« Nous assumons les conséquences de notre engagement dans la Résistance contre l'offensive islamique », titre un torchon virtuel de pseudos-laïcs et vrais xénophobes, dont l'anonyme auteur, dans un humour visiblement involontaire écrit quelques lignes plus loin : « Bien sûr, nous ne nous voilons pas la face ».
La burqa est évidemment le sujet quasi unique. « Ni voile, ni burqa, voilà ce qu'attendent les Français qui aiment la France ! » par Français entendons les français de souche (on n'est pas loin de l'anti-France des années pompidoliennes). Le Monsieur qui écrit cela se dit philosophe : il doit puiser sa pensée profonde au coin du zinc de son bistrot.
Au passage une petite couche d'anti-socialisme : « Madame Aubry, vous utilisez les arguments des islamistes pour justifier la non-interdiction de la burqa » : entendez par islamistes, des musulmans français qui, honte et scandale, prétendent donner un point de vue autre que celui que prônent nos prétendus républicains. Ils sont pour la totale liberté d'expressions, à condition que ce soit la leur ! Autre bête noire des folliculaires, les islamo-gauchistes : « Les trotskistes et la burqa », ce titre annonce des attaques sévères contre le pauvre Besancenot.
L'une interpelle celui qui fait président : « Nicolas Sarkozy, comment osez-vous dire que la burqa n'a rien à voir avec l'islam ? », tandis qu'un autre, plus modeste se contente d'une « Lettre à mon député concernant le voile intégral » (après, avoir, dans un rapprochement hardi, comparé la burqa au lancer de nains).
« L'affichage de l'islam est un trouble à l'ordre public » : une telle assertion est particulièrement sournoise (et liberticide) car qui décide de cet affichage et en quoi l'affichage d'une croyance quelconque (musulmane, juive, chrétienne, boudhiste, etc.) serait cause de trouble de l'ordre public. La formule n'est évidemment pas innocente car la loi de 1905 autorise les manifestations religieuses, sauf si elles troublent l'ordre public. Ainsi, des maires de l'époque, anti-cléricaux convaincus, qui voulaient interdire sonneries de cloches et processions, ont été condamnés par la juridiction administrative. Et aux parlementaires qui voulaient faire interdire le port de la soutane, Aristide Briand répondait que la République n'allait pas s'abaisser à réglementer les tenues vestimentaires.
On ne peut être que d'accord avec le titre d'un interview : le voile est un marquage de racisme, ô pardon j'avais mal lu (je me disais aussi : enfin un peu d'autocritique) « le voile est un marquage et un racisme ».
Pour terminer cette revue rapide du sommaire, ce titre qui résume toute l'étroitesse d'esprit et le fanatisme de cette clique : « Au Caire, Obama a parlé en musulman militant ».
Voir aussi :
Bêtisier laïciste (de A à H)
Bêtisier laïciste (de I à P)
Bêtisier laïciste (de Q à Z)
N.B. Pour éviter (autant que faire se peut) des malentendus, je précise que burqa, comme niqab et autres tenues, qui n'ont d'ailleurs absolument rien de traditionnelles dans les pays du Maghreb me sortent par les yeux (je n'en ai jamais vu en France), mais, avec Briand, je trouve absurde que la République s'abaisse à légiférer sur ces déguisements grotesques, qu'il faut traiter par le mépris et la dérision. Marre de ces lois de circonstance qui surfent sur une vague d'émotion artificielle !
« Grâce à Dieu, je suis athée » comme disait malicieusement Luis Bunuel : je ne me laisserais donc pas embarquer dans cette « croisade » xénophobe à laquelle se vouent les pseudo-laïcs.
Pour compléter deux extraits, le 1er concluant un édito du Monde sur la burqa, le second d'une chronique de Caroline Fourest (à lire en entier, car elle dénonce aussi l'expulsion possible vers Téhéran d'un homosexuel iranien, en transit en France vers la Belgique, ce qui veut dire une condamnation à mort : ce mort là, M. Besson, vous l'aurez sur la conscience, si vous en avez une) :
"Prohiber par la loi le port de la burqa ou du niqab soulèverait, en effet, deux questions plus qu'épineuses. D'une part, au nom de quel argument ou de quel principe interdire à des femmes majeures une tenue vestimentaire, quelle qu'elle soit, dans l'espace public, sauf à confondre le législateur français avec une assemblée d'oulémas ? Ce qui a été décidé pour les établissements scolaires, précisément parce qu'il s'agissait des jeunes et de l'école, trouve, là, sa limite. D'autre part, sauf à imaginer une détestable ou ridicule police des moeurs, comment appliquer une telle interdiction, si le choix en était fait ? Beaucoup plaident avec énergie pour un islam moderne et tolérant. Ils ont raison. Il faut convaincre plutôt que légiférer."
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2009/06/26/burqa-en-debat_1211811_3232.html
[...] sur les trottoirs de France, des Samia ou des Marie-Christine ont choisi leur camp. Celui de la lutte contre l'émancipation. Elles prennent le voile intégral pour rester "pures", se protéger du monde extérieur (tous les autres). Elles ne comprennent pas que leurs grandes capes noires choquent. Elles, ce qui les choque, c'est le manque de pudeur, "tous ces pédés dans la rue" et ces "femmes qui ne se marient pas". Elles sont nées en France, sont allées à l'école, elles ne manquent ni d'éducation ni d'intégration. Elles sont françaises et elles ont choisi librement... l'aliénation. Pour faire plaisir à l'homme qu'elles aiment ou par fierté. Pour montrer qu'elles sont plus pieuses que les autres. Leur voile n'est dans aucun Coran. C'est un uniforme politique encouragé depuis l'Arabie saoudite. Il est censé être plus pudique. Avec lui, pourtant, on ne voit qu'elles. Elles le portent comme on entre dans une secte, avec la foi aveugle des convertis. Mais les groupes salafistes qui leur suggèrent ce choix, eux, sont dans une démarche politique. Comment ne pas s'interroger sur le message qu'ils envoient à travers le corps des femmes ?
Si nous vivions dans un monde où le Ku Klux Klan avait pris le pouvoir aux Etats-Unis et pendait des Noirs... que penserions-nous si des Français se mettaient à porter leur cagoule blanche pour faire leurs courses ? Le fait qu'ils soient consentants suffirait-il à nous rassurer ? Suffit-il de déguiser son sectarisme politique en religion pour que tout soit permis dans l'espace public ?
Ce sont toutes ces questions qui vont ressurgir à l'occasion du débat qui s'ouvre. Elles sont passionnelles. Et pourtant, il faudra mener celui-ci avec sang-froid. En s'écoutant. Les femmes portant le voile intégral diront leur vérité. Elles devront aussi entendre l'effet produit par leur choix en société. Chaque mot de travers sera guetté par les incendiaires pour propager soit le rejet de l'islam soit l'uniforme du martyr. Entre les deux, la Commission va devoir tâtonner. Peut-on convoquer la laïcité pour réglementer le port vestimentaire d'adultes dans la rue ? Au risque de lui rendre un bien mauvais service et d'amalgamer ce débat avec celui sur les signes religieux à l'école ? Peut-on invoquer la protection de la "dignité de la femme" ? Dans ce cas, il faudrait interdire tellement de choses sur la voie publique... Pourquoi ne pas se contenter d'exiger que tout le monde, sans exception, accepte de s'identifier pour des raisons de vivre-ensemble et de sécurité ? Faut-il renoncer à cette exigence pour ne pas ouvrir une brèche ? Le débat tranchera.
Mais ne nous y trompons pas. On ne fera pas changer d'avis Samia ou Marie-Christine.