L’EPR n’a que 11 ans de retard avec un coût multiplié par presque six, donc lançons la construction de six EPR 2. Les centrales actuelles les plus récentes vont être mises à l’arrêt pour cause de corrosion imprévue. Le seul renouvelable important, l’hydro-électrique, va subir les effets du changement climatique. Les autres renouvelables – éolien, solaire – sont négligés. Tout baigne !
Arte, 28 minutes, mardi 14 mars 2023, débat sur le nucléaire avec Ludovic Dupin, Elie Cohen et Corinne Lepage. D’un côté un représentant quasi officiel du lobby nucléaire et un Elie Cohen encore plus pro-nucléaire, avec une mauvaise foi affichée. De l’autre, l’ex-ministre de l’environnement d’Alain Juppé, essayant, quand on lui donnait la parole, de rappeler quelques vérités, désagréables aux oreilles de Cohen. Un Cohen qui démontre un talent certain pour botter en touche quand, à une question sur le risque de submersion de la centrale de Gravelines, il répond en … parlant de la relance des centrales à charbon en Allemagne.
Comme on merde la construction d’un EPR, l’urgence est d'en lancer six autres : logique !
Commençons par l’EPR finlandais, magnifique contrat décroché par le Français Areva « En 2006, l'agence finlandaise de la sécurité des radiations (STUK) relève sept cents dysfonctionnements et anomalies concernant la sécurité sur le chantier de l'EPR finlandais et parle « d’impréparation » d’Areva et de laxisme dans « la qualité du travail…, l’organisation et le contrôle des activités sur le chantier ». Elle note, à propos de la construction du liner d'acier qui protège le cœur du réacteur, que les plans changent de manière intempestive, si bien que certains usinages ont été effectués à partir de plans obsolètes. De plus, certaines réparations ont été faites sans respecter les procédures prévues. La STUK dit avoir beaucoup de mal à inspecter le chantier en raison de ces changements intempestifs et conclut qu'une « situation telle que celle-ci ne devrait pas être possible dans un système de qualité fonctionnant correctement ». » Wikipedia (à noter que cet EPR a été mis en service avec 12 ans de retard puis arrêté)
L’EPR de Flamanville n’est pas en reste : construction démarrée fin 2007, il devait entrer en fonction en 2012, de report en report, c’est prévu pour 2024 ? Dès mai 2008, suspension d’un bétonnage raté et une lettre d'injonction de l'ASN, qui exige qu'EDF mette au point des procédures de contrôle satisfaisantes avant toute reprise des travaux… La série noire va continuer avec la cuve, les soudures etc.. Son coût, initialement estimé à 3,4 milliards d’euros, est successivement réévalué par EDF à 4 milliards en décembre 2008, puis à 5 milliards en juillet 2010, puis à 6 milliards en juillet 2011, à 8,5 milliards en décembre 2012, à 10,5 milliards en septembre 2015, à 10,9 milliards en juillet 2018, à 11 milliards en octobre 2018, à 12,4 milliards en octobre 2019, à 13,2 milliards en décembre 2022. En juillet 2020 la Cour des comptes évalue le coût à 19,1 milliards d'euros… et ce n’est sans doute pas fini !
Mais ce n’est pas grave, on ne va pas changer un programme qui merde et « quoi qu’il en coûte » se lancer dans les 6 EPR2 qui, promis, juré, vont marcher du feu de dieu en 2030… 35… 40 … ou pas !
Cohen a joué sur la « perte de compétences » due aux vilains Verts qui auraient programmés la fin du nucléaire. Sauf que, ignorer les procédures « qualité » ne relève pas d’une perte compétence mais de la négligence professionnelle.
Et avec la découverte des fameuses « corrosion sous contrainte » (CSC) sur les réacteurs construits dans les années 80 et 90, les plus puissants et les plus récents du parc nucléaire, on ne peut guère plaider cette fameuse perte de compétence ! Douze réacteurs nucléaires français sont soumis à « une expertise approfondie » du phénomène de CSC : quatre tranches du palier N4, cinq du palier 1 300 MW et trois du palier 900 MW. « Aujourd’hui, nous avons la conviction que la complexité de la configuration et la géométrie des lignes (…) sont une cause prépondérante », explique un expert. Sur les réacteurs les plus anciens, le design des tuyaux est peu sinueux. Elles l’ont été de plus en plus avec la conception des nouvelles centrales plus puissantes.
Canard Enchaîné 15/03/2023 "Cette litanie des malfaçons cachées n'en est sans doute qu'à ses prémices."
Or ce sont nos « géniaux ingénieurs » qui, perfectionnant avec talent le modèle sous licence Westinghouse, ont conçu cette remarquable ‘complexité de la configuration et la géométrie des lignes’ et ce n’est pas fini puisqu’un autre type de fissure a été décelé à Penly ! Et là, on ne peut parler de perte de compétence puisqu’on continuait de construire des centrales avec foi dans ce miracle français du nucléaire.
On a accusé les affreux verts d’avoir poussé Hollande à programmer la fermeture de 20 centrales. Il n’a programmé que celle de Fessenheim, qui a d’ailleurs eu lieu après son départ. Mais EDF accomplit ce supposé souhait en mettant à l’arrêt ses plus récentes centrales !
Et on n’est pas sorti des ronces. Outre des risques de submersion pour les centrales côtières, sécheresse et canicule risquent de poser de sérieux problèmes de refroidissement pour les centrales au fil des fleuves : moins de débit et une eau plus chaude. Conséquence aussi pour l’hydro-électrique avec la fonte des glaciers, les débits des cours d’eaux en baisse…
Mais du côté des autres énergies renouvelables – vent et soleil – la France est à la traîne.
Un article du Monde titrait L’énergie solaire, grande gagnante de la transition énergétique partout dans le monde… sauf en France.
En effet, le photovoltaïque connaît une accélération spectaculaire de sa diffusion. « Malgré les coûts d’investissement actuellement plus élevés en raison des prix des matières premières, le photovoltaïque à grande échelle est l’option la moins coûteuse pour la nouvelle production d’électricité dans une grande majorité de pays du monde » constate l’AIE dans son rapport annuel sur les énergies renouvelables
L’Allemagne (+ 7,9 GW), l’Espagne (+ 7,5), la Pologne (+ 4,9) et les Pays-Bas (+ 4) ont connu des progressions particulièrement élevées. Dans ce dernier pays, le solaire a représenté 14 % de la consommation électrique sur l’année, un record en Europe, alors même que les conditions d’ensoleillement sont moins favorables que dans les pays du Sud.
La France apparaît à contre-courant. En 2022, 2,6 GW de panneaux solaires ont été installés, un chiffre inférieur à celui de 2021 (2,8 GW).
Et pourtant, « la France est longtemps restée dans le peloton de tête avec les Etats-Unis et le Japon, loin devant l’Allemagne. Des entreprises, dans les années 1960 ou 1970, ont été pionnières – je pense à RTC, l’ancêtre de Photowatt, aujourd’hui en difficulté. Dans les années 1970, face au choc pétrolier, le nucléaire est apparu comme la meilleure solution, et le solaire renvoyé à une forme d’utopie ou de lubie. » Daniel Lincot
Peut-on se dire que les bientôt 20 milliards dépensés pour l’EPR, eussent été plus utiles pour financer des recherches sur l’amélioration du rendement des panneaux solaire, le stockage de la production éolienne et solaire, etc. ? Et le nucléaire, pourquoi pas, mais avec des projets plus modestes – il fut un moment question de « mini-centrales » - et bien maîtrisés.
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