Une nouvelle contribution de Gilbert Dubant
J’habite une ville de l’Essonne, Évry, voisine de Marcoussis, où habitait Michel Germaneau*, 78 ans, à vocation humanitaire, déclaré mort par la main d’AQMI (Al-Qaïda au Maghreb Islamique), quelque part dans le Sahara où il avait voulu créer une école. Paix à lui et miséricorde pour ses stupides concitoyens de Marcoussis qui déclaraient à la télé : « J’ai de la peine qu’il soit mort parce que c’était un voisin… ». Mais pourquoi ce généreux cardiaque chronique est-il décédé ?
Première réponse sommaire : parce qu’il a été imprudent de partir seul et sans ses médicaments dans ces contrées hostiles peuplées de sauvages islamistes.
Pas faux mais un peu réducteur : pourquoi est-il parti seul et quelle était sa destination ? Silence.
Une association humanitaire française et responsable (ce devrait être un pléonasme) peut-elle envoyer un vieillard malade l’été en plein Sahara de non-droit et par 50° à l’ombre (absente) ? Silence de ladite association. Quelle était sa mission ? Transportait-il de l’argent ? Des messages ? Pas un mot.
Troisième réponse, officielle celle-là, du porte-serviette de la Défense, Hervé Morin : « On a envoyé des commandos, mais ils se sont plantés… Pourtant, on avait bossé avec les gouvernements du Niger, du Mali, et de Mauritanie… Tout le monde était au courant… ». On tient déjà un bout d’explication. L’inénarrable néo-centriste ne s’arrête pas là, drivé par de fins experts militaires : « C’est un territoire grand comme l’Europe qui est une vraie zone grise. Les gouvernements de Niamey, Bamako, Nouakchott ne maîtrisent rien. Les islamistes frappent où ils veulent. On ne sait pas où ils sont. Ils peuvent faire 2000 kilomètres en plein désert sans se faire repérer… » (un « expert » à la télé, C dans l’air, juillet 2010).
On n’est plus en plein désert, mais en plein délire. Les farouches guerriers de l’AQMI (entre 400 et 500 hommes, paraît-il) circuleraient de nuit avec des patins à roulettes supersoniques ? Ils ont frotté la lampe d’Aladin pour se rendre invisibles ? Ils planent au-dessus du reg et des dunes en aéroglisseur ? Vu le nombre de pistes carrossables, n’importe quel Occidental ayant tant soit peu fréquenté le Sahara sait qu’il est aussi facile de s’y planquer qu’à Sarkozy d’articuler une phrase en français correct.
Et quand bien même ils se déguiseraient en vipères cornues ? Que les trois pays déjà cités aient une aviation en forme de maquettes de biplan est une chose, que la France, associée paraît-il à l’opération « Sauvez Germaneau ! » n’ait ni hélicoptères ni drones relève du foutage de gueule. Que l’armée n’ait pas voulu les utiliser pour ne pas fâcher l’Algérie ou se faire accuser de néo-colonialisme en uniforme est une autre affaire.
Reste un vieil homme de Marcoussis qui n’aurait jamais dû mettre les pieds dans un paysage farci de scorpions de toutes les tailles. Quels sont les irresponsables qui lui ont donné mission et visas pour la tombe ? Appelez-moi Kouchner ! Pas là ? En mission humanitaire en Afghanistan ? OK, on rappellera…
Gilbert Dubant
* Michel Germaneau était parti bénévolement au Niger pour le compte d’une petite association créée en 2006, Enmilal (« entraide » en tamasheq, la langue des Touaregs), spécialisée dans l’aide à la scolarisation et à la santé. Le retraité venait superviser la construction d’une école à In-Abangharet, au nord du Niger (note de JFL).