Après le débat sur l’identité nationale, toujours pire avec l’islam de France (ou l’islam en France)
André Grjebine : Un modèle de rhétorique finkielkrautienne
Finkielkraut – mais aussi Jacques Julliard et beaucoup d’autres – excelle dans l’exercice : se fabriquer un adversaire caricatural (les « pédagogogues », par exemple), lui faire dire n’importe quoi, pour pouvoir, tel un Saint-Georges terrassant le dragon, en triompher avec superbe.
L’économiste André Grjebine est un nouveau disciple de cette chapelle. Ce spécialiste des pays scandinaves se lance donc dans le débat imbécile, initié par celui qui fait président, sur un prétendu multiculturalisme. « L’eau ferrugineuse : oui. L’alcool : non », pardon « S’ouvrir à l’autre : oui. A son idéologie : non » (Le Monde 26/02/11).
D’entrée de grandes affirmations, non étayées, sur une victimisation sélective qui ferait que l’on fermerait les yeux sur la multiplication des actes antisémites et les pressions que subiraient des enseignants les poussant à ne pas enseigner la Shoah. Or, dans son rapport du 27 janvier 2011, le Service de Protection de la Communauté Juive(sic) constate l’existence d’un seuil structurel élevé, avoisinant les 500 actes antisémites par an, qui se maintient depuis le début des années 2000 (mais une diminution en 2010, par rapport à 2009) ; quant à ces pressions sur les enseignants, dont on devine les auteurs, M. Grjebine serait bien incapable de nous en dire l’ampleur. Et pour cette « assimilation » qualifiée de « républicaine », elle ressort d’une conception bornée (du style « il est interdit de parler breton et de cracher par terre ») de la République et de la Laïcité.
La caricature outrancière s’installe immédiatement. Ceux qui dénoncent l’islamophobie ne peuvent être qu’inspirés par Khomeini. Islam immédiatement assimilé à l’islamisme : « Qu'importe alors que les islamistes soient hostiles à la laïcité, aux droits des femmes ou des homosexuels... ». A partir de là, tout s’enclenche : ceux qui dénoncent l’intégrisme laïque – non identifiés bien sûr – sont prêts à céder à « des exigences (lesquelles ?) qui n'ont été satisfaites pour aucune autre religion ». Ces adeptes de l’intégrisme démocratique sont prêts à « placer la politique sous la domination du religieux ».
L’enseignant de Sciences-Po condescend à admettre que la plupart des musulmans ne sont pas extrémistes. Mais il ajoute ni fondamentalistes comme si un laïque avait à se préoccuper de savoir si un catholique était, comme feignait de nous faire croire le Vicomte Le Jolis de Villiers de Saintignon, un adepte du Christ-Roi à la mode Mgr Lefebvre ou si un juif pratiquant est du style Rabbi Jacob.
Sauf que le discours va dériver vers les accusations grotesques des « sauciflards-pinards » : « Pour d'autres, il s'agit de remettre en cause la laïcité, voire d'introduire les règles de la charia dans les pays dans lesquels ils vivent. L'islam se transforme alors en islamisme. La religion devient idéologie. Cette conception gagne du terrain moins par des actes de violence, que, petit à petit, patiemment, en arrachant une concession après l'autre. » Quelles règles de la charia essayent donc d’imposer ces islamistes ? La nourriture « hallal » ? Attention à l’antisémitisme car la nourriture kascher obéit à des règles encore plus strictes !
Contrairement à ce qu’affirme, mensongèrement et volontairement, M. Grjebine, les démocrates – qu’il oppose bizarrement aux républicains (ne seraient-ils pas démocrates ?) – sont aussi laïques qu’il prétend l’être. Mais – fondamentalistes de la laïcité ? – ils s’en tiennent à la Loi de 1905 et aux débats qui l’ont construite. La république n’ a pas à se ridiculiser dans des questions de chiffons, c’est ce qui ressort d’un débat sur la soutane. Et sur les manifestations religieuses sur l’espace public – ô combien grave débat, lancé par la fille Le Pen, repris au bond par le nabot – Aristide Briand a su faire preuve d’une intelligence, qui manque cruellement à nos pseudos laïques, en jouant la carte de la liberté !