Le hasard fait bien les choses. Au moment où le haut fonctionnaire Léger remettait un rapport conforme sur la suppression du juge d’instruction, le Parquet de Paris estimait, en toute indépendance bien sûr, qu’il n’y avait pas lieu de donner suite aux plaintes concernant la nomination d’un certain Pérol à la tête de l’union Caisses d’épargne-Banques Populaires.
Tout commence en 2005, quand les deux groupes décident de fusionner leurs deux banques d’affaires Ixis et Natexis. Or, François Pérol, après avoir été directeur adjoint du cabinet de Francis Mer, puis de Nicolas Sarkozy, au ministère des finances, pantoufle déjà en entrant à la banque Rotschild. Ce passage au privé avait été jugé d’une régularité douteuse. Mais, à l’époque, la commission de déontologie (dont la saisine était obligatoire), avait donné son aval, sous réserve qu’il ne traite pas d’affaires qu’il a eu à connaître dans son ancien poste. Il n’en a pas tenu compte, puisqu’ayant eu à gérer l’acquisition d’Ixis par les caisses d’épargne, il s’empresse, chez Rotschild, de pousser à la fusion Ixis-Natexis, qui aboutit à Natixis. Or, avec la crise, le nouvel établissement grevé d’actions pourries, style subprimes, va perdre en quelques mois des milliards d’euros. L’état va donc recapitaliser les deux groupes. Et qui est chargé du dossier au cabinet de celui qui fait président ? François Pérol ! Fort de ce renflouement de cinq milliards, il va forcer à la fusion des deux groupes, du coup.
Pour Sarkocescu, rien que de plus normal que de le nommer à la tête du (futur*) groupe. Il affirme, à Rome** : « La commission de déontologie a eu l’occasion de donner son point de vue », laissant entendre qu’il était positif. Mensonge éhonté ! En fait, Guéant, le Secrétaire général de l’Elysée, avait saisi le président de ladite commission d’une question très générale sur les départs des membres des cabinets ministériels vers le privé. La réponse très prudente et nuancée ne concernait donc pas directement le cas Pérol. Mais, s’appuyant sur ce courrier, Guéant s’est bien gardé de saisir réellement la commission (dont, avec l’arrivée de Sarkozy, la saisine n’est plus obligatoire).
Impossible donc d’avoir le vrai point de vue de la commission ! Restait la possibilité d’avoir le point de vue de la justice. Il n’en sera rien. Le Parquet a classé le dossier dans la rubrique : circulez, y’a rien à voir !
Voilà donc qui préjuge (si l’on peut dire) bien de la réforme, annoncée ex abrupto par l’ado capricieux qui fait président, consistant à remplacer un mauvais système, par un pire ! Remplacer un juge d’instruction parfois défaillant, par des magistrats aux ordres !
* À l’époque la fusion n’était pas finalisée.
** Ses prédécesseurs avaient pour principe de ne pas traiter d’affaires intérieures quand ils étaient en visite officielle à l’étranger.
commenter cet article …