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16 mai 2008 5 16 /05 /mai /2008 17:38
Lionel Jospin et Claude Allegre

Lionel Jospin et Claude Allegre

Je vous parle d'un temps que les moins de quarante ans ne peuvent pas connaître : la F.E.N. (Fédération de l'Education Nationale) en ce temps là était considérée comme l'administration-bis.

Mais la FEN qu'est-ce ?

Pour aller vite, au moment de la scission CGT/FO en 1947 la FEN-CGT décide de devenir autonome pour ne pas scissionner, en attendant une hypothétique réunification. Mais en son sein coexiste des tendances : U.I.D. (Unité Indépendance et Démocratie), socialisante, majoritaire chez les instits (SNI) et U. A. (Unité et Action), PC, majoritaire dans le secondaire (SNES) (la 3e tendance EE, pour école émancipée, joue un rôle plus marginal). Les syndicats de la FEN sont largement majoritaires, en particulier dans le 1er degré, même s'ils doivent compter avec le sgen-CFDT (bien implanté dans l'Est, en développement dans l'Ouest) et, uniquement chez les profs de lycée, avec le SNALC, syndicat de droite. La FEN fut toujours dirigée par des secrétaires généraux issus du SNI et d'UID.

 

Or donc, après la victoire de Mitterrand en 1988, Lionel Jospin devint Ministre d'état, Ministre de l'Education Nationale, dans le ministère Rocard.

Il engagea,  l'année suivante, des négociations sur la revalorisation des enseignants. Entre temps, les dirigeants de la FEN et les responsables de la commission éducation du PS* (chapeautée par un certain Laurent Fabius, dont Jospin avait fait son ennemi juré) s'étaient mis d'accord sur un compromis liant revalorisation et redéfinition du métier d'enseignant. Le SNES, lui, ne voulait absolument pas entendre parler d'un tel accord.

Michel Rocard, 1er ministre, avait clairement indiqué qu'il ne pouvait y avoir de revalorisation sans contrepartie.

 

Jospin cependant capitula en rase campagne devant le SNES.

Sur la revalorisation d'abord en créant une hors classe pour les certifiés et agrégés et en y ajoutant une Indemnité de Suivi et d'Orientation des Elèves (ISOE) sans obligations clairement définies.

Sur la non création d'un corps de professeurs de collèges (d'égale rémunération avec celui des lycées, mais pouvant enseigner deux matières). Cette deuxième capitulation était lourde pour l'avenir du SNI dont l'objectif affiché était d'étendre son champ de syndicalisation à tout l'enseignement obligatoire (1er degré et 1er cycle du secondaire). Lourde aussi pour la survie des petits collèges.

En lots de consolation, pour le SNI, outre la création des professeurs des écoles (carrière égale à celle des certifiés), une revalorisation substantielle des PEGC.

 

Mais les dirigeants de la FEN, totalement déconsidérés, ne s'en remettront pas, d'autant que le SNES dopé par cette victoire totale fera fi de toute solidarité fédérale prenant le contre-pied de toutes ses orientations.

Jusqu'à ce que cette FEN éclate en 1992 et que UID, si elle resta maîtresse de la vieille maison, n'eut plus qu'à contempler des murs désertés. Le SNES, ayant créé une fédération rivale (FSU) avec des syndicats rivaux, vit son nouveau syndicat des enseignants du primaire l'emporter sur l'ex-SNI.

 

Mais en même temps, le taux de syndicalisation en prit un sérieux coup.

 

Presque vingt ans après, mais sans aucune contrepartie à proposer (si ce n'est une réduction des postes), la commission Pochard essaie de rattraper ce raté de Jospin (rattrapage, déjà tenté, mais avec quelle maladresse, par C. Allègre, ex-bras droit de Jospin, qui estimait qu'il avait été cocufié par le SNES, SNES qui est ressorti conforté du bras de fer).

 

* J'ai eu appartenu à cette commission nationale, au lendemain du congrès de Metz au titre du Courant C (avec G. Lindeperg et M. N. Lienemann qui, elle, n'y mettait jamais les pieds). A cette époque, elle était animée par Louis Mexandeau et surtout Jean-Louis Piednoir, dans un climat de travail serein qui fournira, en partie au moins, les axes du ministère d'Alain Savary, dont je ne me lasserai pas de dire qu'il fut un des plus grands ministres de l'éducation nationale de la 5e république. Après 1981, l'atmosphère de cette commission devint beaucoup moins respirable quand Luc Soubré en prit la tête.

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