Les instituts de sondages se sont plantés, mais leurs erreurs sont à relativiser. Alors que le Front de gauche aurait pu se féliciter d’un score honorable, les rodomontades de son candidat en ont fait un perdant du 1er tour. Mauvais perdant, au demeurant. La redoutable montée du F-Haine ne se jugulera pas par quelques formules chocs.
L’agrégateur de sondages, élaboré selon des méthodes arithmético-empiriques, montre que l’échec des sondeurs est à relativiser. . Il n’y a pas eu d’erreur dans l’ordre d’arrivée. Pour les deux premiers la pondération donnait pour Hollande 27,8, le résultat est de 28,6 %, pour le sortant 27 le résultat est de 27,2 % Bayrou était surestimé de plus d’un point (10,3 prévu 9,1 obtenu). Le Pen fille devançait bien Mélenchon (prévus 15,7 pour l’une, 13,8 l’autre), mais contrairement à ce que l’on subodorait, le vote F-haine a été, comme en 2002, nettement sous-estimé, puisque Le Pen fille est à 17,9 ; en revanche Mélenchon a été très surestimé puisqu’il n’est qu’à 11,1 %. Comme dit le bénévole auteur de l’agrégateur : « Je ne peux (…) m’empêcher de rire gentiment des commentaires anti-sondages et basés sur l’observation du terrain qui nous prédisaient ces dernières semaines le raz-de-marée mélenchonien. » Comment ne pas me rappeler des échanges plus que musclés avec ceux que j’avais nommés les bogôs. M’inspirant de François Mitterrand qui décrivait ainsi feu le CERES de Jean-Pierre Chévènement : « Un faux parti communiste, avec de vrais petits bourgeois », inspiré aussi par les bobos qui étaient censés former le gros des troupes du PS, j’avais donc forgé ce bogô pour désigner les petits BOurges, qui se la pètent vraie GÔche auto-proclamée, et qui colonisent ses hauts lieux de la révolte qui gronde que sont les forums d’@rrêt sur images, ou les commentaires des articles du Nel Obs ou de son annexe, le « Plus ».
La grosse erreur a porté sur l’abstention. De 24 à 32 % selon les instituts, elle est à 20 % ! Certes c’est moins bon qu’en 2007, mais tout-à-fait dans les niveaux des présidentielles antérieures. Les grandes interrogations sur les incertitudes liées au changement d’avis, aux avis de dernière minute et à l’ampleur de l’abstention étaient bien vaines.
Après ce résultat qui sonne comme un cinglant camouflet, Sarkozy ne change pas une stratégie qui perd. Buisson et Peltier sont bien des sous-marins du F-Haine qui l’ont conduit tout droit à cet échec du 1er tour et mené Le Pen fille plus haut encore que le papa ! Eh bien, le sortant en a rajouté une louche reprenant toute la thématique xénophobe du Front national. Faut-il parler de son ridicule défi de petit caïd de cour de récré sur deux puis trois débats ? S’il avait vraiment voulu aboutir à deux débats, il aurait fait appel à un discret négociateur pour obtenir (ou pas) un accord. Cette grossière manœuvre de matamore ne pouvait qu’attirer un refus de François Hollande qui ne pouvait se laisser dicter les règles du jeu par son suivant !
Mélenchon, lui, n’aurait pas eu à rougir de sa campagne s’il n’avait pas attrapé la grosse tête en fin de parcours. Parti à 5 %, il dépasse les 11, faisant plus que doubler son score, fédérant des mouvements divers en plus du PCF, attirant les voix des candidats trostskystes. Mais ses rodomontades, amplifiées par des mélenchonistes de forums, en délire, ont métamorphosé une campagne fort honorable, en défaite cinglante. Il est vrai qu’il a pu être trahi par ces journalistes qu’il semble exécrer qui, non sans arrière-pensée au Figaro, l’ont décrit plus beau qu’il n’était. Trahi aussi par certains sondages, qu’il prétend ne pas regarder, qui le lançaient quasiment sur orbite.
