Souvenez-vous, il y a à peine deux semaines, nos chaînes de TV d’ironiser sur ces gymnases, réquisitionnés pour la vaccination, quasiment vides. Eh bien, les mêmes, sans vergogne, d’ironiser sur les gymnases où les files d’attente s’allongent, comme dans une boucherie polonaise du temps de Jaruselski !
Dans un commentaire à un fait divers sur Le Post (Grippe A : une enseignante dans le coma), le 25 novembre, un soi-disant enseignant écrivait : « Depuis la rentrée de Toussaint, j'ai en moyenne 6/8 élèves absents. Je ne me ferai pas vacciner pour autant. J'essaie de prévenir : homéopathie/huiles essentielles/vitamine C/citron chaud & miel/cure de cuivre-or-argent/lavage de mains fréquents... ». J’ajoutais : pourquoi pas l’eau de Lourdes.
La chronique de François Reynaert, dans le Nel Obs du 26/11, intitulée « Injection, votre honneur » parlait avec humour de « l’échec pathétique de la campagne de vaccination contre la grippe A ». Il notait : « On sent qu’il y a des gens qui seraient capables de demander la médaille de la Résistance parce qu’ils ont osé déclarer crânement à leurs copains de bistrot qu’ils n’iraient pas se faire faire une piqûre, par ailleurs facultative ». Il faisait un sort au passage, à tous ceux qui proclamaient qu’on a fait « un cadeau à l’industrie pharmaceutique ». « Mais s’il s’agit de vaccins, à qui faire appel ? A Picard Surgelés ? ».
Mais souvenez-vous encore : tous les obscurantistes anti-vaccins de s’appuyer sur les 60 % de professionnels de la Santé qui refuseraient le vaccin. Bien la preuve que…
Reynaert prudemment notait : « Je sais, il ne faut pas s’avancer trop vite, rien n’est plus mouvant en ces domaines que les certitudes de l’opinion. »
La preuve : maintenant, sans vergogne non plus, les représentants des généralistes réclament à cor et à cri le droit d’injecter un vaccin qu’ils rejetaient naguère !
Les anti-vaccins deviennent inaudibles, avec leurs imprécations complotistes parfaitement grotesques. L’opinion versatile a viré.
Dans les médias, rien de spectaculaire pourtant. La presse locale, plus ou moins relayée par des sites, qui fait état de la mort d’une jeune femme de 28 ans, apparemment sans autres affections… un enfant de huit ans, lui aussi, sans autres symptômes… un homme de quarante ans, qu’on croyait guéri… le virus qui mute en Norvège… puis en France… Statistiquement, sans doute, une mortalité du même ordre que la grippe saisonnière, voire moindre. Mais dont les victimes ne sont plus les aînés, comme on désigne les vieux, mais des enfants, des jeunes, des adultes dans la force de l’âge ! Du coup, les grands résistants de zinc, les adeptes de la poudre de perlimpinpin, sont les premiers à râler dans des files d’attente d’un dispositif qu’on disait surdimensionné la veille.
Il est permis, bien sûr – mais à condition de ne pas avoir joué les vaccino-sceptiques hier – de s’interroger sur ce fameux dispositif. « Il ne manque pas un bouton de guêtre, pardon, pas une seringue » proclamait la Maréchale Bachelot sur le front de la lutte anti A(H1N1). Tout est prévu, organisé, pour que ça se passe comme sur des roulettes. Résultat dès que les convoqués ont répondu à l’appel, panique à bord. X heures d’attente dans des files en plein vent et pluie. Et ça n’a pas manqué, UBUprésident a décrété la mobilisation générale et l’ouverture le dimanche, comme les grands magasins pour les fêtes ! Les médecins militaires, dont on ose espérer qu’ils ne sont pas à la médecine, ce que la musique militaire est à la musique, en renfort. Sonnez tambours, résonnez clairons !
Comme il est dur de faire des prévisions, surtout quand elles portent sur l’avenir, comme disait Chirac, nul ne peut vraiment dire quelle sera l’évolution de cette épidémie. Il est sûr, en tout cas, que plus il y aura de personnes vaccinées, moins elle se répandra.