Le FN ? est-ce de l’intox ? Le Front de gauche ou le PCF ? les écolos ? le PS ? en tout cas, le perdant est l’UMP !
Daniel Schneidermann, reprenant une déclaration de Martine Aubry, nous révèle qu’ « en nombre de suffrages, le Front National a baissé entre le premier tour de 2004, et le premier tour de 2011. Oui, vous avez bien lu, baissé (d'où le titre, aguicheur mais exact, de ce billet). Il y a eu moins de bulletins FN glissés dans l'urne en 2011, qu'en 2004 (1 490 315 contre 1 379 902, plus de 100 000 voix perdues) ». Pour être précis une perte de 110 413 voix ! Pas de quoi crier à la poussée du FN… sauf que, le nombre de votes exprimés au 1er tour a baissé de 25 % entre 2004 et 2011, celui du FN d’à peine 7,5 % et donc son pourcentage des suffrages exprimés au 1er tour de 12 à 15 % (et de meilleurs calculateurs que moi le portent à 19 % en moyenne dans les cantons où le FN est présent). Alors parler d’intoxication quand des observateurs notent cette poussée, c’est peut-être s’auto-intoxiquer. Et cela en dehors de l’argument de la demoiselle Le Pen, sur la baisse du nombre de candidats FN qui dénote plutôt une baisse de l’implantation (en fait l’impossibilité de financer à perte des candidatures de principe : il n’y a plus de sous dans les caisses FN).
A l'Ouest du nouveau ?
Quand Emmanuel Todd estime en substance, « que le vote Le Pen s'explique désormais au moins autant par des motifs économiques, que de racisme ou de xénophobie » ce dont témoignerait « la progression importante du Front national vers l’ouest, là où l’immigration demeure un phénomène insignifiant », cela demanderait sans doute une analyse approfondie. Une autre hypothèse – mais cela nécessiterait d’avoir les votes par tranche d’âge – pourrait être que le vote FN dans l’Ouest attire des retraités*. Ainsi, le seul canton vendéen qui place une candidate FN, parachutée, en 2e position au 1er tour(18,78 %, elle fera plus de 30 % au 2e) est celui de Talmont, un canton côtier. A Saint-Nazaire port industriel, le FN n’est présent que sur 1 des 2 cantons renouvelables. S’il fait un score médiocre à La Baule (13 % quand même), il est au dessus de sa moyenne nationale aux Sables d’Olonne (16,58). Les fantasmes d’invasion mauresque, le cimeterre entre les dents, n’ont point besoin de se nourrir de la présence d’immigrés. À l’époque où le Vicomte Le Jolis de Villiers de Saintignon, voyait des mosquées partout, j’ai pu entendre une jeune femme de notre pays angevin, réputé pour sa douceur, prévoir la transformation de nos saintes églises en impies mosquées. Quand je lui ai fait remarquer que, vu la fréquentation des églises, ce serait en rentabiliser l’entretien par les communes que de les musulmaniser là où la demande existe – ce qui n’était pas le cas d’ailleurs dans cette cité des roses – elle a failli s’étouffer de rage.
Le Front de gauche : une "alouette" de Parti de gauche, un "cheval" de
PCF
Du côté opposé, le Front de Gauche (FG) qui, lui aussi crie victoire, l’analyse est plus compliquée. Ses candidats se sont présentés sous trois étiquettes : PCF+FG, Parti de gauche(PG)+FG, FG tout seul. Le parti de gauche n’existait pas en 2004. Et pour arranger le tout Guéant a bien compté les deux premières étiquettes, mais à rangé la 3e dans le fourre-tout divers gauche. En ce qui concerne le PCF, il ne perd que 24 % des voix au 1er tour. Au total PCF+PG font 9 %+x (les voix comptées en divers gauche). En sièges, le PCF passe de 108 à 114 et le PG en ajoute 5. Une dizaine de conseillers généraux de plus, ce n’est pas négligeable. Mais derrière la belle façade de Front uni, il y a quelques fissures. En Vendée, un PCF brejnévien a imposé sa loi aux autres parties prenantes du Front de gauche. Alors que les chances de gagner un siège était nulle, le PC a concédé une candidature estampillée PG+FG et 3 étiquetées de FG seul. La tension a dû être encore plus vive en Loire Atlantique, puisque le Front devient bifront dans 4 cantons avec affrontement de candidats PG et PCF se réclamant du FG !
Allez les verts ?
Finalement, les seuls qui ont progressé de 2004 à 2011, ce sont les écolos. 50 % de voix en plus entre « Les Verts » (2004) et EELV (2011). Et cela, bien qu’ils ne soient présents que dans 1200 cantons, contre 1600 par exemple pour le FG. Car ils ont joué le jeu unitaire avec le PS dans certains départements. Comme en Vendée où on ne trouve que 2 cantons sur 15, avec double candidature au 1er tour (PS et EELV). Pas du tout en Loire Atlantique où la division systématique a fait certainement perdre des plumes à la gauche et incidemment privé EELV de deux sièges, le privant de toute représentation (sur la quarantaine de cas nationaux où EELV, bien qu’arrivé derrière, se maintient au 2e tour, 6 se situent en Loire Atlantique). Mélenchon a clamé que le Front de gauche était la 2e force de gauche. Sur ce coup là, pas nettement en nombre de voix si l’on rapporte le nombre de voix au 1er tour au nombre de candidats, mais sûrement en nombre d’élus. Mais aux régionales Europe écologie faisait 12 %, le FG 6 %. L’écart, en faveur d’EELV, était encore plus grand aux européennes.
La victoire PS est un peu à relativiser puisque la perte de voix est de 29 %. Mais le grand perdant est l’UMP qui perd 1 million de voix (-40%) (compte non tenu de l’UDF qui existait encore en 2004).
Quant aux spéculations sur l’abstention et celles sur le retour ou pas au bercail frontiste de voix FN siphonnées par Sarkozy en 2007, je laisse les brillants analystes nous livrer leurs conclusions.
Cette élection montre – comme les sondages finalement – que l’UMP est au moins encalaminée et peut-être en train de prendre un peu l’eau (Copé va écoper) ; que le PS ne bénéficie que de petits vents (le souffle était plus net aux régionales) ; le FN lui confirme sa 3e place… Quant au Front de gauche, il a un peu requinqué… le PCF, le PG, sans vraies structures, ni implantations, n’étant qu’une force d’appoint.
La Gauche en sort majoritaire, mais toujours fragile.
* Si l'on en croit une enquête IPSOS - faite en ligne, ce
qui pour les plus de 60 ans, introduit un sérieux biais, puisque les connectés ne sont pas les plus âgés, ni les moins diplômés - les retraités n'auraient été que 14 % à choisir le FN au 1er tour
(contre 24 % par exemple des ouvriers) sauf que les plus de 60 ans votent à 63 % et les ouvriers à l'inverse à 33 %. Et cette moyenne nationale ne donne pas d'indication sur les variations
régionales.