Surprise, c’est le Nel Obs qui, en marge d’un papier sur la pédophilie à Marrakech, relance la rumeur lancée par Luc Ferry. Sans lui donner beaucoup plus de crédit…
Flash back :quand Ferry fait son intéressant ou « j’ai rien vu, j’ai rien lu, mais j’en ai entendu causer »
Au départ, une « boule puante », particulièrement putride : « A l'approche de la présidentielle de 2002, quelques chiraquiens racontent une arrestation de Jack Lang au Maroc, dans une affaire de mœurs, suivie d'une exfiltration discrète organisée par l'Elysée. Pas la moindre preuve…» L’Express 22/09/05.
Dans leur livre consacré à Jack Lang en 2004, Guy Charbonneau et Laurent Guimier ont longuement enquêté sur cette rumeur marocaine. Et ont démontré qu'elle ne reposait sur rien et qu'"il n'y avait pas le début du commencement d'une preuve qui soit solide." L’Express 01/06/11
Dans un dossier sur le grave sujet du silence de la presse sur les affaires privées des politiques, le Figaro Magazine illustre ce silence par un encadré. On y lit que la police marocaine aurait fait, il y a quelques années, une descente dans une villa de la palmeraie de Marrakech et aurait surpris un groupe de Français en pleine partouze avec … de jeunes garçons. Et parmi eux, bien sûr, un ex-ministre. Le Consul de France à Marrakech alerté saisit l’ambassade et notre ex-ministre est évidemment libéré. Non signé.
Et c’est sur cet article que s’appuie Luc Ferry, le 30 mai 2011, dans le Grand Journal : « Dans les pages du Figaro Magazine de cette semaine, vous avez un épisode qui est raconté d’un ancien ministre, qui s’est fait poisser à Marrakech dans une partouze avec des petits garçons. »
Enquêtes sur une rumeur
Bien que les propos de Ferry soient visiblement bidons (il l’avoue lui-même : « Je n’ai aucune preuve, ni aucun fait précis sur cette affaire, mais à l’époque où j’étais ministre, j’en ai entendu parler. On m’a rapporté mille choses sur mille ministres… » L’Express 01/06/11), une double enquête se déclenche au Maroc et en France.
Au Maroc, la Présidente de l’association « Touche pas à mon enfant » dit, elle-aussi, avoir entendu parler de cette affaire, mais se saisit de la déclaration de Ferry pour du coup saisir la justice. « Bien sûr que tout est vrai » dirait-on, de sources bien informées, à Marrakech.
En France, si l’on en croit Le Parisien « A la suite de ces déclarations et de l’audition de l’ancien ministre de l’Education nationale par les policiers, le 3 juin, différentes personnes ont décidé de témoigner spontanément, confie une source proche de l’affaire (sic). Plusieurs ont notamment relaté s’être retrouvé bloquées, pendant plusieurs heures, dans leur hôtel par la police marocaine au cours de leur séjour à Marrakech. Elles ont ensuite été informées qu’elles avaient été retenues après la découverte de faits criminels commis sur des mineurs dans leur hôtel » Mais ces témoins « spontanés » situent leur blocage entre 2001 et 2004. Parmi les hôtels La Mamounia ! Qui peut imaginer que la police marocaine puisse bloquer plusieurs heures la clientèle plus qu’huppée de ce palace ?
L’article du Nel Obs (« L’affaire Ferry va-t-elle rebondir ? » 04/08/11)) reprend la « boule puante » de 2002 : « A Marrakech, dans le petit milieu des « gens qui savent », personne ne s'étonne des fameuses déclarations de Luc Ferry. Et de raconter une énième fois l'arrestation du « ministre » pris en flagrant délit, l'intervention du consul de France en pleine nuit ou d'un gros bonnet au Maroc, selon les versions, le départ pour Paris par le premier avion du matin... La « rumeur »,relayée en 2001 dans les carnets d'Yves Bertrand, évoquant la Mamounia comme lieu de ces « fêtes », laisse en revanche sceptique» Ce « en revanche » montre que le journaliste prend bien au sérieux le reste du ragot.
Enquête marocaine : oualou ! « il n'y a rien », aurait répondu le Procureur à l’association « Touche pas à mon enfant ».
Côté français, on retrouve les allégations du Parisien, sauf que c’est un quartier qui est bouclé. « Michel de Bonnecorse, ambassadeur de France de 1995 à janvier 2002, a été entendu : "Si un scandale de ce genre avait eu lieu, cela serait remonté jusqu'à moi. Mais les événements sont peut-être postérieurs." » De fait la boule puante chiraquienne est lancée peu avant les présidentielles de 2002, mais le recueil de bruits de chiottes du sieur Bertrand note la rumeur en 2001.
Pour couronner le tout, l’article se conclut par « Selon plusieurs sources marocaines, cependant, des témoins existeraient : les jeunes victimes et rabatteurs eux-mêmes. « Eux, ils ont été arrêtés », dit un membre de l'establishment marocain. » Quel délice que ces sources marocaines et ce membre de l’establishement ! Mais la phrase finale est encore plus délicieuse « Leur avocat a toujours refusé de se faire connaître et encore moins de parler. »
Un hypothétique avocat inconnu muet de surcroît.