Essaouira, in the rain ! Eh oui, quand il pleut en novembre, il pleut. Le vent en prime. Les taxis en moins.
Car les avenues – et en particulier celle qui suit la plage – ont vite plus de dix centimètres d’eau. Mais, rassurez-vous, si le vent fort, voire violent, est fréquent, les déluges de pluie le sont moins. Avec la pluie, les oueds grossissent brutalement, entraînant leurs berges. La mer, ensuite, se teinte de ces alluvions.
Essaouira est en fait une ville neuve… du XVIIIe siècle. Le sultan Mohammed ben Abdallah, en 1764, fait appel à un architecte français, mais qui mangeait un peu à tous les râteliers, puisqu’il avait travaillé pour la perfide Albion, à Gibraltar, Théodore Cornut.
Son nom portugais de Mogador – repris pour une vaste opération golfo-immobilo-touristique – est trompeur : les portugais ont certes construit un château-fort, mais n’y sont restés que quatre ans. Avant y étaient passés les phéniciens, puis les romains attirés par la production de la pourpre à partir du murex des îles purpurines.
Surprise, alors que j’allais chercher la presse françaouie chez de peu aimables – ce qui est très rare – marchands de journaux, je suis tombé sur une manif ! En tête, une handicapée en chaise roulante et derrière une banderole en anglais.
Pour comprendre – que les grands spécialistes me pardonnent des explications un peu rapides – il faut savoir que les mellahs sont les quartiers juifs au Maroc. Pas des ghettos, en ce sens qu’ils avaient pour but de protéger les juifs et que, dans la journée, ils étaient ouverts. Essaouira qui fut baptisé le port de Tombouctou comptait plus de juifs que de musulmans (17 000 contre 10 000). Mais, après la guerre des six jours en 1967, le Mellah s’est progressivement vidé de ses habitants (sans que le pouvoir marocain ait fait quoique ce soit pour les pousser dehors : au début des années 70 le marché couvert de Meknès, en ville nouvelle, comptait encore une charcutière juive qui a dû fermer sa stalle avec la diminution des clients européens).
Le Mellah d’Essaouira, qui a connu des incendies, a été squatté par des populations d’origine rurale. Sa rénovation, ô combien coûteuse, se ferait au détriment de ses misérables nouveaux occupants. D’où cette manif.
Il faut noter qu’Essaouira reste une ville des trois religions du livre ; les cimetières juifs et chrétiens sont respectés ; une synagogue fonctionne encore dans le Mellah ; l’église catholique fait toujours retentir ses cloches le dimanche. Et bien sûr les mosquées appellent à la première prière, avec parfois beaucoup de zèle et de longueur (et aux suivantes, bien sûr).
Pourquoi donc, cette ville du vent séduit-elle autant ? Son climat certainement. Avec une t° moyenne de 15° en janvier-février et de 20° en juillet-août, ni froidure ni canicule. Mais, entre cette médina dont on ne se lasse pas d’explorer ruelles et impasses, son port où on trouve poissons à profusion, son bord de mer où on déjeûne presque toute l’année en terrasse et surtout son ambiance que ne gâchent à peine quelques résidents étrangers un peu m’as-tu vu, il fait bon vivre à Essaouira !
En complément :
Quelques images réunies dans un album.
Et bien sûr aussi "Les portes d'Essaouira"