Au soir du 22 avril, ses propos furent pour le moins surprenants. Amers et parfois menaçants : « Honte à ceux qui ont préféré nous tirer dessus». Nous avons les noms, ajoutait-il en substance. J’en tremble, car, ayant eu l’audace extrême, non pas comme il prétend de « relayer les arguments calomnieux de l’extrême-droite », mais de riposter à ses incessantes attaques contre le PS en général, et F. Hollande en particulier, je risque d’être sur les tablettes ! Il a réussi, exploit inédit, à ne pas prononcer le nom du candidat de la gauche au 2e tour. Il a même osé dire « Je vous demande de vous mobiliser comme s’il s’agissait de me faire gagner moi-même » ! En toute modestie. Il fallut que Pierre Laurent, n° 1 du PCF rectifie le tir en appelant, lui, clairement à voter Hollande le 6 mai. Mélenchon, sans doute un peu poussé par le PC, a cependant condescendu à faire amende honorable et à prononcer le nom honni de François Hollande ce lundi.
La montée du Front national s’inscrit dans celle des partis populistes dans beaucoup de pays européens, dans les pays de l’est (en Hongrie il tient le pouvoir), mais aussi dans des démocraties solides comme la Suisse et l’Autriche, les Pays-Bas, les Pays Nordiques. La « droite populaire » au sein de l’UMP, mais aussi et surtout Sarkozy lui-même ont, plus que les postures pseudos républicaines et laïques de la fille, contribué à dédiaboliser les idées xénophobes qu’il véhicule. Idées qui trouvent un terreau favorables dans toute une mouvance identitaires qui va de cathos tradis purs et durs jusqu’à de faux laïques qui, eux aussi, contribuent à banaliser un discours de haine. Il ne suffit donc pas de mettre en doute la santé mentale de sa candidate pour contenir un F-Haine qui a conquis de nouvelles terres notamment dans l’Ouest.
Il serait prématuré d’augurer des recompositions qui vont se faire après le 6 mai. Car rien n’est acquis. Avec Sarko le pire est toujours sûr. Boules puantes et œufs pourris risquent de pleuvoir. Une large marge d’incertitude règne quant aux reports de voix à droite : même si objectivement, Le Pen a tout intérêt à faire échouer le sortant, elle n’est pas propriétaire de ses voix du 1er tour ; Bayrou qui aurait objectivement encore intérêt à ne rien dire s’est piégé lui-même en disant qu’il se prononcerait… Il faut donc se garder de tout triomphalisme avant que n’apparaisse le visage du vainqueur le 6 mai à 20 h !
En bonus : Pierre Dac et Francis Blanche s'imposent :
Parti d'en rire
Oui
Notre parti
Parti d’en rire
Oui
C’est le parti
De tous ceux qui n’ont pas pris de parti
Notre parti
Parti d’en rire
Oui
C’est le parti
De tous ceux qui n’ont pas pris de parti
Sans parti pris nous avons pris le parti
De prendre la tête d’un parti
Qui soit un peu comme un parti
Un parti placé au dessus des partis
En bref, un parti, oui
Qui puisse protéger la patrie
De tous les autres partis
Et ceci
Jusqu’à ce qu’une bonne partie
Soit partie
Et que l’autre partie
C’est parti
Ait compris
Qu’il faut être en partie
Répartis
Tous en seul parti
Notre parti
Nous avons placé nos idéaux
Bien plus haut
Que le plus haut
Des idéaux
Et nous ferons de notre mieux
Cré vindieu de vindieu de vindieu
Pour que ce qui ne va pas aille encore mieux
Oui pour vivre heureux
Prenons le parti d’en rire
Seules la joie et la gaieté peuvent nous sauver du pire
La franche gaieté
La saine gaieté
La bonne gaieté des familles
Nos buts sont déjà fixés:
Réconcilier les oeufs brouillés
Faire que le veau d’or puisse se coucher
Apprendre aux chandelles à se moucher
Aux lampes-pigeons à roucouler
Amnistier les portes condamnées
A l’exception des portes manteaux
(tiens ça rime pas, ah oui je sais:)
C’est pour ça qu’y peuvent s’accrocher
Exiger que tous les volcans
Soient ramonés une fois par an
Simplifier les lignes d’autobus
En supprimant les terminus
Et pour prouver qu’on n’est pas chiches
Faire beurrer tous les hommes-sandwichs
Voilà quel est notre programme
Voilà le programme
Demandez le programme
On le trouve partout
Je le fais cent sous
Mais... pas d’hérésie!
- Notre parti
- Parti d’en rire, oui
- Non!
- Si!
- Crétin!
- Pauvre type!
- Abruti!
Et voici... ce qu’est notre parti
Oui!