, avec un Arnaud Montebourg novateur, et des échanges avec assaisonnement mais sans boîte à gifles.
Le club des petits bras
Facultatives, bien sûr, mais plutôt faciles à utiliser. Les minables obstructions des maires de droite refusant des bureaux de vote rejoignent l’argument du mélenchoniste acariâtre sur le « numéro surtaxé pour trouver son bureau de vote ». Le seul point positif est que les soutiens du Front de Gauche ont le droit de jouer petit bras, les rapprochant ainsi des socialistes qui considèrent Moody’s et Standard & Poor’s comme des oracles progressistes. Les sociaux-démocrates effrayés par la taxation du capital et les vieux staliniens obsédés par le fantôme de Guy Mollet ont au moins un point commun : un sens critique proche de la réflexion du bulot en rut.
Pour ne pas paraître totalement jobard, j’ajouterai que l’image de la grande consultation démocratique ouverte à tous est un peu jaunie par les moyens impartis à chacun pour mener campagne, entre autres la capacité de se payer des sondages qui, comme en 2006-2007, vont déterminer le choix du candidat. Même si Martine Aubry est supposée tenir le parti, donc la caisse, on sait que François Hollande est beaucoup mieux considéré par les milieux économiques et financiers. Après tout, il n’a pas touché aux 35 heures… Il touche donc les dividendes de son inaction, comme dit la mère de ses enfants.
Gilbert Dubant
* Le système actuel des "grands électeurs", bizarrement baptisé "suffrage universel indirect", qui donne 70 % des électeurs pour une moitié de la population et donc 30 % à
l'autre moitié, est pour le moins baroque. Le scrutin majoritaire à deux tours offre, jusqu'à présent, l'avantage de dégager des majorités à l'Assempblée nationale. Il me semble qu'A. Montebourg
propose de faire élire le Sénat à la proportionnelle. Le suffrage serait vraiment universel. Pour garder l'aspect "territoire", cela pourrait se faire sur la base régionale, et on
assurerait, outre la représentation de toutes les familles politiques, une quasi parité.(JFL)