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Paris-Match nous invite à une rencontre avec Patrick Buisson, l’éminence grise de l’Elysée. On voit d’entrée que les sujets politiques ne sont pas très familiers à cet hebdomadaire, puisque l’article crédite le FN de 11,7 %, alors qu’il eut au 1er tour des cantonales 15,2 %. « Ce score élevé est (…) une validation de tout ce que Patrick Buisson, le conseiller de l’ombre du chef de l’Etat, observe dans les sondages, les urnes et la géographie française depuis 2005. » Patrick Buisson aurait bluffé Sarkozy, cette année 2005, en pronostiquant la victoire du non au référendum.
Papa était anti-communiste maurassien. Fiston dirigera Minute, puis Valeurs actuelles, publiera un livre à la gloire de l’OAS. Il conseillera de Villiers dont il dirige la campagne pour les élections européennes de 1994 et la campagne présidentielle de 1995.
Sa prédiction de 2005 fera qu’il soit approché par Nicolas Sarkozy en 2005, alors ministre de l'Intérieur, qui en fait un de ses proches conseillers, équilibrant le gaullisme social (?) d'Henri Guano. La légende veut, qu’en suggérant d’annoncer un ministère de l’immigration et de l’identité nationale, il aurait « largement contribué à l’élection de Nicolas Sarkozy en « siphonnant » les voix du FN. »
Ce qui est sûr, c’est qu’avec son cabinet Publifac, ce discret colosse sexagénaire, passionné de chant grégorien a réussi à ponctionner 1,5 million d’euros pour l'année 2008 (avec notamment des sondages « opinion way »facturésplein pot à l’Elysée, alors qu’ils paraissaient sur Le Figaro ou LCI).
Cet expert en analyse, note que l’électorat FN se compose pour l’essentiel, d’un électorat populaire qui n’a rien à voir avec l’extrême droite. Et tous ces petits, ces sans-grade se sentent de plus en plus abandonnés. Il accuse : «Le mépris dans lequel les tient la classe dirigeante a quelque chose de sidérant. Nos élites sont mues par une invraisemblable prolophobie dont elles n’ont parfois même pas conscience. »
Comme le note, Aphatie, dans le Grand Journal, le conseiller d’un président parlant d’ « élites », auxquelles il appartient et dénonçant une prolophobie alors que le gaz augmente de 5%, le gouvernement refuse des tarifs sociaux pour des carburants taxés à 70 % et s’apprête à abroger l’impôt sur les grandes fortunes, avec des denrées alimentaires de base en hausse, est un peu indécent.
Ne reculant devant rien, notre brillant analyste dénonce ceux qui ont prôné le front républicain, de Fillon à NKM et à Valérie Pécresse : ce sont des super-bobos coupés de la France qui souffre. Patrick Buisson résume : « Avant d’être une posture politique, le front républicain est d’abord un réflexe de classe et de caste. » Super gauche notre ex ami de Pierre Sergent de l’OAS !
Le super conseiller, bien que n’ayant pas pratiqué l’ENA a un plan de bataille. En trois points.
Sur l’immigration, beaucoup plus de fermeté (c’est la nouvelle politique Guéant) (Diantre depuis 2002, c’était le laxisme ?).
Sur l’identité nationale, un débat qui débouche enfin sur des actes politiques lourds comme un nouveau code de la laïcité (un débat bâclé en 2 heures).
Enfin, sur le pouvoir d’achat, il plaide pour une grande loi de réhabilitation du travail*. (Alors là ça troue !)
On mesure, dans ces trois propositions, toute la puissance analytique et conceptuelle de M. Buisson. Et toute la pertinence affinée, dans le choix de ses conseillers, de celui qui fait président.
Il conclut magnifiquement : en 2012, il ne voit qu’un obstacle à la réélection de son mentor. « Si la France des petites gens ne va pas voter. » Ô ces « petites gens », comme ça fleure bon l’épais paternalisme des bons bourgeois d’autrefois.
Aphatie, bien inspiré, conclura : Voilà quelqu’un d’extrême droite qui parle comme la gauche et qui en fait n’est qu’un bourgeois des années 50 !
* Cette loi de « réhabilitation du travail », censée redonner du pouvoir d’achat (le président du pouvoir d’achat, voilà une idée qu’elle est neuve et crédible) a donné lieu à deux versions sur le site de Paris-Match. D’abord Buisson "plaide pour une grande loi de réhabilitation du travail ; elle lutterait contre l'assistanat en réservant par exemple le RSA et le RMI aux Français qui ont un travail." Du put FN donc. Mais, Paris Match a remis en ligne une autre version en remplaçant le mot "Français" par "bénéficiaires".
La journaliste a expliqué le sens de cette phrase : Il a dit qu'il fallait, en contrepartie des allocations, que les gens qui les touchent aient un travail.
A noter que ce conseiller ignore que le RSA remplace le RMI (et aussi l’Allocation de Parent Isolé). Il est destiné à assurer, aux personnes en état de travailler ou pas, un revenu très minimum, à peine 470 € mensuels ! Et aussi d’éviter que des personnes réduites à des emplois à temps partiels ne voient pas leurs revenus augmenter. En fait, avec ce profond mépris de bourgeois nanti pour les fainéants de pauvres, Buisson veut cyniquement supprimer le minimum social.
Source : Nel Obs