L'arrestation au petit matin d'un journaliste, l'insulte subie devant un de ses fils, la double et humiliante « fouille au corps » et sa comparution devant une juge d'instruction, coupable de ces atteintes, pour une plainte en diffamation du fondateur de free (déjà débouté deux fois), a provoqué une (légitime) vague de protestations. Elle pose cependant des questions plus générales.
Au moment où on nous dit que police, gendarmerie, justice sont surchargées, est-il normal que l'on mobilise trois policiers à 6h du matin pour se saisir d'un homme qui, au pire, n'aurait commis qu'un délit non passible d'emprisonnement ; qu'ensuite deux gendarmes soient à leur tour mobilisés pour le conduire chez une juge qui n'a rien de plus urgent à faire que d'instruire une plainte aussi mineure et dont le fondement était au moins fragile ?
Ce gaspillage d'un temps, qu'on suppose précieux, n'est pas isolé. Qu'on se souvienne de ce professeur de techno qui avait balancé une baffe à un fils de gendarme : il avait fallu une garde à vue de pas moins de 20 h pour lui faire avouer un geste... qu'il ne niait pas ! Et son collègue dépressif, qui, lui, avait été accusé à tort par un élève, avait aussi subi une assez longue garde à vue, peu avant de mettre fin à ses jours.
Le deuxième aspect est la propension des forces dites de l'ordre à insulter gratuitement, à froid, le présumé innocent. Ainsi le journaliste de Libé est qualifié de « pire que la racaille ».
Dans une affaire, qui n'a eu d'échos que dans la presse locale, Le Café Pédagogique et l'émission de D. Mermet sur France Inter, un prof témoigne de l'attitude parfaitement impolie et incorrecte de gendarmes qui, avec chiens, dans une opération anti-drogue, humilient des adolescents d'un C.F.A. : ainsi, sortant d'une classe de BTS l'un clame « Salut les filles », alors que, bien sûr, il n'y a que des garçons.
Et ce sont les mêmes forces de l'ordre qui multiplient les plaintes pour « outrages » qui encombrent les tribunaux. Quand ce n'est pas pour rebellions : il n'est que de voir l'affaire Eunice Barber où sa version d'une arrestation musclée ne tiendra sans doute pas la route au final devant celle de pas moins de sept policiers qui se sont mobilisés pour « maîtriser 72 kilos de muscles », comme ose dire une de leur avocate, et la jeter comme un paquet sur le sol d'un fourgon. Plus récemment, l'affaire Mensah (au moins 90 Kg de muscles) était de la même eau. Les « bavures » sont d'ailleurs presque systématiquement classées sans suite par la prétendue police des polices.
Bien sûr, elles frappent d'abord et avant tout les jeunes (contrôles d'identité arbitraires assorties d'insultes et/ou d'humiliations), les minorités dites visibles, mais l'affaire du journaliste Vittorio de Filippis est là pour rappeler à tous et à chacun que nul n'est à l'abri.
Un peu au diapason de cette note, pourquoi ne pas écouter "Comme elle est belle ma France" de Monsieur Pyl
PS Comme de bien entendu, dans l'affaire de Filippis, Alliot-Marie soutient la police ; Dati, dans ce cas, soutient aussi la juge ; plus surprenant Frédérix Lefebvre, dit le pitbull, aurait comme des états d'âme : gageons que ça lui passera plus vite que ça lui est venu. Les réactions des deux ministres démontrent, si besoin était, que ça n'est pas une bavure isolée, mais le fruit d'un système mis en place par le sarkozysme.
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