Comme tous les lecteurs du remarquable ouvrage « Crise au Sarkozistan » le savent, l’état voyou essaie, malgré tout, de donner le change, l’illusion d’un état de droit.
Ainsi existe-t-il une Inspection du Travail chargée de vérifier que le « Code du travail » qui, en principe, limite l’exploitation des travailleurs par les oligarques (mais ceux-ci ne s’en soucient guère car, s’ils trouvent ces limites trop sévères, ils délocalisent comme on dit, c’est-à-dire qu’ils déménagent leurs usines ou services dans des pays, comme l’empire du Milieu, où tout ou presque est permis) et surtout par les moyens et petits patrons des fabriques, du négoce, des métiers de bouche, etc. Pas plus que les recouvreurs de taille ou de gabelle, ils ne sont bien vus par ce petit monde qui soutient L’Homme Fort ! Cette hostilité peut aller jusqu’au meurtre : deux d’entre eux ont été tués pour avoir tenté de faire leur travail.
Et pourtant « la justice est extrêmement laxiste quant il s’agit de droit du travail et le patronat délinquant est largement impuni : à Paris, en 2002, la conjonction des PV sans suite, des classements assumés par le Parquet, des relaxes et des dispenses de peine atteignent 71,25 % des procédures, en 2003 : 61,65 % des procédures, en 2004 : 62,03 % de procédures ! Depuis des années, pour plus de 60 % des infractions au Code du Travail relevées par procès-verbaux, le patronat parisien délinquant reste impuni. » (Siné Hebdo n° 21)
En revanche, cette justice, ou plutôt ces procureurs d’état, si compréhensive pour les pauvres patrons persécutés, a su traîner devant un tribunal correctionnel, l’un de ces Inspecteurs. Il est vrai que le dénommé Filoche est un drôle de paroissien. Ex-membre d’un parti un moment dissous par un prédécesseur du Numéro 1, il a depuis rallié un parti légal mais d’opposition, et a prétendu s’opposer aux aménagements d’un Code du Travail trop sévère encore pour les employeurs !
Ainsi a-t-il été accusé par un d’entre eux de « chantage au CE ». En fait, l’ignoble inspecteur voulait s’opposer à la mise à la porte d’une femme de retour de couches, femme qui, ensuite, sournoisement devint déléguée du personnel. Dans les deux cas la loi interdisait de la mettre à la porte. Et le patron devait demander l’avis d’un Comité d’Entreprise (le CE donc). Comme il ne se réunissait pas dans le délai prescrit (comme si une entreprise avait que cela à faire que de réunir un CE de … 2 personnes), l’impatient Inspecteur s’est rendu sur place. Là, les avis divergent : Filoche dit qu’il était dans le bureau du patron quand le CE votait à bulletins secrets dans une pièce à côté (pour le licenciement), le patron lui affirme que Filoche s’est imposé à cette réunion et a porté plainte pour chantage au CE. Bien qu’au Sarkozistan l’avis d’un employeur prime a priori sur celui d’un Inspecteur du travail, la plainte était si mal ficelée que le juge saisi, après quand même cinq heures d’interrogatoire du prévenu, apprenant que le chantage était absolument inutile puisque l’avis du CE-croupion n’était que consultatif, inclinait pour classer l’affaire.
Mais un hiérarque de la Nomenklatura veillait. Il avait été le chef détricoteur (on détricote beaucoup en Sarkozistan) du Code du travail pour le rendre plus doux aux employeurs, au nom de la flexibilté (c’est-à-dire la plus grande facilité à mettre l’employé(e) à la porte). Il n’avait pas apprécié les critiques de Filoche sur son détricotage, ni la révélation de ses accointances avec un commis de l’oligarchie métallurgiste, mouillé jusqu’au cou dans une histoire de caisse noire. Aussi, Jean-Denis Combrexelle, Directeur Général du travail, a “chargé” l’inspecteur dans une lettre accusatrice très virulente et le procureur d’état d’en profiter pour faire un “réquisitoire supplétif”, que le juge suivra. Ce DGT, apparemment, manque à tous les usages de la bureaucratie sarkozistanaise qui est de couvrir le subordonné : ainsi le policier coupable d’une bavure, comme ils disent, peut même compter sur l’appui de son ministre.
Non content de cela, l'aparatchik refuse à sa bête noire le bénéfice de l’aide juridictionnelle : une disposition qui veut que tout membre d’une bureaucratie d’état attaqué en justice, dans l’exercice de ses fonctions, voit sa défense assurée par son administration. Sauf s’il s’agit d’une affaire privée ou si le subalterne a commis une faute personnelle injustifiée dans l’exercice de sa fonction. C’est ce qu’a dû estimer –sans même s’en expliquer (au Sarkozistan, il ferait beau voir que le supérieur ait à justifier ses décisions auprès de son subordonné) – le sieur Combrexelle.
De son côté la jeune femme a gagné dans 12 procédures sur 14 engagées contre son taulier qui s’est acharné contre elle depuis 2004. Taulier qui reconnaît cyniquement que des cadres font des « heures philanthropiques », c’est-à-dire des heures supplémentaires non rémunérées (c’est un des slogans du Numéro 1 : Travailler plus pour que le patron gagne plus). Malgré cela, une justice qui se prétend débordée va quand même envoyer devant un tribunal le sieur Filoche devenu, entre temps, retraité !
A noter que l’avocat du patron, Me Varaut, qui a pu bénéficier d’un organe de presse tenu par l’oligarchie pour salir l’Inspecteur du travail, est celui qui défend un certain Guillaume de Villiers de Saintignon (et son père).
Le correspondant de l’Agence de Presse Ouzbek ayant été brutalement rappelé dans sa capitale (il semblerait que son directeur n’ait pas apprécié son dernier article sur Stéphane Hessel, un jeune vieillard de 93 ans), nous avons pu trouver un traducteur pour cet article de Bachy Bouzouk, correspondant de nombreux médias de Syldavie. On notera que ce journaliste Syldave a apprécié les 1ers articles de son collègue Ouzbek.
Pour appuyer Gérard Filoche : http://www.solidarite-filoche.fr/
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